Un douloureux passage à l'âge adulte, entre sensibilité et horreur...
Que savons-nous de nos " proches " ? Lorsque Olga, malade, coupe brusquement toute communication avec son entourage, ne parle plus, ne regarde plus, ce sont ces filles qui ouvrent les yeux - sur ce qui les sépare. Dans cette famille en apparence si unie, chacune des quatre soeurs a, en effet, sa propre vision de la mort et sa propre vision de la mère. Les voilà renvoyées à leur enfance, et confrontées à cette vérité : personne n'a eu la même mère. Parce que Olga, silencieuse, les yeux fermés, est en train de s'effacer, chaque fille découvre sur " le clan ", un clan étrangement matriarcal, ce qu'elle ne savait pas ou n'avait pas voulu savoir - petits secrets qui recomposent peu à peu le puzzle géant dont aucune, jusque-là, n'avait détenu toutes les pièces.
"De nos 'proches', que savons-nous ? On est dans sa famille comme au casino : autour de la table, chacun n'a reçu qu'une poignée de cartes et ignore le jeu des autres" (p. 290).
C'est presque sur ces mots que se termine "La voyageuse de nuit", cette femme, mère de 4 filles et épouse d'un marin absent, qui cachait bien son jeu.
Le démarrage est long, vraiment long. On ne comprend pas où l'autrice veut en venir. Cette agonie en soins palliatifs sans trash mais avec une colère froide contre notre système de fin de vie actuel ; l'histoire des parents de cette femme qui n'en finit pas de mourir ; les morceaux bricolés çà et là des 4 filles comme "Les Quatre Filles du Dr March" en version "Les Quatre filles d'Olga".
Et puis soudainement, la "partie" commence. Les cartes sont d'abord tournées face cachée sur le tapis. Cette femme si belle, forte, courageuse, joyeuse, ne serait-elle pas un monstre dévorant en huis clos ? La partie avance et les cartes se retournent, visibles de tous : les secrets de famille se nourrissent du silence, de l'absence de mots, de l'incompréhension. Mais toutes les cartes ne sont pas là, il reste celles de la pile qu'on ne verra pas. Et puis cet outsider, ce père qui se met à parler à l'une de ses filles un jour comme si de rien n'était. Un petit-fils perché qui se met à parler par email. Ces quatre filles qui se soutiennent, qui ont vécu dans un même contexte leur enfance sans avoir les mêmes règles, sans se comprendre.
La fin en métaphore / de conte détonne un peu. Mais le réel est-il dicible après tout ce qui vient d'être écrit ? Peut-être pas.
C'est une très belle lecture, au style fluide, précis, avec des expressions imagées peu communes et qui parlent d'elles-mêmes. Il n'y a pas de pathos, plutôt une sorte de courage dans l'effondrement, une pointe de colère, et la nécessité de vivre quand même, malgré les silences qui ne seront jamais levés (le propre des "fantômes et des revenants" dans les histoires familiales).
Elles sont quatre filles.
Katia, Vera, Sonia et Lisa.
Quatre filles autour d'une agonie. Leur mère, paupières hermétiquement closes par choix, se meurt lentement dans l'unité de soins palliatifs.
Autour de ces deniers instants, se cristallisent tous les souvenirs, les rancoeurs, les ratés, les secrets mal gardés, les tendresses et les silences protecteurs.
C'est une véritable introspection que nous propose l'auteure. En tant que fille, soeur et mere. En tant que femme. Comment elles se sont construites, face aux abus maternels, même les plus bienveillants. Et comment les choses anodines de l'enfance impactent à perpétuité.
Et puis la grande inconnue. Ce soi-meme face à la mort. Quand l'euthanasie est encore un sujet controversée. La part de culpabilité des proches, leur part d'abandon. de temps et d'émotions.
C'est un livre intelligent, sensible, sans concession, sans fausse pudeur. J'ai beaucoup aimé.
Livre qui aborde avec justesse et talent l'univers des soins palliatifs, la transformation des rapports entre une mère et ses filles, puis entre deux soeurs au chevet de leur mère.
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