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Nagaï Kafû (1879-1959), écrivain à bien des égards inclassable, tient une place à part dans le coeur des lecteurs japonais. Comme Ihara Saikaku avait été celui d'Ôsaka, il fut le chantre de Tôkyô, et cette histoire singulière en porte l'admirable témoignage.Usant d'une langue volontiers archaïsante et recherchée, celui que son public appelle simplement Kafû se plaît à composer des romans sur le modèle de la «littérature de divertissement» de l'époque Edo. Mais à son talent d'observateur aigu et ironique, il joint une réelle profondeur de sentiment, une humanité profonde et pudique, une compassion réelle envers les êtres, une absolue sincérité enfin, et cela confère une étrange résonance à ce qui se donne des allures de dandysme.Son bonheur d'écrivain, il le trouve à détecter, scruter et relater la réalité sociale de sa ville, aussi bien dans les métamorphoses de son espace ou dans le tracé de ses réseaux, que dans les insondables vicissitudes de la vie de ses habitants. Promeneur, rêveur, noctambule, il s'abandonne aux lieux, aux atmosphères, aux rencontres, et son écriture elle-même, tout en notations imperceptibles, finit par devenir feutrée, ombreuse, évanescente, et par nous faire circuler dans une sorte de vide étrange et obsédant...
C'est pour fuir le son des radios et des phonographes de ses bruyants voisins que Tadasu Ôe se rend à l'Est de la Sumida, dans les vieux quartiers populaires de Tokyo. Il vient aussi y chercher le silence et l'inspiration pour terminer son dernier roman. Un soir de pluie, O-Yuki, une prostituée des bas quartiers, s'invite sous son parapluie et il la raccompagne chez elle. L'écrivain prend alors l'habitude de lui rendre visite, heureux de retrouver chez elle un peu de la ville d'antan. Alors qu'il écrivait l'histoire d'un professeur, Taneda Junpei, marié et père de famille, embourbé dans un mariage qui ne le satisfait plus, sa rencontre avec O-Yuki lui donne l'idée de jeter son héros dans les bras de Sumiko, une prostituée avec laquelle il envisage de s'enfuir.
Une promenade nostalgique dans le Tokyo de 1936. La ville tentaculaire continue de s'étendre et de se moderniser. A l'Est de la Sumidagawa, les quartiers de banlieue résistent. Ici la crasse règne, les canaux attirent des nuées de moustiques virulents, ouvriers et prostituées vivotent bien loin des radios qui indisposent le célèbre écrivain Tadasu Ôe. La promenade est aussi clandestine. Pour déambuler dans ces bas-fonds, observer ses habitants et se fondre dans le décor, l'auteur se camoufle dans des vêtements d'homme du peuple. Quand il entame une liaison avec O-Yuki, il ne lui dit rien de sa vie et se laisse aimer par cette femme au charme suranné qui lui rappelle le Tokyo d'un autre temps.
Amoureux de sa ville et fin observateur des métamorphoses qu'elle subit, Nagaï Kafu se livre ici à une double mise en abyme. Un écrivain, Kafu, écrit l'histoire d'un écrivain, Ôe, qui écrit l'histoire d'un professeur, Taneda, tous les trois déambulant dans le quartier de Tamanoi, les deux derniers se rapprochant d'une prostituée miséreuse.
Un livre très court mais troublant, envoûtant, attachant. C'est un plaisir de suivre Kafu dans ses descriptions d'un Tokyo aujourd'hui disparu et qui, en 1936, était seulement en voie de disparition.
L'écriture de cet auteur classique est tout à fait abordable et très évocatrice, on sent la chaleur moite, on aperçoit au loin une femme en kimono se pressant sous la pluie, on explore les ruelles sombres, on rencontre les petites gens de ces quartiers oubliés. Magnifique.
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