Il n'est pas trop tard pour les découvrir... ou les offrir !
Laurent Kropst est en maths sup à LLG, Louis-le-Grand pour les intimes. Interne, il doute qu'il existe un monde en dehors des colles et des blagues vaseuses de ses petits camarades. Pire, au-delà du dixième au classement général de maths et de physique, il ne connaît plus personne. En somme, la vie va son petit train-train de classes préparatoires ; jusqu'au jour où Kropst prend une tôle monumentale en mathématiques. Pour lui, c'est la fin du monde : l'opprobre, le discrédit, et surtout la relégation dans un obscur lycée de banlieue à la fin de l'année. Il découvre alors qu'on peut changer son destin avec quelques mots et beaucoup de mauvaise foi.
Dans la foulée, il rencontre les filles du lycée, des élèves d'hypokhâgne, souriantes, épanouies, brillantes, elles lui font découvrir l'autre moitié du monde, ou peut-être faudrait-il dire, la face cachée de la lune. Lui qui ne jurait que polynômes de Bernoulli et lemme de Zorn se met à lire Proust et à causer Baudelaire et Platon à la cantine, entouré de toute une troupe de littéraires plus fantasques les uns que les autres. Il réalise que ce n'est pas seulement en s'échinant sur des théorèmes ou en suant des algorithmes qu'on parvient à ses fins ; l'ascenseur social emprunte bien d'autres voies, plus malhonnêtes peut-être, mais aussi plus rapides. Quand on n'est pas issu du sérail, il faut parfois être prêt à tout.
Dans un style alerte et ironique, Emmanuel Arnaud nous livre ici un tableau générationnel, mais aussi une plongée comique dans les méandres du raisonnement mathématique : son roman est une ode à l'intuition, qui réconcilie la science et la littérature.
C'est un roman assez étonnant, fort bien écrit, presque un huis clos dans les murs de Louis Le Grand, original dans le fond et la forme qui montre la jeunesse de notre future élite. Attention, parfois, ça peut faire peur, de mépris envers les plus petits, d'arrangements entre amis, de retournements de vestes : enfin, finalement rien de plus que ce que l'on voit tous les jours de la part de nos dirigeants adultes ! Oui, oui, Rastignac est bien réel et multiple. C'est un roman qui véhicule, par l'intermédiaire de ses héros, les principes décrits plus haut que je déteste et que je n'aimerais pas que mes enfants adoptent. Néanmoins, ce livre m'a retenu parce que justement, l'auteur en parle bien, ausculte et analyse les comportements des uns et des autres. Ses héros ne me sont pas sympathiques, ils sont même à l'opposé de moi, mais ils ont un côté pathétique : leur vie est toute tracée, déjà définie ; il m'est même venu l'image de certains d'entre eux, plus vieux et responsables politiques ou autres, personnes respectées au passé et au présent pourtant pas vraiment glorieux, coincés dans leur vie confortable de notables avec impossibilité d'en sortir sans une volonté hors du commun. Finalement, je les plains lorsque eux me méprisent.
Laurent Kropst fait le lien entre le livre et les maths dans ce roman qui "est une ode à l'intuition, qui réconcilie la science et la littérature" (4ème de couverture) et qui mérite d'être découvert. 135 pages pour tenter de comprendre comment sont formés nos futurs patrons, chefs d'entreprises, hommes politiques, ... Personnellement, l'ambition, les moyens pour arriver à des fins prometteuses, l'absence de scrupules, etc, etc me font froid dans le dos et me dégoûtent : tous les ingrédients sont là, réunis, pour se faire peur mais sans hémoglobine ou suspense. Ça peut même être mieux qu'un thriller.
Je ne connaissais pas ce livre et vais m'empresser de réparer cette erreur.
En effet le sujet m'interpelle car j'ai un fils qui suit une classe prépa. Il dit préférer la Physique aux maths et se réjouit de n' avoir que 12 heures. La table du salon est envahie presque tous les soirs, très tard, par sa bande de colleurs avec lesquels il réfléchit aux questions de cours de la journée. Certains rêvent de classes étoilées d'autres aspirent simplement à maintenir le rythme démentiel de travail.
Forte de cette expérience vécue en temps réel, je m'empresse de lire dans la foulée "Le théorème de Kropst" et vous ferai part de mes commentaires et éventuellement de ce que j'ai compris du théorème ...
Passé par les grandes écoles, Emmanuel Arnaud connaît les codes du monde qu’il dépeint. Il relate avec distance et tendresse son opacité - et « l’humour prépa ».
Il rend touchante cette parenthèse désenchantée que sont les années de prépa et analyse avec justesse et précision les sentiments contradictoires qui naissent au cours de cette période. L’éveil de la conscience du jeune Kropst et sa découverte de l’intuition - sa chance -, disséqués, sont fascinants ; sa confiance en lui nait et se développe au fil des pages, si bien que le lecteur en oublierait presque que la toile de fond de ce roman n’est que mathématiques.
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