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Irène Némirovsky, morte à Auschwitz en 1942, est l'auteur d'une oeuvre étonnante qui fait d'elle un des plus grands écrivains de l'entre-deux-guerres. À la croisée des cultures juive, française et slave, cette romancière ne cesse de surprendre par sa modernité. Comme la plupart de ses romans, Les Chiens et les Loups (1940) n'est pas étranger à son histoire personnelle. La douleur de l'exil (issue de la haute bourgeoisie, Irène Némirovsky fuit Kiev et la révolution d'Octobre avec sa famille avant de trouver refuge en France), le poids de la société et la fatalité du destin sont au centre de ce roman qui évoque l'amour insensé de deux jeunes gens, Ada, une artiste révoltée, et Harry, un riche banquier, les deux facettes d'une même personne. Tragiquement attirés l'un vers l'autre, rien ne peut les réunir, si ce n'est le sentiment de leur propre perte. Empreint de mélancolie, Les Chiens et les Loups est un texte bouleversant sur l'enfance et l'innocence perdues, un chef-d'oeuvre de la littérature, à découvrir ou à redécouvrir.
Dans la ville ukrainienne aux trois étages sociaux, Israël Sinner, veuf, avait dû accueillir sa belle-sœur et ses enfants, Lilla et Ben dans la maison où il vivait avec sa fille Ada. Une présence féminine était plutôt bienvenue pour l’entretien de la maison et l’éducation de sa fille qui n’aurait plus à suivre son père lorsqu’il exerçait ses activités commerciales. Dans le dédale des rues qu’ils arpentaient tous les deux, Ada avait appris à reconnaître les signes extérieurs qui différenciaient les habitants.
Au moment d’un pogrom dans ce quartier juif du ghetto où la famille résidait, les trois enfants, apeurés s’enfuirent vers la partie haute de Kiev et franchirent le pas de la porte des Sinner, leurs cousins, le pan bourgeois de la famille. Là elle vit un garçon vêtu « d’un costume de tussor crème et un grand col de lingerie » dont la ressemblance avec Ben était frappante. C’était Harry. Foudroyée par un sentiment d’une grande intensité, l’histoire voulut que l’exil en France lui permette de le rencontrer à nouveau.
Dans l’écriture d'Irène Némirovsky, apparaît une sincérité qui traduit sans aucun doute le vécu. La pauvreté s’oppose à la richesse comme l’altruisme s’oppose à l’égoïsme. A travers l’histoire de ces deux familles apparentées, campées par les personnages d’enfants victimes de leur statut respectif, elle dépeint d’une façon magistrale l’antisémitisme à Kiev, l’exil vers un monde meilleur et les tristes désillusions.
Cela se passait au début du 20ème siècle ; je rédige ce commentaire un siècle plus tard, et je constate, nonobstant l’histoire d’amour fou qui fait lien dans cette sorte de saga familiale , que certains sujets sont hélas pérpétuels.
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