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Arthur Schnitzler Mademoiselle Else « Une jeune fille de la bourgeoisie viennoise, en villégiature avec sa tante dans un palace italien, apprend que son père, ruiné à la suite de malversations financières, ne pourra être sauvé du déshonneur et de la prison que si elle parvient à soutirer à un ancien ami de la famille, le marchand d'art Dorsday, une somme importante. Celui-ci lui promet l'argent à la condition qu'il puisse la contempler nue. Le vieux Dorsday répugne à Else - elle veut bien être une garce, mais pas une grue - et sa proposition déclenche chez elle un délire qui trouvera son épilogue grandiose dans la scène où elle se déshabille dans les salons de l'hôtel avant de se donner la mort en absorbant des somnifères. » Roland Jaccard. Mademoiselle Else ou le soliloque tragique d'une femme piégée par les oscillations de l'âme. A travers les mots et les errances désespérées de son personnage, Schnitzler brosse le tableau exemplaire des fascinants déchirements de la morale viennoise au tournant de la modernité, valse - hésitation entre désir et devoir, entre fantasmes de prostitution et rêves de continence. Publié en 1924, ce texte demeure l'un des plus beaux exercices de style de la littérature contemporaine. Précédé de Arthur Schnitzler, l'inoubliable, par Roland Jaccard. Traduction par Henri Christophe.
Je me sens encore un peu en colère, alors que j'ai laissé passer quelques jours après cette lecture. J'aime découvrir une histoire et son dénouement par moi-même, mais à peine quelques lignes de la préface lue que j'en connaissais déjà la fin. Cela m'a profondément abîmée dans ma lecture, car j'avais directement un sentiment différent et une attente consciente du dénouement... Et même s'il s'agit d'une réédition, d'un livre écrit il y a plusieurs années, je préfère découvrir un livre par moi-même et m'interroger plus avant si j'en ressens le besoin... Un gout amer et une pointe fâchée encore aujourd'hui. Il m'arrive de me "spoiler", mais cela ne m'est pas imposé...
Quoi qu'il en soit, l'histoire d'Else est intrigante, fascinante dans un sens. On suit son interrogation permanente sur une situation qu'elle souhaite maîtriser, mais qui finit par lui échapper. Le livre est écrit sous forme d'un monologue continu, mêlant les réflexions de la jeune fille et les tiraillements qu'elle ressent. En voyage avec sa tante et son cousin, elle dépeint ses journées et les pensées profondes concernant les personnes qu'elle côtoie. Else est une jolie jeune fille de la bourgeoisie. Son père est un avocat reconnu, mais qui semble vivre bien au-dessus de ses moyens et ce qu'il gagne ne suffit pas à profiter de ce train de vie actuel.
C'est un courrier de sa mère qui vient perturber les habitudes vacancières : le besoin de liquidité est tel, que son père risque la prison. Elle lui demande, au nom de son père, de la famille, de pouvoir parler avec une personne qui se trouve dans le même hôtel qu'elle actuellement et qui est déjà venu en aide à son père par le passé : M. Von Dorsday. Ce dernier, d'un âge certain, entend la demande de la jeune fille mais lui demande en retour un petit quelque chose, trois fois rien : pouvoir l'observer à minuit dans une clairière baigné par la lumière de la lune, entièrement nue...
On suit les interrogations, les paradoxes, les tiraillements d'Else dès la lecture de la lettre de sa mère. Il y a l'envie et le besoin de venir en aide à la famille, puis des interrogations diverses concernant la demande, la réalisation de celle-ci, mais aussi la faisabilité.
Une telle demande est somme toute indécente, encore plus à cette époque où la nudité est cachée, proscrite voire dangereuse. On s'immisce dans les pensées de cette jeune fille dont l'auteur arrive à nous faire ressentir moult subtilités.
Arthur Schnitzler dépeint avec brio cette relation au père qu'Else admire et aime, mais en même temps cette colère sourde de se dire que ses parents se doutent bien de la situation dans laquelle ils la placent. L'auteur nous plonge dans ses doutes, ses peurs, ses décisions, ses incertitudes. Elle peut sauver son père, sa famille de la honte, mais en portant en elle l'opprobre et cette part de "vice".
Le portrait dépeint par Arthur Schnitzler est vraisemblable. Si au début, j'ai été un peu énervée par le ton et les propos d'Else, j'ai été vite rattrapée par le mode "pensées décousu". Il s'agit d'une jeune fille de 19 ans, à une époque où puritanisme, famille, religion sont quasi permanent dans la société. Ses pensées ne sont pas permanentes, ou fluides. Elles sont percutantes, hachées, déstructurées, paradoxales pour certaines. Là où je me suis sentie agacée au début, c'était par ce côté parfois simpliste et/ou fantasmé. Et pourtant, tout l'intérêt est là : être remué par des pensées qui finalement "ne nous appartiennent pas".
Mon grand bémol est que ce roman/nouvelle va trop vite : suivre les pensées d'Else était par moment laborieux. J'aurais eu besoin et aimé approfondir davantage certains passages. Connaitre un peu le contexte historique de l'époque donne des clefs de compréhension.
Là où j'ai été conquise, c'est par le côté profondeur de la pensée : cette histoire a dû être à plusieurs points de vue choquante à sa sortie. Comment une jeune fille peut déjà avoir ce genre de pensée sur elle-même alors que sa famille lui demande de l'aider à régler une situation complexe pour sortir le père des risques juridiques qui pèsent sur lui. En me replaçant dans ce contexte, Else me semble forte derrière son sourire sa politesse. Ses choix et sa réflexion autour de la situation sont pertinents.
En bref : un roman court entrant dans les méandres et les pensées d'une jeune fille tiraillée entre la bienséance et l'envie d'aider sa famille.
Un classique que j'offrais régulièrement il y a un temps. Une jeune fille coincée dans une époque et un cadre bourgeois viennois doit choisir de sacrifier son intégrité pour épargner son père. L'ouvrage se présente sous la forme d'un long monologue, forme qui est assez moderne pour l'époque, et dans le fond du fait des propos qui sont rédigés par un homme.
A lire et relire!
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