"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Au-dessus des chutes Victoria, là où les eaux du fleuve Zambèze sont encore calmes, s'était établie une poignée de colons. Mêlé aux voix de trois familles et quatre générations, un choeur de moustiques, minuscules commères, balaie de son souffle ironique les prétentions humaines de ceux qui ont peuplé ce village et oeuvré à la construction de la Zambie.
Les destins des uns et des autres, un photographe britannique, une jeune femme italienne atteinte d'hirsutisme, une grande joueuse de tennis devenue aveugle, la première astronaute zambienne..., dévoilent plus d'un siècle d'histoire marqué par l'immigration européenne, la colonisation brutale et l'acculturation des peuples autochtones jusqu'à l'arrivée récente de travailleurs indiens et d'investisseurs chinois.
Dans cet hommage aux grands romans classiques et au réalisme magique, Namwali Serpell aborde, avec une infinie subtilité et un brin d'anticipation, les questions du féminisme, du racisme et de l'identité d'une nation et des générations qui l'ont composée.
Ce roman retrace la saga sur quatre générations de trois familles installées en Zambie depuis le début du XXème siècle. Tout commence avec l'arrivée en Rhodésie d'un photographe aventurier du nom de Percy Clark tombé sous le charme des Chutes Victoria et du fleuve Zambese.
A travers l'histoire de ces trois familles, on va découvrir ce jeune pays qu'est la Zambie et la force de sa population qui, malgré la misère, la corruption des édiles, les nouveaux investisseurs chinois et le sida, garde toujours espoir.
On notera aussi dans ce roman que les femmes sont les premières victimes d'une société en crise mais qui malgré tout luttent pour leurs enfants. C'est cette jeunesse qui va d'ailleurs tenter de faire bouger les lignes.
Cette fresque qui semble par moment plutôt légère, par la voix des différents familles va mêler astucieusement les différentes cultures tout en évoquant de manière subtil les questions du racisme, du féminisme et de la dépendance de l'Afrique aux anciennes puissances colonisatrices. La lecture de ce roman se fait donc à plusieurs niveaux. Parfois on a le sentiment d'être perdu comme si on déambulait dans les méandres du Zambèse, mais cela ne dure pas et on reprend vite les cours de l'histoire de ces trois familles.
Ce premier roman est une réussite , il a réussi non seulement à m'emmener dans des paysages de rêve à la rencontre d'une faune et d'une flore magiques mais aussi à me faire découvrir la réalité de ce pays qui doit faire face à la noirceur de l'être humain dans son rapport à l'autre et dans son rapport à l'argent.
J'ai aimé cette balade en Zambie mais aussi les différents niveaux de lecture de ce roman qui a plein de choses à transmettre et me suis prise d'affection pour ces femmes peu considérées mais qui tentent à leur manière de faire avancer les choses.
Je remercie donc Masse critique Babelio et les éditions du Seuil pour ce joli coup de coeur.
https://quandsylit.over-blog.com/2022/11/mustiks-une-odyssee-en-zambie-namwali-serpell.html
C'est un livre difficile à lire , à suivre., que j'ai tenu à achever toutefois, sans déplaisir.
Les personnages nombreux,
s'étalent sur quatre générations, ils sont happés par l'effervescence de la vie dans une colonie britannique puis dans le pays en construction, frappés par la précarité dans tous les domaines de leur vie qui détonne,Le livre dit avec force les difficultés d'une jeunesse tumultueuse et des femmes à trouver une voie dans ce bouillonnement d'une contrée africaine rattrapée par le virus du sida, les valeurs semblent plus individuelles que collectives.Foisonnement, entremêlement, fugacité, telle est l'image que le récit renvoie de cette région d'Afrique.
Le récit déroule des fresques familiales en 3 parties: la narration
de la vie des grands-mères, puis celle des mères suivie de celle des enfants dans une région qui deviendra l'Etat de Zambie. le livre dit surtout la condition féminine à travers une diversité de personnages, une condition guère enviable, les rares figures masculines sont dévalorisées.
Voyage dans un pays de l’Afrique australe, la Zambie ; voyage également dans le temps de trois familles et donc de plusieurs générations, qui vont s’entrelacer au fil du temps. Nous avons là, une saga africaine, qui si, il survole le quotidien terre à terre, n’en oublie pas moins les situations et questions sur le devenir de moult pays africains, qui demeurent des proies idéales des pays occidentaux.
Un colon : Percy M. Clarke, s’installe, près d’un site majestueux : les chutes de Victoria situées sur le fleuve Zambèze. Ainsi, au fil des pages vont apparaître : une enfant dotée de poils sur tout le corps, une adepte du tennis aveugle, une mère indigne, etc... Le drame pour ce florilège de femmes qui devront lutter et outrepasser ces handicaps pour continuer la lignée de la famille. Sans compter également, par le brassage des races : blanche, noire et indienne ; qui apporte une situation excessivement difficile à vivre, à certaines époques.
Mais au-delà de vie éminemment attristante du quotidien de ces femmes et de leurs enfants ; le contenu politique sous-jacent au début viendra par la suite interpeller le lecteur sur les sujets macroéconomiques. Le népotisme inhérent à toute nation, la guerre véritable cauchemar et ce quelle que soit la couleur de la main qui tient l’arme, la lutte des femmes pour la reconnaissance de leurs droits dans tous les compartiments de la vie, bien évidemment la lutte contre le racisme qui n’épargne aucun pays, la volonté de créer un groupe, une identité voire enfin une nation. Enfin si beaucoup de pays africains ont obtenu de haute lutte leur indépendance, il convient de s’interroger sur les interventions de la Chine et des pays occidentaux qui sous couvert d’aides puis d’investissements pourrait être considérées comme un colonialisme larvé. Bref et sans fournir une liste exhaustive des sujets abordés, les pistes de réflexions s’avèrent bien nombreuses !
Mustiks une odyssée en Zambie, un roman doté de 698 pages, qui comporte certaines longueurs ; et avec un épilogue surprenant sur le devenir de la civilisation : un genre d’anticipation ou peut-être une dystopie ? Namwali Serpell a semble-t-il recensé les maux de son pays afin de nous faire – culpabiliser ? - réfléchir à nos propos et actions envers les pays africains.
Un grand merci aux Éditions du Seuil et Babelio pour la découverte de cette auteure et de son pays.
Pour raconter l’histoire de son pays, la Zambienne Namwali Serpell fait une incursion dans le réalisme magique, avec une vaste fresque aux personnages hauts en couleurs, nés des liens tissés entre trois familles sur quatre générations, de 1900 jusqu’à un futur proche.
C’est un personnage réel, le photographe britannique Percy M. Clarke, pionnier établi au début du XXe siècle sur le Zambèze en amont des chutes Victoria, qui sert de point de départ au roman. Père fondateur d’une lignée imaginée mêlant de nombreux sangs – européens, indiens et zambiens –, il est ici le symbole d’une première empreinte étrangère sur une terre qui ne parviendrait plus à se défaire de ses colonies d’envahisseurs, puisqu’après le protectorat britannique, la Rhodésie devenue Zambie à son indépendance en 1964 tomberait sous une autre coupe : celle des investisseurs chinois cette fois.
A partir de ce début de la colonisation du pays, ils sont neuf personnages fictifs à servir tour à tour de focale au récit, en autant de parties regroupées en trois époques : celle des grands-mères, respectivement italienne, anglaise et zambienne ; puis, au fil de métissages divers et successifs, celle des mères et celle des enfants. A chaque génération, l’histoire se répète : tous ont beau tenter de reprendre le contrôle de leur destin, leurs espoirs finissent immanquablement par sombrer, le pays en perpétuelle crise économique, ses habitants réduits à la misère, leurs plus belles initiatives détournées au profit de puissants corrompus ou étrangers, et leurs vies bientôt menacées par l’explosion de l’épidémie de sida en Afrique. Ce sont toujours les femmes qui prennent le plus cher, quand, la plupart du temps, elles se retrouvent seules à assurer durement leur survie et celle de leurs enfants. Pourtant, la jeunesse reprend chaque fois le flambeau de la contestation et de l’action, laissant à penser que les choses finiront bien pour bouger un jour...
Entremêlant librement sa fiction de figures réelles – tel l’inouï et très idéaliste professeur Edward Makuka Nkoloso qui tenta de convaincre son gouvernement de créer un programme spatial national –, mais extrapolant toujours la réalité avec une fantaisie parfois désarçonnante – comme au travers de Sibilla, dont le récit exploite l’hirsutisme jusqu’à en faire une créature quasi fabuleuse –, Namwali Serpell a trouvé, non sans humour, une formule particulièrement imagée et habile pour nous faire envisager la situation de son pays sous tous les angles possibles – historique, politique, social, culturel –, et pour nous faire toucher du doigt, au travers de quelques destins particuliers, le long et incessant combat de cette nation pour construire une identité mise à mal par l’arrogance raciste et prédatrice du monde.
Pour mieux prendre de la hauteur sur ce marécage où les marionnettes humaines se débattent dans leurs passions tragiques, la narration, surgie de profondeurs historiques et prolongée d’une projection teintée de science-fiction, s’entrecoupe du choeur bourdonnant des moustiques vaquant imperturbablement d’une peau à l’autre, peu importe sa couleur, et commentant ironiquement l’absurde inanité de tant de complications entre les hommes.
Cette fresque d’une ampleur exceptionnelle, parfois déroutante dans ses aspects les plus magiques, voire un brin fastidieuse dans certains de ses méandres, s'avère toujours intelligente dans sa manière de mêler les registres, du plus classique au fantastique et à la science-fiction, pour servir une réflexion très ironique, désabusée mais pas désespérée, sur le racisme, sur le féminisme et sur la difficile construction de l’identité des peuples africains, certes aujourd’hui indépendants politiquement, mais toujours économiquement assujettis aux puissances étrangères.
Si je devais résumer en quelques mots mon ressenti après la lecture de Mustiks de Namwali Serpell, premier roman de cette femme de lettres zambienne, ce serait : Une épopée particulièrement époustouflante et audacieuse, une fresque historique politique et humaniste où histoire réelle et magie s’entremêlent.
Le premier narrateur de ce vaste roman de fiction historique et de science-fiction est Percy M. Clark, un aventurier, photographe, originaire de Cambridge, arrivé en Rhodésie dans les premières années du XXe siècle, tombé sous le charme des Chutes Victoria et de ce fleuve Zambèze, et qui décida d’y rester comme d’autres colons. Il monte la première boutique de curiosités, de souvenirs.
Il est l’aïeul par qui tout commence. En effet, une série d’événements a lieu et les actions de ce premier colon dans The Old Drift, personnage ayant existé, sont à l’origine de l’entrelacement de trois familles installées en Zambie, sur quatre générations, du début du XXe siècle à nos jours, et que l’auteure nous révèle peu à peu.
À travers le destin de ces trois familles, une zambienne, une italienne et une indienne, mêlées à leurs voix, un chœur de moustiques, véritables commères, « bourdonnant comme un chœur allemand » commente ironiquement les décisions ou les prétentions humaines.
Namwali Serpell dévoile plus d’un siècle d’histoire, du passé précolonial de la Zambie jusqu’à un futur proche où un nouvel appareil numérique est intégré dans la paume de la main de chacun.
C’est à la fois historique, ironique, parfois surréaliste et de plus en plus addictif à mesure que l’on avance dans la lecture.
Je me suis parfois un peu perdue dans les personnages, mais un arbre généalogique en début d’ouvrage permet de vite se repérer si besoin.
Je me suis rapidement laissée emporter par ces personnages zambiens, la plupart très attachants et notamment par ces femmes extrêmement courageuses et astucieuses. La question du féminisme est d’ailleurs omniprésente au cours de cette saga et comme la question du racisme et de l’identité d’une nation et des générations qui l’ont composée, questions également abordées dans le roman, elles sont toutes approchées avec une infinie subtilité.
J’ai souri et même ri en découvrant l’entraînement de cette première Astronaute dont le professeur Edward Makuka Nkoloso, rêvait d’être le premier à poser le pied sur la Lune. Mais quelle n’a pas été ma surprise en découvrant que cet homme, dans les années 1960, a réellement tenté de convaincre son gouvernement de créer un programme spatial national afin d’essayer d'envoyer un homme dans l'espace, puis, à terme douze afronautes, terme qu’il a inventé, et dix chats sur la planète Mars ! Mais, n’était-ce pas pour cet idéaliste excentrique une manière de faire réagir et réfléchir, susciter le débat, faire avancer les choses…
J’ai beaucoup appris sur ce pays qu’on, ou du moins que « je » connaissais si peu, ce pays dont l’indépendance est proclamée le 24 octobre 1964, Kenneth David Kaunda en devenant le premier président de la République, un chef d’état modéré, prônant une « société multiraciale » ; l’ancien protectorat britannique de Rhodésie du Nord sera désormais connu sous le nom de Zambie, ce nouveau nom tiré de son fleuve Zambèze.
Namwali Serpell excelle à faire vivre l’histoire dense, richissime et souvent complexe de son pays par le biais de destins familiaux, nous contant l’amour, les désirs, les rêves mais aussi les trahisons, les drames qui traversent ces lignées.
Si j’ai parfois été quelque peu déroutée par le fantastique présent dans le roman, la poésie et la beauté qui s’en dégagent me l’ont ensuite fait apprécier.
Namwali Serpell ne pouvait envisager un roman aussi complet sans évoquer ce terrible fléau qui ravagea le continent africain, ce VIH, le virus responsable du sida.
La prouesse et le talent de l’auteure, est de nous donner à entendre différentes voix, permettant ainsi au lecteur de voir l’histoire sous différents angles, restituant un récit totalement politique, fortement instructif, un récit déchirant, époustouflant et pourtant parfois hilarant !
Merci à Babelio et aux éditions du Seuil pour m’avoir permis de découvrir cet extraordinaire et fabuleux roman dont la couverture est déjà éblouissante !
Chronique illustrée à retrouver sur : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
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