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Tapis d'ivraie

Couverture du livre « Tapis d'ivraie » de Anais Bon aux éditions Memoire Vivante
Résumé:

L'ivraie, cette graine toxique qui entrave la croissance et dont Anaïs Bon tapisse sa poésie, prend peut-être son germe dans l'enfance. Car l'enfance sait tout. Jouir, dormir et naître. Après il faut bien grandir et si pour grandir il faut tuer, sortir alors le grand coutelas. Si porte close,... Voir plus

L'ivraie, cette graine toxique qui entrave la croissance et dont Anaïs Bon tapisse sa poésie, prend peut-être son germe dans l'enfance. Car l'enfance sait tout. Jouir, dormir et naître. Après il faut bien grandir et si pour grandir il faut tuer, sortir alors le grand coutelas. Si porte close, celle du temps disloqué, l'enfoncer. Derrière la porte, la triste farce du quotidien, établie pour repousser les mystères. Sortant de l'enfance, posant un pied dans l'embrasure du monde, il faut résister. Mais à force de résister, on ne sait pas se défendre de cette ignoble trahison du réel.

C'est cette question que pose Anaïs Bon, ais-je jamais su la règle du monde ? Tapis d'Ivraie ne cesse de passer cette interrogation première su le métier à tisser poétique. Il y a cette tension entre le tissu de la mort et la vie greffée par dessus. Il y a cette volonté farouche d'être chair et voix ; mais la chair, comme le temps, se putréfie et la voix s'assèche. Anaïs Bon convoque ses antidotes habituels: l'amour, l'ivresse, le présent. Elle tente d'exorciser sans perdre. Elle cherche prise. Mais sortie des bras du présent, nulle issue ; soulevant ainsi cette dernière question : a-t-on sa part de trahison dans le monde ?

Tapis d'ivraie cherche une esthétique du monde, où il ferait beau, abstraction faite de tout. Anaïs Bon développe sa poésie pendue à la beauté comme une viande à un croc, et coud poème après poème sa voix singulière dans la conscience du lecteur.

"Pas un bruit faux.
"espaces libérés de l'homme".
Au-dessus, béance bleue.
Au plan premier, des moucherons en trille de lumière.
Une douleur diffuse "malgré".
L'on ne sait pas y être seul.
Pour ces névés, j'invente.
La joie impossible du plus-triste.
Il fut cela, et rien d'autre.
Roc, neige.
La plus prime enfance.
J'ai tout su, alors.
Chercher après fut dérisoire.
L'enfance sait tout.
Jouir.
Dormir.
Et naître.
Après, les plus tristes affrontements."

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