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Dans ce livre, Pierre-André Taguieff montre que la « déconstruction » recouvre une littérature politico-philosophique aussi foisonnante qu'inconsistante qui, à travers les Gender studies et la « théorie queer », les études postcoloniales et la pensée décoloniale, l'antiracisme identitaire ou racialiste (qu'il appelle « néo-antiracisme »), la « théorie critique de la race » et l'intersectionnalité, a donné lieu à un mouvement intellectuel international dont l'objectif, parfois déclaré, est de criminaliser la civilisation occidentale en la réduisant à une expression du racisme, de l'esclavagisme, de l'« hétéropatriarcat » et de l'impérialisme colonial.
Tous ces courants idéologiques se proposent de « déconstruire » le discours hégémonique de l'Occident en dénonçant son universalisme supposé trompeur et sa « violence épistémique » dont les victimes seraient les peuples dits dominés, racisés et opprimés, ainsi que leurs cultures respectives, et les « minorités » essentialisées en tant que victimes « systémiques ». Tel est le fait inquiétant qui appelle à une réflexion sur ses causes : la civilisation occidentale est convoquée devant un nouveau grand Tribunal de l'Histoire pour répondre de ses crimes, imaginaires ou réels, et, surtout, elle est la seule civilisation à être mise au banc des accusés.
La culture « woke » en dérive, cette culture néo-puritaine et punitive de l'annulation (« cancel culture ») qui permet à des activistes de faire taire les contradicteurs en les diabolisant et de supprimer les auteurs ou les oeuvres qui ne leur plaisent pas, au regard de leurs dogmes idéologiques. Leur programme commun est de supprimer, dans le langage comme dans les pratiques sociales, les institutions et la culture, toute trace de stigmatisation, d'exclusion et de discrimination, ou plus simplement tout élément susceptible d'être « offensant » ou « blessant ». Ces guerriers de la « justice sociale », qui se posent en défenseurs des victimes, veulent donc créer une société parfaite, dotée d'une culture éthiquement « pure », selon leurs valeurs et leurs normes. Ils prétendent lutter contre toutes les discriminations, qu'ils supposent « systémiques » au sein des sociétés occidentales « blanches ».
Cette vision racialiste et « discriminationniste » de l'ordre social fonde leur combat idéologique, qui puise dans un imaginaire victimaire.
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