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« Fred détestait écrire ; mais il adorait avoir écrit ». Voilà les mots d’Elizabeth Brown, l’épouse de Fredric Brown, dans la sobre mais touchante introduction de ce recueil qui résonne, comme ajoute sa veuve, comme « une sorte d’adieu à ses lecteurs ».
Je donne sans hésitation la note maximale à « Paradoxe perdu », tout en étant à peu près convaincu que ce n’est même pas le meilleur livre de Fredric Brown.
Alors pourquoi ? Déjà parce qu’il m’est impossible de ne pas encenser cet auteur génial, mais aussi parce qu’il constitue une belle porte d’entrée vers son œuvre. La nouvelle-titre (« Paradoxe perdu », donc) est assez exemplaire du style et de l’imagination sans limites de Brown : un humour absurde et décalé, un jeu sur l’espace et le temps, une approche singulière du rêve et de la folie... Evidemment, s’agissant de nouvelles « à chute », je ne dévoilerai rien de la teneur exacte des nouvelles de cet ouvrage, dont certaines n’excèdent pas 2 pages.
Souvent, on sent, derrière l’humour (très) noir de Fredric Brown, poindre une forme d’espoir, voire de foi en l’homme. Pas forcément en l’humanité entière, mais en certains d’entre eux, même par accident. La nouvelle « Obéissance » est ainsi une sorte d’ode à l’insoumission, à la rébellion, mais sous sa forme la plus pure et la plus généreuse. Ailleurs, au-delà de son ironie, Brown suggère en place dans « Les Ondulats » une vision écologique qui aujourd’hui ressemble à un discours sur ce que l’on appelle froidement la "décroissance". Chez Brown, il n’y a rien de froid cependant, juste des interrogations, des suggestions, des doutes, et toujours ce foisonnement d’idées, de situations décalées, absurdes et parfois bouleversantes.
Je retiens également la descente aux enfers de « Monsieur dix pour cent », nouvelle qui rappelle forcément « Le Portrait de Dorian Gray »d’Oscar Wilde et qui sonne comme un avertissement à celles ou ceux qui seraient dévorés par leur ambition. Cette mise en garde est pourtant, comme toujours avec Brown, dénuée de toute forme de moralisation, de jugement. Et c’est ce qui la rend simplement encore plus puissante et évocatrice.
Voilà en quelques mots pourquoi il serait dommage de passer à côté de ce recueil… comme de n’importe quel autre livre de Fredric Brown !
Ah ! Fredric Brown, l’un des (trop rares) auteurs de SF à posséder un brin d’humour. Excellent recueil de nouvelles. Les plus courtes étant souvent les meilleures. Je ne me souviens pas avoir jamais été déçu à la lecture d’un recueil de Brown. A consommer sans modération !
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