"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Angel Molinos, docteur en psychologie et écrivain raté, basé à Vitoria comme le héros de Moi, assassin, travaille pour l'Observatoire des Troubles Mentaux (OTRAMENT), centre de recherche affilié aux Laboratoires Pfizin de Houston, qui suit l'évolution des maladies mentales et teste de nouvelles molécules sur des cobayes humains. Sa mission est d'identifier de nouveaux profils «pathologisables» afin d'aider Pfizin à élargir sa pharmacopée. Les nuits d'Angel sont hantées de cauchemars. De retour dans son village natal, que des rumeurs d'homosexualité l'ont forcé à quitter à l'âge 16 ans, il retrouve son père atteint d'Alzheimer et renoue avec l'homme, devenu moine, qui l'a initié à l'homoérotisme. Il comprend que son métier est lié à ce trauma : il crée des catégories d'«anormalité mentale» pour se venger de l'étiquette homosexuelle qui a bouleversé sa vie. Rentré à Vitoria, il décide de rallier la cause d'un collègue qui prétend dénoncer les pratiques d'OTRAMENT. Mais le lanceur d'alerte a disparu, et Angel trouve devant sa porte la main coupée de ce dernier. Ses employeurs auraient-ils décidé de se débarrasser de lui ? L'inventeur de fausses folies serait-il en train de devenir fou ? Cette histoire de Big Pharma découpant nos vies et nos psychés pour optimiser ses profits pourrait se dérouler partout, mais ses tonalités politiques ajoutent un volet au portrait sans fard de l'Espagne contemporaine qu'Altarriba trace de livre en livre. Et la mystérieuse ville basque de Vitoria, au centre de sa «Trilogie du Moi», devient pour lui ce que Dublin fut pour Joyce ou Providence pour Lovecraft, le lieu mythique d'où sourdent toutes les peurs, toutes les hantises qui habitent ses héros.
Suite de ma découverte des étagères de @bdotaku avec ce deuxième volume de la "trilogie du moi" du duo espagnol Altarriba au scénario, Keko au dessin. « Moi, fou » vient chronologiquement après « Moi, assassin » et avant « Moi, menteur ».
Je découvre un univers riche, complexe et terriblement prenant. Altarriba tisse une toile qui ne vous lâche plus. Angel Molinos, docteur en psychologie et écrivain raté, travaille pour l'Observatoire des Troubles Mentaux (OTRAMENT), centre de recherche affilié aux Laboratoires Pfizin, qui suit l'évolution des maladies mentales et teste de nouvelles molécules sur des cobayes humains. Sa mission est d'identifier de nouveaux profils "pathologisables" afin d'aider Pfizin à élargir sa pharmacopée.
Angel va mal, il fait des cauchemars, il veut dénoncer son employeur et changer de vie. Le récit tourne alors au thriller paranoïaque. Le scénario est comme Otrament, il manipule le lecteur, le tient dans ses griffes et lui administre son poison page après page.
Le dessin de Keko accompagne à merveille le récit. Ce noir épais plante une ambiance lourde et pesante. Les petites touches de jaune sont rares mais porteuses de sens. Le tout donne un album intelligent qui pose des questions politiques tristement d’actualité. Quel rôle joue vraiment l’industrie pharmaceutique dans les maladies mentales ? « Où s’arrête la singularité et où commence la pathologie ? »
Une sacrée découverte pour moi que cet univers intense et puissant. Une trilogie que j’ai bien l’intention de lire totalement !
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