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Le Paris que révèle cet ouvrage, véritable capitale noire, offre un ensemble composite (s'y mêlent Africains, Antillais, Afroaméricains, Réunionais, Comoriens'), qui renvoie aux réalités vécues par les Noirs immigrés aussi bien qu'aux représentations que Paris s'est fait d'un monde noir issu de ses rêves et de ses fantasmes. Et ceci depuis les premiers pas de la photographie.
Dans aucune ville du monde, les noirs n'ont suscité depuis plus d'un siècle la même curiosité ambiguë, depuis les zoos humains, les cirques, les expositions coloniales et les spécimens exhibés par les biologistes et les ethnographes dans leurs amphithéâtres à l'orée du XXe siècle jusqu'aux enchantements du premier jazz et des danses afro-américaines. Nulle part ailleurs la force noire n'a été accueillie avec l'espoir, dont témoigne le défilé à Longchamp le 14 juillet 1913, et intégrée avec une sympathie à la fois sérieuse et amusée dans les armées de la patrie. Nulle part l'art nègre n'a été regardé avec autant d'intérêt et d'envie, les spectacles et le music hall n'ont fait, dès années vingt à nos jours, une telle place à des artistes noirs. Nulle part la vie sociale n'a offert dans le passé à quelques " indigènes " des colonies un tel espace de liberté et d'égalité relative qui contrastait avec les réalités du monde colonial.
Chronologiquement, cet ouvrage retrace les grandes étapes de cette confrontation. La publicité n'a jamais cessé de chercher à tirer parti de la silhouette, du visage et de la sensualité qu'elle a prêtés aux noirs. Et Paris, qui est apparu comme un lieu de liberté inconnue aux yeux des musiciens et des Gis américains des années vingt et quarante, a été aussi le lieu de formation privilégié des élites africaines, politiques et intellectuelles. Avec les indépendances est venu le temps des étudiants, celui des ouvriers bienvenus dans nos usines, puis celui des familles immigrées qui, confrontées à la misère des années de crise, sont souvent apparues dans la rue pour leur droit au logement ou aux papiers. Tandis que les écoles et terrains de sport accueillaient des enfants noirs, les modes et les musiques venues du monde noir ont métissé Paris.
Un Paris où, contrairement à d'autres villes d'Amérique et d'Europe, il n'y a jamais eu de ghetto noir, ni même de quartier noir. Simplement des lieux d'habitation, de travail, de rencontre et de fête dont certains ont vite pris une place dans les désirs et les fantasmes des Parisiens. Des " villages nègres " du Jardin d'acclimatation au siècle dernier aux Champs Elysées, cent ans plus tard, fêtant la Coupe du monde, visiter Paris capitale noire, c'est, à travers plusieurs centaines de documents inédits et exceptionnels, faire un parcours mental dans les ténèbres de la ville lumière et dans un siècle de son imaginaire.
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