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Romancier et poète, Yves Simon est l'auteur chez Grasset d'une oeuvre importante, notamment de : Le Voyageur magnifique (Prix des Libraires, 1988), La Dérive des sentiments (Prix Médicis 1991), Le Prochain amour (1996).
Dans un Paris où se croisent chaque jour des êtres qui s'ignorent et s'esquivent, une ville bruissante de paroles perdues, un homme prend le temps d'écouter les autres, de les confesser, de leur pardonner. Andrea - l'atypique héros qu'à choisi Yves Simon - est un jeune prêtre sans paroisse, qui roule à scooter, pratique l'art de la confession l'oreille collée au portable : se verse alors en lui, comme en un cérémonial où chaque aveu devient une « parenthèse délirante », le souffle de ses ouailles. « Je fus arpenteur d'âmes alors que tout aurait dû me conduire à en être l'archéologue » résume Andrea. Ce magnifique roman tisse ensemble les lambeaux de tous ces secrets arrachés à l'oubli, à la solitude.
Il y a Milos, le peintre d'Europe centrale, qui cicatrise à peine les blessures de l'exil et photographie son inexorable vieillissement. Il y a Luis, l'aveugle, amoureux d'une prostituée, Lena, qui n'ose pas lui avouer qu'elle hante les trottoirs de la périphérie. Il y a Ismalia, une « beurette » infirmière, qui cherche l'homme à étreindre, Ismalia « frêle parmi les frêles, luciole des cités, une éphémère ». Il y a Frédéric, le frère matérialiste d'Andrea, si différent, qui ne croit qu'à l'intimité des corps et à leur commerce.
Il y a surtout Paris, où la nuit s'enchaîne au jour, où se lève pendant le temps où nous rencontrons ces personnages une tempête de sable ocre, Paris sur Sahara, dunes bouchant le périphérique, nuages de boulevards, pollen urbain.
La voix perdue des hommes est l'un des plus beaux romans d'Yves Simon. On y retrouve son lyrisme inquiet, son goût de l'errance urbaine, une construction narrative originale en séquences façon « Short cuts » de Robert Altman, mais en rupture avec ses autres livres, il laisse apparaître ici une nostalgie de l'humanisme, une civilisation enfouie sous les sables d'un désert dans la ville.
Yves Simon est à mon avis injustement sous-estimé parmi les romanciers contemporains. Il sait pourtant mieux que quiconque raconter les solitudes des grandes métropoles, toutes ces vies qui se croisent, se cherchent, se rencontrent, font parfois un bout de chemin ensemble. Ces histoires dans la grande Histoire qui se tissent, "pour une nuit ou pour la vie". Il est aussi le peintre d'une jeunesse enfuie, d'une certaine insouciance, du temps des diabolos menthe et des Gauloises bleues... "Oui, mais il écrit toujours un peu les mêmes livres", objectera-t-on. Et si c'était cela, la marque des grands auteurs ?
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