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Dans une forme éminemment originale, François Cheng signe là un drame épique où le destin humain, avec toute la complexité des désirs qui l'habitent, se dévoile comme dans les tragédies antiques. Quand reviennent les âmes errantes, un singulier échange se noue, et toute la vie vécue, extrêmes douleurs et extrêmes joies mêlées, se trouve éclairée d'une lumière autre, revécue dans une résonnance infinie. Plus rien ne subsiste à part le désir Pur désir inaccompli Mûr désir inassouvi...
« Ce livre est un joyau, une pierre précieuse et étrange posée sur nos chemins d'humanité » (Bruno Frappat, La Croix).
J’ai découvert François Cheng avec ce livre et il m’a beaucoup touché : l’élégance, la légèreté de son écriture en font un livre incontournable. Connaissant peu la culture asiatique, j’ai pourtant l’impression de la percevoir ici : il y a une belle retenue, un monde invisible à respecter et qui s’invite, s’exprime pourtant dans toute la création au travers de la nature, des sensations, des pensées. Mystère qui réunit et lie éternellement ces trois âmes malgré la séparation physique, malgré la finitude de chacun, malgré la Mort et la barbarie. Et puis le livre se termine par un magnifique poème : c’est le chant de ces trois êtres, c’est le chant de l’homme et c’est le chant de la vie.
C’est avec une écriture forte, tenue, épurée, pleine de grâce, lumineuse, que l’académicien François Cheng embarque son lecteur dans un hymne à l’amour époustouflant.
Une réflexion d’une élégance absolue sur l’amour, l’amitié, la force et la beauté mis en miroir face à leurs opposés comme le sont la vie et la mort.
« L’âme ? C’est bien par elle que la vraie beauté d’un corps rayonne, c’est par elle que la vraie beauté d’un corps rayonne, c’est par elle qu’en réalité les corps qui s’aiment communiquent. »
Par le biais de trois jeunes personnes issues du peuple, l’auteur nous fait découvrir la Chine au temps du règne du premier empereur, un despote inhumain, cruel et sanguinaire, « un monstre d’insensibilité pour le malheur des autres.», qui entre autres atrocités « a mis à mort les architectes et les ouvriers une fois achevée la construction de son futur mausolée. » C’est le roi de la dynastie Qin qui, sous un régime de terreur effroyable, unifia le pays qui prit le nom de Chine, nom venant de Qin. Sa dynastie sera suivie, trois ans après sa mort, par celle des actuels Hans.
F. Cheng en profite pour dénoncer la barbarie humaine : « Horreur ! Horreur ! Horreur ! (...) A ce point de ratage, l’horrible et inutile question encore : pourquoi tout ceci, en ce coin perdu de l’univers, au milieu de millions d’étoiles ?! »
Parmi les trois personnages, se trouve la beauté incarnée par Chun-niang, la force par Jing Ko compagnon auprès des rebelles et désœuvrés et, l’art par Gao Jian-li, un jeune musicien virtuose de zhou. Ces trois-là vont s’unir dans l’amitié et l’amour, une fraternité jusque par-delà le trépas. Les deux jeunes hommes tenteront d’assassiner le potentat en vain et finiront torturés à mort. Seule Chun-niang restera en vie et sera la mémoire de l’Histoire.
François Cheng n’omettra pas de souligner la transmission du savoir de l’art, essentiel à la vie humaine, par l’enseignement. Le jeune musicien, qui va s’attaquer au tyran Qin, devine qu’il va mourir. Alors, il se rappelle son maître lui enjoindre d’assurer la continuité de la Voie sacrée en enseignant. « Avec ardeur, il se met à former des disciples. » pour qu’une résonance universelle puisse continuer à sonner juste… L’art exige d’être perpétué.
Récit initiatique rappelant avec une poésie éblouissante que l’amour est plus fort que la mort. L’amitié plus forte que la haine. La beauté plus forte que la disgrâce.
Comparable à une pierre magnifiquement taillée, ce texte est un bijou, signé par un maître écrivain érudit nous rappelant avec des mots d’une si grande modestie, ce qu’est véritablement le talent dans l’art d’écrire tout en nous interpellant à travers l’Histoire du monde, au fait de devoir rester vigilants face aux haines destructives et si stériles au bienfait de l’Humanité.
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