"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Un soir d'été 1958, Thomas Blaine est tué dans un accident de voiture mais son destin ne s'arrête pas à cette mort banale. Son esprit, miraculeusement sauvegardé, va revivre dans un corps d'emprunt. Lorsqu'il reprend conscience, près d'un siècle et demi s'est écoulé. En l'an 2110, plus rien n'existe de ce qu'il avait aimé et connu, mais la science a tenu les promesses de la religion et l'on peut devenir immortel par contrat.
Grand amateur des nouvelles de Robert Sheckley et de son immense talent pour mêler SF, humour noir et réflexion métaphysique, je savais que j’allais retrouver dans "Le Temps Meurtrier" (dont le titre anglais, plus évocateur, est "Immortality Inc.") tous les ingrédients qui me plaisent tant chez cet auteur.
Mais comme souvent avec les spécialistes de textes courts et de nouvelles, je me demandais si son idée de base (un homme meurt "accidentellement" en 1958, se réveille 150 ans plus tard dans le corps d’un autre et découvre un monde aussi inquiétant que grotesque) allait tenir sur la longueur. Autant le préciser tout de suite, c’est le cas ici !
Le héros se retrouve plongé au cœur d’une machination dont il peine à comprendre les enjeux, et les péripéties se multiplient sur fond de questionnement sur l’Au-Delà, la Mort et l’Immortalité. En effet, le futur du "Temps Meurtier" permet aux individus d’accéder scientifiquement à l’Immortalité (enfin, attention, rien n’est jamais aussi simple chez Sheckley...) et le corps est devenu une marchandise. Le génie de Robert Sheckley, c’est de plonger son héros insignifiant de 1958 dans un univers futuriste qui le dépasse non seulement parce qu’il est "un homme préhistorique", comme on le met en garde, mais surtout parce l’Humanité, incapable de convertir le progrès scientifique en satisfaction collective, en a fait une calamité.
"La première réaction de Blaine fut la pitié. L’Au-delà scientifique n’avait pas vraiment libéré l’homme de la crainte de la mort, comme elle aurait dû le faire. Au contraire, elle avait intensifié ses incertitudes et stimulé son esprit de rivalité.
Doté de la certitude d’une vie future, l’homme avait encore voulu l’améliorer pour jouir d’un meilleur paradis que son prochain. L’égalité, c’était très bien, mais l’initiative individuelle passait d’abord. Un nivellement parfait et insipide n’était pas une idée plus digeste dans l’Au-delà que sur Terre".
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