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«En se penchant un peu en arrière, il voyait, derrière le dos de Solange, la jeune femme qui était assise à côté d'elle ; adossée dans son fauteuil, elle écoutait, bouche entrouverte et les yeux clos. Elle n'était pas jolie, mais Costals la désirait : 1>o parce qu'il trouvait convenable que, dans la même minute où il caressait pour la première fois une jeune personne, il en désirât une autre ; 2>o parce que, donnant l'apparence du sommeil, il était impossible qu'elle ne levât pas en lui la pensée d'abuser de ce sommeil ; 3>o parce qu'il lui semblait que, pour éprouver une telle extase d'un phénomène aussi insipide que cette musique, il fallait qu'elle fût détraquée ; or, il n'aimait que les filles saines et simples, comme Solange, c'est pourquoi cela lui était agréable d'avoir envie d'une femme détraquée.»
[...] C’est ici que Montherlant, toujours prompt à s’immiscer dans les actions et les mensonges de ses personnages, jette tout ce qu’il a à dire des hommes et des femmes. Au résultat, aucun des deux n’échappe à son œil connaisseur.
Sûr de son talent, il s’amuse, il taquine : quel écrivain barbant aurait pu consacrer une œuvre sur les jeunes filles et leurs relations sans ennuyer le lecteur ? Montherlant l’a fait, et avec brio. Au détour, il règle quelques détails avec ses détracteurs : le roman est-il un genre périmé ?
Si la vision du couple est négative, l’autre apparaissant comme une entrave à l’épanouissement, elle comporte certaines vérités sur le « chimérisme féminin ». Montherlant l’oublié, la victime d’une injustice littéraire, dissèque les comportements sociaux, le préjugés, les goûts, le rapport à l’autre sexe, à la famille, à l’amour. Des succédanés se font passer pour des dépeceurs de mœurs, mais lui, il n’a pas d’égal.
L'article entier (sur les 4 tomes) sur mon blog :
http://www.bibliolingus.fr/les-jeunes-filles-1-4-henry-de-montherlant-a80136606
Ah, Les Jeunes Filles... ! Je garde un délicieux souvenir de cynisme provocateur à la lecture de ce roman dans lequel Montherlant faisait une analyse jubilatoire de la psychologie féminine.
Costals, écrivain parisien libertin, cynique, désabusé et séducteur est l’objet d’adoration des jeunes filles qui, comme de juste, rêvent de trouver le grand amour et de convoler en justes noces.
Malheureusement pour elles, elles trouvent en la personne de Costals un homme totalement allergique à l’idée même d’amour et de mariage, qui joue avec leurs sentiments avec un cynisme redoutable.
Montherlant décortique avec brio et beaucoup de justesse psychologique la complexité des sentiments qui agitent les protagonistes de l’amour à la pitié en passant par l’amitié et pose la question de la possibilité de l’amitié dans les rapports hommes-femmes… On n’est pas loin de Bridget Jones !
En 1977, Jean Piat prêta brillamment ses traits à Pierre Costals dans une interprétation teintée d'ironie désabusée.
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