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L'étranger

Couverture du livre « L'étranger » de Howard Phillips Lovecraft aux éditions Publie.net
Résumé:

The Outsider date de 1921. On y reconnaît les figures essentielles de Lovecraft, scène d´effroi, architectures fabuleuses, mise en avant dans le récit de la figure du narrateur, comme lieu même de la transgression fantastique.
Mais la brièveté de ce texte lui donne un statut particulier : ... Voir plus

The Outsider date de 1921. On y reconnaît les figures essentielles de Lovecraft, scène d´effroi, architectures fabuleuses, mise en avant dans le récit de la figure du narrateur, comme lieu même de la transgression fantastique.
Mais la brièveté de ce texte lui donne un statut particulier : techniques du poème en prose, rigueur des constructions et du mouvement des phrases, netteté des coupures de paragraphe. C´est ainsi qu´on dépasse l´histoire d´épouvante pour atteindre à la parabole, la fable. Et parce que cette fable vaut toujours, The Outsider est pour tous les amoureux de Lovecraft un récit essentiel.
Et d´abord le titre. Outside, dehors, revient plusieurs fois dans le texte, lui-même sans cesse articulé sur ces transitions entre dedans et dehors. The Outsider : celui qui vient du dehors, longue périphrase. J´ai pensé à cette chanson L´Étranger de Leonard Cohen, évidemment c´est par l´étranger qu´il faut traduire, pour nos résonances d´aujourd´hui. Mot bien fort que lorsque stranger fait une timide apparition à la fin du texte, et que nous avons rendu ici par intrus.
À nouveau la révérence à Edgar Poe, côté du Masque de la mort rouge et du Portrait ovale. Dans la distance à la langue aussi, et c´est pour traduire le plus jouissif de Lovecraft : il écrit en 1920 dans une langue qu´il proclamait, disait-il, celle de deux cents ans plus tôt. C´est cette tension de la langue et du présent qui lui permet tous les reliefs, toutes les nappes. Le vocabulaire français est plus limité que l´anglais pour les mots qu´il utilise comme une percussion musicale, récurrente, ceux de l´effroi, l´horreur, le bizarre, le putride, le nauséeux, le moisi et tout cela. Mais si on pense à la musique et à ces récurrences, on a la surprise de phrases qui viennent en français épouser littéralement et exactement la phrase anglaise.
On doit attendre longtemps, pour traduire. Savoir les architectures (qu´on soit attentif ici au travail sur la lumière), les déplacements, les parcours, les phrases par lesquelles change le statut même du réel.
Enfin, qu´on ne serait pas amoureux ainsi de cette histoire si elle n´était pas aussi, en amont, un décryptage de l´apprentissage du monde par les livres, de ce qu´on met dans les livres pour s´imaginer le monde. Et c´est bien ce qui donne sa radicalité, sa puissance, à cette histoire : probablement parce que nous aussi préférons les livres, quitte à rester du côté de l´étranger.
Ruth Szafranski

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