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Depuis la Seconde Guerre mondiale, le «réfugié» préfère en général l'appellation de «nouvel arrivant» ou d'«immigré», pour marquer un choix, afficher un optimisme hors pair vis-à-vis de sa nouvelle patrie. Il faut oublier le passé : sa langue, son métier ou, en l'occurrence, l'horreur des camps. Elle-même exilée aux États-Unis au moment où elle écrit ces lignes dans la langue de son pays d'adoption, Hannah Arendt exprime avec clarté la difficulté à évoquer ce passé tout récent, ce qui serait faire preuve d'un pessimisme inapproprié.
Pas d'histoires d'enfance ou de fantômes donc, mais le regard rivé sur l'avenir. Mais aux yeux de ces optimistes affichés, la mort paraît bien plus douce que toutes les horreurs qu'ils ont traversées. Comme une garantie de liberté humaine.
Ce tout petit ouvrage d'une quarantaine de pages présente un texte paru pour la première fois dans The Menorah Journal dans lequel Hannah Arendt livre une réflexion sur le statut de réfugié. Statut qu'elle connaît, comme nombre de juifs allemands, pour avoir dû fuir la fureur hitlérienne. Après un passage en France où elle a été internée dans le camp de Gurs en qualité de ressortissante d'un pays ennemi, elle réussi à s'échapper pour rejoindre les Etas-Unis.
Dans cet article, elle rend compte de toute la difficulté des réfugiés à "s'assimiler" alors qu'à la violence du pays qu'ils ont dû fuir répond celle du pays d'adoption ou de transit qui les considère avec suspicion, voire avec haine.
"Nous avons été expulsés d'Allemagne parce que juifs.Mais à peine avions-nous franchi la frontière française que nous devenions des “boches”.
Bien que datant de 1943, le discours de Hannah Arendt reste terriblement actuel. .
Rohingyas, Camerounais, Syriens, Rwandais etc., le nombre de réfugiés politiques ou climatiques ne cesse d'augmenter. Cependant les discours et les pratiques continuent à les déshumaniser en les réduisant à des chiffres, statistiques et quotas à respecter oubliant que chacun d'eux, hommes, femmes et enfants, forment une population en souffrance au passé souvent douloureux et qu'il leur faut faire face à un avenir des plus incertains.
En illustrant les ambiguïtés de l'assimilation d'une minorité par une société, Hannah Arendt nous rappelle que très peu de gens ont la force de conserver leur intégrité après avoir perdu leur statut social, politique et juridique et qu'il est nécessaire de ne pas oublier que les réfugiés sont avant tous êtres humains à traiter comme tels.
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