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Texte polémique écrit pour une conférence donnée aux États-Unis en 1993 à l'Université de Princeton qui dénonce les dégâts qu'opéra sur des générations d'architectes la vision réductrice de l'habitat que conceptualisa Le Corbusier dans les années 30 (habiter, travailler, se divertir et circuler)
En 1993, Roland Castro, architecte, est invité à la prestigieuse Université de Princeton pour donner une conférence sur Le Corbusier. Évoquant le grand artiste qu'il était, le conférencier prend alors un biais assez peu usité à savoir que la vision de Le Corbusier, tirée de sa théorie : "habiter, travailler, se divertir et circuler", a donné naissance à tous les grands ensembles des cités françaises devenus totalement invivables, car niant l'individu au profit du groupe et de l'uniformisation. Le succès ne fut pas forcément au rendez-vous, car critiquer l'oeuvre de Le Corbusier est assez rare.
Ce livre regroupe cette conférence précédée de remarques sur le thème et de l'explication de la mise en parallèle de l'architecture avec la psychanalyse. Là où Le Corbusier pense globalité, rationalisation et habitat pour tous, ce qui sera un progrès indéniable pour beaucoup de personnes quittant des logements insalubres, Lacan et Freud pensent individus. Et Roland Castro de repenser l'architecture pour l'individu.
Je résume naturellement, peut-être même assez caricaturalement, le mieux est de se faire sa propre opinion en lisant ce court essai impertinent. Personnellement, comme beaucoup, j'ai trouvé, en visitant la Cité Radieuse de Rezé (près de Nantes) que les appartements étaient clairs, grands et accueillants. Puis, au hasard de mes lectures, de reportages vus ou entendus, j'ai appris que Le Corbusier avait eu plusieurs projets, heureusement non menés à terme, comme par exemple le Plan Voisin, qui consistait à raser une partie de Paris pour y ériger des tours identiques, y dessiner des routes droites, parfaitement perpendiculaires. Et ma perception du génial architecte en a pris un coup. S'il a fait de belles réalisations, sa théorie que Roland Castro rapproche des théories totalitaires, m'a refroidi.
L'essai est très intéressant, j'aime beaucoup le parallèle entre l'architecture et la psychanalyse, qui oblige les professionnels à repenser leur manière de construire, d'envisager la ville et qui nous permet nous aussi, habitants, citadins de regarder la ville différemment. Roland Castro tente de redonner de la vie à l'architecture, aux villes, en prônant des bâtiments uniques, qui s'intègrent parfaitement dans leur milieu. Si je devais retenir une phrase de ce livre, ce serait sans nul doute, la suivante : "J'ai toujours rêvé que l'architecture devienne littéraire."
Nouvellement créées, les éditions du Canoë sortent ici un essai passionnant et iconoclaste. Tout pour plaire.
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