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Papa courait les paris

Couverture du livre « Papa courait les paris » de Louise Meriwether aux éditions Philippe Rey
Résumé:

L'un des plus grands romans classiques de l'expérience noire américaine à l'époque de la Dépression, enfin traduit en français À l'été 1934, nulle part les effets de la Grande Dépression ne sont plus criants qu'à Harlem, où sont établies Francie, douze ans, et sa famille. Dans l'incapacité de... Voir plus

L'un des plus grands romans classiques de l'expérience noire américaine à l'époque de la Dépression, enfin traduit en français À l'été 1934, nulle part les effets de la Grande Dépression ne sont plus criants qu'à Harlem, où sont établies Francie, douze ans, et sa famille. Dans l'incapacité de trouver un travail, le père s'adonne à une série de paris pour les infimes éclats d'espoir qu'ils promettent, mais jamais n'exaucent ; la mère rapièce les vêtements, court les ménages, essaie péniblement de joindre les deux bouts ; tandis que Junior, le frère aîné, est entraîné dans la vie dangereuse des gangs de rue. Francie, elle, est une grande rêveuse, qui sent néanmoins dans sa naïveté d'enfant qu'il y a des risques partout, surtout pour une fille noire à l'aube de son adolescence, qu'il s'agisse d'aller au cinéma ou de traverser son quartier. Harlem, source de tous les dangers, mais aussi lieu d'amour et de tendresse, refuge où s'expriment l'humour, la colère et la vitalité d'une communauté solidaire.
Aux côtés de l'oeuvre de Maya Angelou et de Toni Morrison, Papa courait les paris s'est installé dès sa publication originale en 1970 comme un classique de la littérature américaine, en ce qu'il révèle de la condition noire à Harlem dans les années 1930. Doux-amer, caractérisé par un vif sens de l'observation, ce grand roman de Louise Meriwether, traduit ici pour la première fois en français, est un vibrant hommage à la résilience, à l'intégrité et à l'esprit de son inoubliable héroïne.

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Avis (1)

  • Il aura fallu attendre les cent ans de la militante afro-américaine Louise Meriwether, pour que son premier et plus célèbre roman, paru en 1970, soit enfin traduit en français. S’inspirant de sa propre expérience, elle y raconte le quotidien dans le Harlem de 1934, à travers le regard de...
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    Il aura fallu attendre les cent ans de la militante afro-américaine Louise Meriwether, pour que son premier et plus célèbre roman, paru en 1970, soit enfin traduit en français. S’inspirant de sa propre expérience, elle y raconte le quotidien dans le Harlem de 1934, à travers le regard de Francie, une adolescente noire de douze ans. Roman social autant qu’autofiction, ce livre connut un vif succès lors de sa parution et s’affirma bientôt comme un classique de la littérature noire américaine. Dans sa préface, James Baldwin soulignait sa principale originalité : faire relater la ségrégation par une jeune fille émergeant à peine de la naïveté de l’enfance. Curieusement, Toni Morrison employait concomitamment le même procédé, alors novateur, pour son premier et peu remarqué roman L’oeil le plus bleu. Cet inégal éclat de leurs premiers pas ne devait pas empêcher la seconde écrivain de faire la formidable carrière que l’on sait, et la première de sombrer dans l’oubli.

    La pauvreté et le racisme ayant chassé les Meriwether de leur sud rural pour les envoyer tenter leur chance dans le nord, Louise et ses quatre frères grandissent à Harlem pendant la Grande Dépression, entre un père gardien d’immeuble et une mère femme de ménage. Malgré les moyens modestes de la famille, Louise accède à l’enseignement supérieur, devient journaliste littéraire pour un journal noir, puis scénariste à Hollywood, avant d’enseigner l’écriture créative à l’université tout en s’impliquant dans divers mouvements militant pour la cause noire. Parmi ses essais, romans, et surtout ouvrages pour la jeunesse, c’est sa première parution, Papa courait les paris, qui fait sa notoriété. Cette peinture de la vie de plus en plus difficile au sein du ghetto noir de Harlem, alors que la crise des années trente réduit les hommes au chômage et leurs épouses à quémander une maigre aide sociale, puise largement dans ses souvenirs d’enfance.

    Entre deux petits boulots, le père de Francie est de plus en plus souvent sans ressources. Alors, il parie et joue les intermédiaires à la loterie des nombres, rejoignant la frange interlope des petits trafics en tout genre dont ses semblables se retrouvent à vivoter, sous le contrôle de la pègre et avec la complicité corrompue des autorités. Un gain sporadique, et ce sont quelques jours de bombance, trouées de joie dans un quotidien de plus en plus désespéré, de plus en plus dépendant d’allocations épongeant à peine l’ardoise honteuse grossie chaque mois chez les commerçants du quartier. Observant sa mère se débattre pour maintenir la famille à flot, pendant que son plus grand frère se mêle aux bandes de voyous qui traînent les rues et que le cadet, de plus en plus révolté par l’injustice et le racisme, se frotte aux émeutes qui secouent régulièrement un Harlem en proie aux violences policières, Francie passe du rire aux larmes avec l’insouciance de la jeunesse et, dans une narration d’un naturel confondant, tient la chronique des hauts et des bas de son entourage, peignant, avec une empathie toute de légèreté et de bonne humeur, un tableau plein de vie du quotidien, tissé de désespoir, de violence et de peur, des petites gens d’un quartier en plein naufrage.

    En superposant deux points de rupture – l’éveil d’une toute jeune fille au sortir de l’enfance, au moment où la société américaine sombre dans la Grande Dépression –, Louise Meriwether réussit à la fois une peinture sociologique d’un des moments les plus sombres de l’histoire des Etats-Unis et un roman d’apprentissage plein de fraîcheur, où la découverte de la peur face aux dangereuses et injustes réalités de la vie n’empêche en rien une formidable joie de vivre. Coup de coeur.

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