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- Un jeune homme d'une vingtaine d'années, s'adressant à un auditoire imaginaire depuis le fond de sa cellule, nous raconte son histoire, son enfance. Cette cellule, on le comprendra vite, est en fait une cachette d'où il attend d'être tiré par des hommes qui peuvent lui apporter le meilleur comme le pire : tout le livre est rythmé par cette attente dont l'issue ne sera connue qu'aux dernières pages.Lorsqu'il avait neuf ans, son père lui est revenu après quatre ans d'internement dans un camp à la réputation terrible, appelé la Plantation. Véritable mort-vivant, spectre méconnaissable, ce père ne prononce plus une parole, il n'est plus dans la vie. Les seuls sons qui s'échappent en secret de son gosier, il les réserve aux oiseaux prisonniers de la boue des marais, dans une forme de communication hors du monde, extra-naturelle. Cependant, une soi-disant nation nouvelle est en construction. On s'y gargarise de slogans creux, de périphrases absurdes. Le contrôle de la parole est un enjeu primordial de tous les régimes. Devenu presque adulte, le garçon refuse cette falsification du langage et ce qui va avec : l'incorporation obligatoire dans une guerre inter-ethnique qui n'avoue pas son nom. Il se cache en attendant la fuite. Paradoxalement, comme pour refermer la boucle, c'est sur les lieux mêmes de la Plantation qu'il va trouver un refuge provisoire, là où la vie de son père s'est brisée.
- Kossi Efoui, né au Togo, se consacre en partie au théâtre. Ses pièces sont jouées sur les scènes africaines et européennes. Il a publié également de la poésie. L'ombre des choses àvenir est son quatrième roman, après le très remarqué Solo d'un revenant (2008), qui lui a valu le prix des Cinq continents de la francophonie.
« Il n’y a pas de meilleure cachette qu’une cachette peuplée », c’est ce que lui dit celle qu’il prénomme « l’hôtesse ». Il n‘en saura pas plus, ni sur l’endroit où il est caché, ni sur les autres.
Le clair de lune laisse voir « la bassine avec son pêle-mêle de carnets aux feuilles arrachées, la bouteille encore pleine aux trois-quarts, couleurs brune macérée, les pieds du tabouret ».
C’est là, dans cette pièce, avec une petite lucarne à l’arrière, que l’homme attend l’arrivée de ceux qu’ils appellent « les hommes-crocodiles » qui lui feront passer la frontière de ce pays et dont on ne sait rien, si ce n’est qu’ils font peur aux garde-frontières.
Le narrateur revoit le passé, l’ancienne dictature qui lui a volé on père, musicien, parti dans un camp, appelé « La Plantation » et revenu du néant sans jamais plus parler avec, pour seul bagage, l’étui vide de son instrument de musique « En raison des circonstances, préparez-vous à être momentanément éloigné de vos proches », paroles des gardes venus faire des razzias. «La mère a été internée pour grave dépression et en est morte. Le narrateur est recueilli,vers cinq ans avec d’autres enfants, par une femme au grand cœur. « Maman Maïs » qui se prostitue pour nourrir les enfants recueillis; ce furent peut-être ses meilleures années.
Avec l’arrivée du nouveau gouvernement, tous les espoirs sont permis. Comme son père revenait de « La Plantation », l’état lui verse une pension et l’enfant intègre une école réputée. C’est là qu’il rencontre un vieil homme et sa librairie où il travaille, se forme
« La matière première » nom donné au pétrole est convoitée, le pétro-dollar bien sûr et la crainte est là. Le gouvernement décide que les jeunes à partir d’un certaine âge, doivent subir « l’épreuve de la frontière », autrement vous êtes considéré comme un « déserteur en temps de paix. ». Déloger les frontaliers, les affamer pour une réddition, « une sédentarisation forcée et oisive », mais qui ne fonctionne pas très bien, alors, l’obligation de défendre la frontière et d’y mourir… On donnera à une avenue le nom de « Martyrs de l’esprit modèle » des morts valent bien une plaque à leurs noms !!!
Ceux qui en reviennent ne sont pas mieux que ceux revenus de la Plantation ». Le tuteur du narrateur l’exfiltre vers « l’hôtesse » et lui donne un précieux conseil « Quand tu parles, pense toujours que quelqu’un est en train de te traduire dans une langue que tu ne connais pas, et tu feras plus attention à tes mots »
Sans faire référence à un pays spécifique, et je ne connais pas l’histoire togolaise, l’auteur nous parle de résistance, des camps de concentration (la Plantation) ce qui rend malheureusement son histoire universelle.
Un livre où la poésie n’efface pas l’horreur, où un humour caustique et sain permet d’avancer. L’espoir réside dans les failles que tout système comporte. Une curiosité, les titres des chapitres : Premièrement, deuxièmement...
Un coup de cœur. Je retournerai auprès de cet auteur.
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