Inspirée d’une histoire vraie, cette BD apporte des conseils et des solutions pour sortir de l'isolement
Dans une Bologne sous la neige, quelques jours avant Noël 1953, la très belle épouse d'un professeur universitaire est retrouvée noyée dans une baignoire. Pour découvrir ce qui s'est passé, la police a besoin d'un vrai limier et fait appel au commissaire De Luca, policier de renom pendant la période fasciste et qui avait été mis sur la touche depuis cinq ans. Mais malgré les pistes, les traces et les indices qui s'offrent à De Luca, rien n'est ce qu'il paraît. Épaulé par un jeune policier censé l'aider (ou l'espionner), séduit par une très jeune chanteuse de jazz avec un passé de partisane, le commissaire se retrouve au milieu d'une affaire ambiguë et dangereuse qui l'obligera à s'immiscer dans les coulisses des guerres politiques et du milieu musical et mondain de la ville.
Avec son talent pour construire des intrigues convaincantes et ses solides connaissances historiques, Carlo Lucarelli écrit un récit au charme puissant dans l'Italie de l'après-guerre, entre frivolités du festival de San Remo et violences sourdes de la guerre froide.
21 décembre 1953. De Luca, qui a été le meilleur flic d'Italie pendant la période fasciste et mis sur la touche depuis cinq ans, revient à Bologne incognito afin de résoudre le meurtre de Stefania Mantovani, veuve du professeur Mario Cresca, décédé deux mois plus tôt dans un accident de voiture. Elle a été retrouvée morte dans la baignoire de la garçonnière de son mari.
Une fois sur place, De Luca observe la scène du crime qu'il reconstitue en imagination. Très vite, il se rend compte que certains détails ne cadrent pas avec le déroulement supposé des événements de la soirée. Aucun signe d'effraction. Connaissait-elle son agresseur? Pourquoi ne retrouve-t-on pas les vêtements de la morte? Et pourquoi l'étrangler avec le fil du téléphone dans le salon pour ensuite la noyer dans la baignoire de la salle de bains?? Décidément, rien ne colle...
La mort soi-disant accidentelle du professeur aurait-elle un rapport avec le meurtre de sa femme? Si oui, quel lien entre les deux morts? De Luca pressent que cette affaire n'est pas si simple qu'elle n'en a l'air, dont les dessous ne sont pas clairs: jalousie d'un membre du groupe de jazz dans lequel jouait le professeur? Meurtre politique dans la lutte contre les communistes? Crapuleux? Ou passionnel? Les pistes ne manquent pas et De Luca devra faire preuve de beaucoup de persévérance et utiliser ses facultés de déduction au maximum s'il veut pouvoir démêler les fils de cette affaire bien embrouillée. D'autant que la météo hivernale, chutes de neige, routes verglacées, gêne considérablement les investigations du commissaire.
Une Affaire italienne, Intrigo Italiano. Il ritorno del commissario De Luca dans la version originale parue en 2017, a été publié par les éditions Métailié en 2021. L'écriture sobre, dans un style souvent journalistique, fait ressortir l'art de la mise en scène filmographique propres à l'auteur: "De Luca le vit en premier, le tournant qui pliait la route comme un coude, et instinctivement, ses pieds écrasèrent le plancher de l’auto, sa main gauche agrippant la poignée avec une force à faire mal aux doigts, la bouche encore béante.
Giannino s’en aperçut un instant après, freina avec un autre juron toussé entre les dents et tourna le volant pour se rabattre à droite, de nouveau derrière le camion, mais en fait il était trop tard." (Page 11)..."Il était en haut de l’escalier, sur le dernier palier étroit qui, au-delà d’une rambarde basse et carrée, donnait sur le vide. Il y avait des rubans adhésifs collés sur la porte avec l’inscription “Police” au crayon, et le tampon de la Questure. De Luca les montra à Giannino, d’un mouvement du menton car il avait les mains plongées dans son pardessus, le dossier couleur crème sous le bras. On aurait dit que tout le froid humide de la rue avait été aspiré jusque-là par la cage d’escalier.
Giannino arracha les scellés puis sortit un passe-partout et, en un instant, ouvrit la porte. Il sourit à De Luca mais celui-ci ne le regardait plus. Il fixait l’obscurité au-delà du seuil tandis que son cœur avait commencé à battre fort et cette fois oui, un excès de salive, d’eau à la bouche, vraiment, le contraignit à déglutir." (Page 20).
Construction: chaque chapitre figure une journée d'enquête, l'histoire commençant par la presque-fin, avec l'accident de voiture dont De Luca et son adjoint Giannino sont victimes. Procédé déroutant car le lecteur ne comprend pas tout de suite où ils vont, et pour quelle raison ils se trouvent sur cette route, en plein hiver. Ce n'est qu'à la fin du roman que le lecteur apprend tous les détails et qu'il fait le rapprochement avec tous les éléments de l'enquête qu'il réunit au fur et à mesure de la lecture.
Fil rouge: Guerre Froide, le péril rouge représenté par les communistes =>Un contexte historique difficile, que nous lecteurs d'aujourd'hui peinons à nous représenter: les relations sociales et politiques gangrenées par une ambiance de délation, de méfiance, héritage des années de fascisme et du totalitarisme imposé par le Duce et sa clique.
Descriptions minimalistes, sans détails superflus, à l'image des aperçus de Bologne distillés au fur et à mesure des déplacements de De Luca et son adjoint: " Il vira à gauche dans la via Riva di Reno, longea le canal jusqu’à l’autre bout, tourna sur la passerelle et se gara, coupant le moteur. Il se pencha sur le volant pour montrer une petite fenêtre un peu au-dessus du bord supérieur du pare-brise, les volets fermés, barrés, comme ceux des maisons de tolérance." Car ce qui compte avant tout, c'est l'ambiance de film noir américain des années 50 que Carlo Lucarelli excelle à restituer avec tellement de réalisme que, pour un peu, on croirait lire un roman écrit à cette époque.
Seule la scène de crime bénéficie d'une description soignée, avec un luxe de détails comme dans un rapport de police: "De Luca resta sur le seuil, à souffler des volutes de vapeur humide. Il ferma les yeux, serrant fort les paupières, puis les rouvrit. Une petite mansarde carrée avec une fenêtre fermée sur le mur du fond, réduit par la pente du toit.
À gauche, un grand lit défait. Ou plutôt utilisé pour dormir, un côté découvert et un seul oreiller déplacé, un sommeil solitaire. À côté de la porte, une petite armoire à double porte, ouverte. Mais, répandus sur le lit et sur le sol alentour, tous les livres, les cahiers et les papiers qui avaient dû se trouver dans une modeste bibliothèque au fond, et aussi le contenu des tiroirs des tables de nuit, renversés par terre. À droite, une petite table, la chaise se dressant devant, une machine à écrire, une lampe, une corbeille à papier, tout en place. Mais. Un téléphone au sol, le fil du combiné entortillé comme un serpent. Contre le mur au fond, à côté d’un petit poêle à charbon, une autre petite table avec un tourne-disque et un porte-disque à soufflets. Mais tous les vinyles par terre, hors de leurs étuis de carton, cassés en deux.
Et, dans toute cette partie de la pièce, du sang sur le sol, piétiné, étiré, jusqu’à une porte ouverte qui semblait donner sur la salle de bains." (Pages 20-21)
Carlo Lucarelli nous entraîne dans les glauques méandres de la politique de l'Italie d'après-guerre, une Italie meurtris par son passé fasciste dont elle a bien du mal à se blanchir, à l'image de De Luca mis sur la touche pendant cinq ans et que l'on fait revenir incognito plus par nécessité que par reconnaissance, estimant qu'il est le seul à pouvoir venir à boude cette enquête. La scène où il est reconnu par un tenancier de bar est à ce titre très significative. L'ambiance de film noir, le caractère taciturne du commissaire illustrent l'atmosphère délétère dans laquelle se démène la classe politique de ces années noires. Du grand polar noir...
Le +: ancrage dans la réalité de l'époque avec les gros titres des journaux contemporains de l'histoire: annonces culturelles, publicitaires, de politique intérieure et extérieure, contexte historique: "Oggi
Hebdomadaire sur l’actualité et la culture, IXe année, no53, 60 lires.
Pages intérieures : LES ÉVÉNEMENTS QUI ONT INTÉRESSÉ LES ITALIENS EN 1953 : (janvier) naissance du fils d’Elizabeth Taylor, (février) cyclone en Angleterre et en Belgique, (mars) mort de Staline, Narriman, ex-reine d’Égypte, quitte son mari Farouk, (avril) la princesse Joséphine-Charlotte de Belgique épouse l’héritier du Grand-Duché du Luxembourg, (mai) l’expédition Hunt conquiert l’Everest, (juin) Élisabeth II devient reine d’Angleterre, la révolte de Berlin est réprimée par les Soviétiques, (juillet) fin de la guerre de Corée, arrestation de Béria, ministre de l’Intérieur soviétique, le capitaine Townsend a une relation avec la princesse Margaret, (août) le Chah de Perse et son épouse Farah Diba rentrent dans leur patrie, (septembre) à Syracuse, une statue de la Madone pleure, (octobre) violent orage en Calabre, (novembre) troubles à Trieste encore disputée entre l’Italie et la Yougoslavie, Gianni Agnelli, neveu du fondateur de Fiat, épouse la princesse Caracciolo.
Publicité : bas de classe, femme de grande classe, BAS OMSA, soixante aiguilles." (Page 80).
"La Settimana Incom Illustrata
VIIe année, no1, 60 lires.
En couverture : VALENTINA CORTESE A PASSÉ LES FÊTES DE NOËL AVEC SON MARI, L’ACTEUR ANGLAIS RICHARD BASEHART, ET LE PETIT JACKIE.
Pages intérieures : QUE SE PASSERA-T-IL L’ANNÉE PROCHAINE ? LES ASTRES SONT FAVORABLES. Trimestre d’hiver : désordres intérieurs en Russie et dans les Balkans, renforcement de la puissance mondiale américaine. Trimestre du printemps : progrès de la cause de la paix mondiale. Amélioration de l’économie européenne. Sa Sainteté Pie XII : craintes pour sa santé dans les derniers mois de l’année. Baudoin roi des Belges : un très heureux mariage d’amour." (Page 81).
Roman noir pas très évident à suivre, parce que l'auteur ne donne pas toutes les informations susceptibles de nous aider dès le début. Il les distille petit à petit et parfois, ça m'a gêné. Par exemple, le premier chapitre est un accident de voiture pour De Luca et Giannino le 2 janvier 1954, et tout de suite après, on revient en arrière ; je n'aime pas trop ce procédé où l'on sait qu'il arrive un truc dur aux héros mais on nous laisse en plan pour dire pendant tout le reste du livre -ou du film- comment ce fait arrive.
De plus, j'ai eu du mal à comprendre le travail de De Luca, l'intérêt de cette enquête et les raisons de l'apparition de tel ou tel personnage. Certes, tout est expliqué à la fin.
Et, je dois avouer enfin que certaines répétitions ou longueurs m'ont un peu agacé. Néanmoins, il y a dans ce polar un je-ne-sais-quoi qui retient. Sans doute la force des personnages, De Luca en tête et Claudia une jeune chanteuse qu'il rencontre. Et également la période, assez bien racontée par Carlo Lucarelli, une ambiance trouble dans laquelle certains anciens fascistes ou sympathisants sont encore en poste pendant que d'autres, comme De Luca, qui ont simplement fait leur métier, sont mis au placard et qu'on peut rapprocher de l'après-guerre en France où certains courageux entrés en Résistance dès fin 1944 voire 1945 se sont démenés pour montrer combien ils étaient fiables. Il y a aussi cette construction que j'évoquais au départ et qui fait que l'on recueille des indices au long des pages qui, si elle peut gêner, retient indubitablement le lecteur impatient de connaître les détails de tel ou tel fait. Voilà donc un bilan mitigé pour un livre que je n'ai jamais songé à stopper, signe que dedans, il y a pas mal de bonnes choses.
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