Un aperçu jour par jour du grand rendez-vous de la rentrée littéraire...
C'est un terrain vague, au milieu d'un lotissement de maisons pour l'essentiel réservées à des militaires. Au fil des ans, les enfants du quartier en ont fait leur fief. Ils y jouent au football, la tête pleine de leurs rêves de gloire. Nous sommes en 2016, à Dely Brahim, une petite commune de l'ouest d'Alger, dans la cité dite du 11-Décembre. La vie est harmonieuse, malgré les jours de pluie qui transforment le terrain en surface boueuse, à peine praticable. Mais tout se dérègle quand deux généraux débarquent un matin, plans de construction à la main. Ils veulent venir s'installer là, dans de belles villas déjà dessinées. La parcelle leur appartient. C'est du moins ce que disent des papiers « officiels ».
Avec l'innocence de leurs convictions et la certitude de leurs droits, les enfants s'en prennent directement aux deux généraux, qu'ils molestent. Bientôt, une résistance s'organise, menée par Inès, Jamyl et Mahdi.
Au contraire des parents, craintifs et résignés, cette jeunesse s'insurge et refuse de plier. La tension monte, et la machine du régime se grippe.
A travers l'histoire d'un terrain vague, Kaouther Adimi explore la société algérienne d'aujourd'hui, avec ses duperies, sa corruption, ses abus de pouvoir, mais aussi ses espérances.
Un aperçu jour par jour du grand rendez-vous de la rentrée littéraire...
"Cette poésie dans l’écriture qui dépeint merveilleusement bien cette atmosphère si particulière d’Alger..."
Un roman frais qui aborde de manière originale un sujet grave ; l'enkystement de la société algérienne malgré ses atouts.
Un terrain vague a été préempté par deux généraux pour y bâtir leur villa. Mais ce terrain est utilisé par les jeunes pour jouer au foot ; ce terrain devient un enjeu et seuls les enfants, sous le regard effrayé des adultes, vont se battre pour tenter de le conserver.
En toile de fond, l'histoire de l'Algérie de la guerre d'indépendance à aujourd'hui.
Sans complaisance avec un ton faussement naïf sont abordés la corruption, la pauvreté, le désoeuvrement, une élite qui s'accapare les richesses, l'islamisme, les réseaux sociaux, etc.
Le style est sobre, posé et l'histoire a du charme.
On s'attache aux personnages.
Vraiment un petit livre qui vaut le coup.
Assurément une très belle écriture. Nous sommes dans une sorte de conte d'aujourd'hui où les enfants osent s'opposer à la force pour défendre leur idéal : un terrain vague qui représente tant pour leur communauté... Profond, une belle peinture d'un monde qui cherche ses repères...
Livre passionnant et instructif, non sans humour, qui aurait pu se nommer "Rébellion". Ou comment et pourquoi, des enfants vont prendre leur revanche sur le passé. Toute l'histoire algérienne, la lutte pour l'indépendance, la colonisation, la corruption traversent ce roman et ont définitivement marqué les protagonistes. Des enfants vont combattre des généraux (qui veulent s'installer sur leur terrain de jeux pour y construire des résidences de luxe), mais seront-ils insuffler l'espoir aux générations futures ? Inspiré de faits réels...
Un titre intrigant qui trouve son origine dans les manifestations pour l’indépendance de l’Algérie.
En 1987 une cité a été bâtie à Dely Brahim Alger, lots vendus à des militaires. L’objet du litige en ce 2 février 2016, un grand terrain au centre.
« Quels étaient les plans de l’urbaniste, de l’architecte ou du fonctionnaire de l’époque pour ce grand terrain ? Ils imaginaient sans doute planter des arbres, fabriquer quelques aires de jeux, installer des bancs et aménager des pistes pour que les retraités puissent jouer à la pétanque. Rien ne fut fait, on le laissa ainsi, à l’abandon. Tout comme on ne goudronna pas les petites routes qui mènent à la centaine de maisons. »
Kaouther Adimi prend le parti de nous montrer une scène quotidienne : trois jeunes enfants Jamyl, Mahdi 10 ans et Ines 11 ans, jouant au football, sous la pluie, sur ce terrain qui pour eux est le plus beau des stades. Sous l’œil bienveillant des mères et de la grand-mère d’Inès qui s’est engagée adolescente dans le FLN. Adila est une figure légendaire.
La scène décrite où les enfants se battent avec les généraux aidés d’Adila et ses coups de canne, est épique.
Elle est la mémoire de l’Histoire de son pays, elle prend des notes dans un carnet noir, qui entraîne le lecteur dans les méandres du passé qui résiste.
Se dessine ainsi de beaux portraits de femmes et d’enfants qui vont lutter contre la nouvelle injustice qui les frappe. Les généraux décident, le peuple doit s’écraser.
La révolte naîtra de la pureté des enfants qui a leur façon continueront le Printemps arabe…
Le récit peuplé d’images du quotidien des habitants de ce quartier montre combien la soif de changement est omniprésente. Mais un changement qui doit être tout à la fois majeur et radical. Car les réponses des autorités sont tellement inadaptées qu’elles sombrent dans le ridicule.
Cependant l’auteur montre que mêmes ceux qui semblent avoir le pouvoir sont eux aussi verrouillés par l’Etat policier qui étend sa toile.
Le fait que des enfants se révoltent pour un terrain vague est assez extraordinaire pour peut-être faire sauter quelques verrous.
La tension monte et les adultes réagissent en adulte sans prendre en compte cette ouverture.
J’aime qu’un auteur s’empare d’un événement et en fasse un roman qui rend accessible des pans d’Histoire, par une narration aussi érudite qu’efficace. Car cela reste gravé, mieux qu’une leçon pontifiante.
La lecture de ce livre semble comme une évidence tant la forme se prête à entraîner ses lecteurs. Phrases courtes, comme autant d’images qui défileraient sous nos yeux pour nous montrer un pays en mouvement.
« Les temps ont bien changé et seuls ceux qui le comprennent peuvent survivre. »
©Chantal Lafon-Litteratum Amor 14 décembre 2019.
Les petits de Décembre est une histoire émouvante, impressionnante, éloquente qui apprend beaucoup de choses sur la société algérienne.
Kaouther Adimi plonge son lecteur dans le quotidien de la cité du 11 Décembre 1960, à Dely Brahim, commune faisant partie de la wilaya d'Alger. le nom de ce quartier rappelle la date du début des manifestations, d'une révolte contre le colonialisme français, pour l'indépendance. Cela dura plus d'une semaine et fut, hélas durement réprimé.
Elle n'oublie pas, au passage, de nous expliquer pourquoi cette cité a été destinée à loger les familles des militaires retraités ou actifs. Elle précise aussi régulièrement les étapes souvent très douloureuses vécues par ce pays qui a conquis son indépendance au prix d'une guerre qui a laissé beaucoup de traces en France, comme là-bas.
Le 2 février 2016, tout part de la volonté de deux généraux, Athman et Saïd, de se faire construire chacun une belle villa au milieu du quartier, sur un terrain d'un hectare et demi où les enfants jouent au foot.
Inès, Jamyl et Mahdi sont les trois héros qui vont mener la révolte, mobiliser des centaines d'enfants avec l'aide d'Adila, une moudjahida qui a combattu les Français pour obtenir l'indépendance de son pays. Elle est la seule adulte suffisamment courageuse, les autres se défilant ou restant neutres…
Au travers de ce roman écrit sans concession, avec une lucidité impressionnante, j'ai beaucoup aimé tous les moments intimes de vie familiale chez les trois héros, même lorsque l'auteure nous emmène chez les généraux lorsqu'ils reçoivent Mohamed et Chérif, deux colonels à la retraite soupçonnés de soutenir les enfants.
Courageusement, Kaouther Adimi qui vit en France mais dont la famille réside en Algérie, n'hésite pas à souligner incohérences, compromissions, menaces, corruption, chantage, tous les maux qui gangrènent ce pays. Fille de militaire, elle connaît bien le milieu dont elle parle et ses privilèges.
Avec Les petits de décembre, l'auteure publie son quatrième roman, réussissant à apporter un éclairage à la fois intimiste et politique sur l'Algérie. Elle s'est appuyée sur un fait réel, ses frères ayant joué sur ce fameux terrain, comme elle nous l'a confié à Manosque, lors des Correspondances. Cela m'a beaucoup intéressé, intrigué, ému et j'ai aimé découvrir une autre facette d'un pays qui voit sa jeunesse lutter actuellement pour renverser l'ordre établi.
«Comment ça s’est passé? demanderont les jeunes du quartier qui n’étaient pas présents au moment des faits. Youcef, âgé d’une vingtaine d’années, racontera alors dans les moindres détails la matinée du mercredi 3 février 2016. C’était à nouveau un jour pluvieux, il était environ 10 heures du matin. Une grande voiture noire aux vitres teintées s’est arrêtée devant le terrain vague de la cité du 11-Décembre à Dely Brahim. La pluie tombait depuis l’aube et formait comme un grillage. Le chauffeur descendit rapidement, deux parapluies ouverts à la main, et les tendit aux occupants qui sortirent du véhicule.»
Les occupants, ce sont le général Saïd (petite taille, avec une moustache bien taillée, portant des lunettes à monture carrée et aux verres fumés) et le général Athmane (immense, avec un crâne dégarni et des sourcils broussailleux, mais rasé de très près). Consultant les plans qu’ils ont amenés, ils imaginent leurs villas de luxe érigées sur ce terrain vague où les gamins jouent au football. Sauf que ces derniers – Youcef et ses copains – ne l’entendent pas de cette oreille. Ils défendent leur terrain de football, jettent des pierres et parviennent même à s’emparer du revolver du général Saïd. Les militaires, surpris et décontenancés prennent la fuite.
Mais bien entendu, ce n’est que pour revenir plus forts et bien décidés à ne pas se laisser dicter leur conduite par des gamins. Et c’est là que la plume de Kaouther Adimi fait merveille. La romancière transforme le fait divers (réel) en épopée, en ode à la liberté. Ce carré de terre devient le symbole de la résistance contre l’oppression, les prébendes, les privilèges de la caste au pouvoir, l’arbitraire qui régit le quotidien des Algériens.
Inès, Jamyl, Mahdi et les autres mènent l’insurrection, décident d’occuper le terrain et n’entendent pas renoncer à l’un des derniers espaces dont ils peuvent disposer. Les réseaux sociaux jouant leur rôle d’amplificateur, ils vont très vite gagner et notoriété et contrarier les deux hiérarques et leurs «papiers officiels».
Cette nouvelle version de la lutte du pot de terre contre le pot de fer est joyeuse autant qu’éclairante. On y découvre par exemple que face à l’innocence, voire la naïveté des jeunes, il est fort difficile de lutter. Les moyens de pression habituels qui auraient rapidement fait céder les parents sont ici inefficaces. Pourtant plainte est déposée et dans le secret des cabinets ministériels les tractations et réunions s’enchainent. À l’inverse, la première victoire des gamins va cristalliser tous les combats. Contre la dictature, contre l’oppression des femmes, contre la caste des corrompus.
On parle souvent du pouvoir prémonitoire des écrivains. En voici une formidable illustration. Alors que Kaouther Adimi mettait la dernière main à son roman, une vague de protestation enflammait l’Algérie et allait conduire à la démission de Bouteflika. Ajoutons que quelques semaines plus tard l’équipe nationale remportait la Coupe d’Afrique des nations et entrainait à nouveau le peuple dans la rue, avec à nouveau l’idée que la «vraie Algérie» ne se laisserait plus faire.
Joyeux et ironique, ce roman fait souffler un allègre vent de liberté. Irrésistible!
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Le roman débute en février 2016 à Alger où de fortes pluies sévissent, et nous amène à Dely Brahim, commune de la banlieue Ouest d'Alger où l'auteure nous présente la cité du 11 décembre 1960 qui existe depuis 1987 et dont les lots ont été vendus à des militaires. Un plan de cette Cité est présenté au début de l'ouvrage. Au milieu du lotissement, un terrain d'un hectare et demi est resté inoccupé. Il y a un peu moins de vingt ans, "un groupe d'enfants entreprit de le nettoyer, de bricoler des buts de fortune, de délimiter des zones et créer ainsi un terrain de football."
Depuis, sur ce terrain, resté terrain vague, des milliers de parties de foot ont été disputées par les enfants, les jeunes de la Cité et des environs. En ce 2 février 2016, comme souvent, trois enfants, une fille Inès et deux garçons Jamyl et Mahdi bravent la pluie et font une partie dans la boue.
Voilà que le lendemain, à 10 h, se présentent sur le terrain, escortés par leur chauffeur descendu précipitamment de la voiture avec deux parapluies, les généraux Saïd et Athmane, tous deux dans les soixante-dix ans, des plans à la main. L'ancienne moudjahida Adila qui a combattu les Français, les armes à la main et a continué à militer pendant les années de terrorisme s'approche d'eux. Ils lui déclarent qu'ils viennent voir "leur terrain" sur lequel ils vont construire leur villa et que les travaux débuteront dans quelques mois, la parcelle leur appartenant.
C'est sans compter sur l'innocence, la détermination, la conviction et la certitude qu'ont les enfants de leur bon droit. Nos trois jeunes amis footballeurs dont le domaine va être confisqué vont s'organiser et se mettre à récupérer et à stocker de la nourriture et à en parler aux autres enfants. En cachette et à l'insu des adultes, ils vont organiser la résistance. Et le vendredi 25 mars 2016, commencera alors la révolte des petits de décembre.
Ce que leurs parents, trop timorés et résignés, n'ont pas eu le courage de faire, les jeunes, eux, vont oser ; ils vont se révolter, s'insurger et refuser d'obéir. Ils veulent faire renoncer les généraux, pour qu'ils abandonnent leur projet immobilier.
Cette rébellion, Kaouther Adimi nous la fait vivre comme un conte dans lequel les généraux se ridiculisent, les militaires sont des lâches et les enfants des héros et où les femmes et les filles sont bien mises en avant. Mais, en fait, elle nous fait vivre et comprendre la violence du régime algérien, sa corruption, ses dysfonctionnements, les difficultés du système à se réformer après cette décennie noire et le combat contre les islamistes. L'auteure nous fait revivre de façon originale et fort instructive tout un pan de l'histoire algérienne depuis l'Indépendance, dans le carnet intime d'Adila.
Les petits de décembre est un roman qui sous une forme de légèreté dans l'écriture raconte la société algérienne des années 80 à nos jours, et se révèle d'une immense force. Il nous plonge dans une Algérie toujours corrompue où les abus de pouvoir et les brimades sont toujours de mise. Il nous permet de comprendre les enjeux politiques des révoltes actuelles. Et, avec cette révolte des enfants contre l'injustice, inspirée de faits réels, naît l'espoir d'une génération qui saurait réussir à s'affranchir de la peur et construire un avenir meilleur.
J'avais beaucoup apprécié Nos richesses (Renaudot des lycéens 2017) et j'ai été conquise par Les petits de décembre que je recommande chaleureusement.
Chronique à retrouver sur : http://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
au début un peu descriptif, le roman devient passionnant au fur et à mesure que l'on entre dans la réalité de l'Algérie, de maintenant, celle qui vient de se révolter depuis quelques mois. Les "petits de décembre" ont dû être dans la rue en février ! Les personnages sont dépeints avec humour, et l'on s'attache et on s'inquiète pour ses enfants qui ont envie d'autre chose… à lire
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