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« Un piano ça pèse, des pianos encore plus. C'est l'une des conditions pour que ça sonne. Une mère aussi, ça pèse, peut-être pour la même raison. Mais quand la mère meurt, quel poids nouveau ? Et les passés, quel poids chacun ? Le mien, le sien, le nôtre, les Anciens, la langue et la musique survivante, les langues mortes. »
Emmanuel Lascoux propose un premier récit personnel, en forme de méditation poétique sur la langue et la perte. Texte non pas de deuil mais de constat : « perdu (sans) ma mère », écrit-il. Constat, de décès d'abord, celui de la mère. Mais en latin, constat, c'est ce qui consiste, ce dont c'est fait, l'instrument de musique comme la langue, ce que ça pèse, ce que ça vaut. Et chaque phrase vient mesurer ou peser ce qui reste, ce qui est. Sentir le poids toujours plus lourd, ou soupeser le toujours plus léger (vivre, écrire, jouer, dire). Le deuil pénètre la langue, bouleverse la narration : « Combien de jours nous reste-t-il après la mort ? » La musique, elle, persiste : « imaginez ce que ça fait de vivre avec. »
Le texte d'Emmanuel Lascoux est écrit sur l'arête entre prose et poésie. De multiples sons, langues et voix résonnent dans les phrases. On y entend autant Bach que Beckett : « Qu'elle, qu'on le veuille, un mot dit non, ou pas, et c'est comme ça que la phrase. Retour mortel, mieux. Comme on pense sans raison. Comme on vaut sans s'équivaloir. »
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