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« La porte du voyage sans retour » est le surnom donné à l'île de Gorée, d'où sont partis des millions d'Africains au temps de la traite des Noirs. C'est dans ce qui est en 1750 une concession française qu'un jeune homme débarque, venu au Sénégal pour étudier la flore locale. Botaniste, il caresse le rêve d'établir une encyclopédie universelle du vivant, en un siècle où l'heure est aux Lumières. Lorsqu'il a vent de l'histoire d'une jeune Africaine promise à l'esclavage et qui serait parvenue à s'évader, trouvant refuge quelque part aux confins de la terre sénégalaise, son voyage et son destin basculent dans la quête obstinée de cette femme perdue qui a laissé derrière elle mille pistes et autant de légendes.
S'inspirant de la figure de Michel Adanson, naturaliste français (1727-1806), David Diop signe un roman éblouissant, évocation puissante d'un royaume où la parole est reine, odyssée bouleversante de deux êtres qui ne cessent de se rejoindre, de s'aimer et de se perdre, transmission d'un héritage d'un père à sa fille, destinataire ultime des carnets qui relatent ce voyage caché.
La porte du voyage sans retour est un épisode romancé de la vie d’Adanson, un naturaliste/botaniste du temps du Jardin du Roi donc vers 1750. Il fait partie des naturalistes partis en expédition à cette époque. Adanson est parti sur l'île de Gorée au large de Dakar au Sénégal.
Qui dit 18ème siècle et Afrique, dit pléthore de colonisateurs. Adanson ne débarque pas en grand colon en pays conquis, il veut vraiment découvrir la nature et comprendre le lieu. On en le suit pas en direct, on découvre son histoire via un récit laissé dans une malle à sa fille. Cette fille avait l'impression de connaître son père mais va découvrir via ses journaux un père bien différent que ce qu’elle imaginait et surtout elle aura enfin une explication de la distance qu'il maintenait entre eux. Pour une fois, le secret de famille est probablement plus positif que l’on ne se l’imagine. Notre naturaliste au détour des plantes va prendre conscience de tous les gens natifs qu'il côtoie. Il va se rendre compte que ce qu'on met en esclavage c'est un réel peuple avec une réelle humanité et du coup ce qu'on fait en tant que blanc c’est mal. L’auteur arrive à faire quelque chose de très nuancé. Adanson est assez novateur par rapport au blanc de base de l'époque mais en même temps il reste un homme de son époque. Il va se retrouver coincé entre ce qu’il constate et ce qui est la pensée commune de l’époque. Ce texte n'est pas dans un rejet complet de la personne, il illustre la complexité de la situation où Adanson fait ce qu'il peut avec ce qu’il a comme bagage culturel. Toutes les contradictions internes sont bien amenées. Il a une réelle ouverture d'esprit, une ouverture vers le monde qui lui permet une importante prise de conscience de la situation mais aussi de son impuissance. Il intègre toutes les ficelles liées à l'esclavagisme et prend conscience du récit d’état qui justifie l’esclavagisme. Il va au delà du mythe du sauvage et découvrant se qui se cache derrière « ces soit disant sauvages ». Il est témoin de toute la culture et de toutes les connaissances qu’a ce peuple. Il voit bien le soucis lié au fait que les comptoirs esclavagistes / les comptoirs coloniaux font tenir l'économie. Comment peut-on faire ? Les expéditions scientifiques ont besoin de financements mais à quel prix humain ? Entre besoin d’argent et de sécurité et l’existence d’un peuple qu’il aimerait mieux connaître comment choisir ? Il se rend compte à quel point ce peuple a énormément à apporter mais peut-il prendre le risque de jouer sa place dans la société en allant à contre-courant ? Est-ce qu'il peut convaincre les gens ? Qu'est-ce qui l'a amené à ce type de réflexion ? C’est vraiment un texte très équilibré, très nuancé et assez accessible.
Au milieu du XVIIIe siècle, le naturaliste Michel Andanson choisit, pour ses explorations, de se rendre dans une région d’Afrique alors encore très mal connue des Européens : le Sénégal. Il y passa cinq ans, comme modeste commis de la Compagnie des Indes, et en ramena quantité d’observations géographiques et ethnologiques, ainsi que d’importantes collections botaniques et ornithologiques. Ruiné par l’insuccès de ses publications à son retour de voyage, il élabora avec Jussieu une nouvelle méthode de classification des végétaux, et se lança dans un gigantesque projet d’encyclopédie, qui ne fut jamais publiée. Il mourut dans le dénuement, léguant à sa fille Aglaé sa passion pour les plantes et une montagne de manuscrits. Et aussi - mais là c’est l’imagination de David Diop qui prend le relais -, des carnets relatant une version beaucoup plus intime de son expérience sénégalaise.
Ressuscitant le botaniste sous les traits d’un jeune homme ouvert et curieux, que ses explorations amènent à remettre peu à peu en cause les préjugés raciaux de ses semblables, au fur et à mesure qu’il se familiarise avec la langue, les traditions et les croyances, enfin le rapport au monde des Sénégalais, l’auteur nous entraîne dans un fascinant et dépaysant récit d’aventures, bientôt tendu par le mystère d’une disparition et d’une quête. Car, nous voilà bientôt sur les traces d’une jeune Africaine, évadée aux abords de l’île de Gorée, alors que, promise à l’esclavage, elle devait, comme des millions d’autres au temps de la traite des Noirs, y franchir « la porte du voyage sans retour ». Fasciné par la légende qui s’est aussitôt emparée du destin de cette fille devenue héroïne pour les uns, gibier pour les autres, notre narrateur laisse un temps de côté la flore pour s’intéresser à cette Maram, sans se douter que les développements romanesques de cette aventure le marqueront à jamais.
Romanesque, l’histoire de Michel et de Maram l’est absolument. C’est en vérité pour n’en revêtir qu’avec plus de force une dimension résolument symbolique et éminemment poétique. Ce jeune Français, qui, animé par l’esprit des Lumières, s’avère capable de raisonner à contre-courant des préjugés de son époque pour apprendre à connaître et à respecter un autre mode de rapport au monde, et qui, pourtant, échoue, comme Orphée, à sauver Eurydice de la mort et des Enfers, et, de retour en France, s’empresse d’oublier le changement de mentalité entamé lors de son voyage pour épouser à nouveau sans réserve les plus purs principes matérialistes, illustre tristement ce que les liens entre l’Europe et l’Afrique auraient pu devenir, loin de toute relation d’assujettissement, si l’appât du gain avait cessé un temps de les dénaturer.
Finalement rattrapé par l’inanité de ses ambitions et de ses tentatives encyclopédiques de maîtriser le monde, le personnage principal prend conscience, sur le tard, de ses erreurs et de ses ambiguïtés. Trop tard, hélas, pour les victimes de l’esclavage, et pour le mal et la souffrance terriblement infligés. Mais pour mettre en mots, transmettre la mémoire, et, peut-être, espérer, un jour, un avenir plus humain entre Afrique et Occident.
À partir de l’histoire de Michel Adanson, un botaniste français né en 1727 et mort en 1806, David Diop m’a ramené sur ses terres d’Afrique dévastées des années durant par le juteux trafic d’êtres humains : l’esclavage.
Michel Adanson, passionné par les plantes rêvait de publier un chef-d’œuvre encyclopédique consacré à la botanique, son orbe universel.
S’il n’y parvint pas, c’est Aglaé, sa fille qui découvre enfin ses cahiers après avoir cherché patiemment dans tout ce que son père lui a légué après sa mort. Elle débute la lecture d’un texte passionnant qui va me tenir en haleine jusqu’au bout.
Michel Adanson, à 23 ans, quitte Paris pour l’île de Saint-Louis du Sénégal, persuadé que les habitants, là-bas, nous sont inférieurs, comme cela est incrusté dans les mentalités de l’époque. Malgré ces idées préconçues, le père d’Aglaé apprend le wolof et peut ainsi communiquer de plus en plus avec celles et ceux que l’on nomme les Nègres. C’est ainsi que, dans le village de Sor, Baba Seck, le chef, lui conte l’histoire de « la revenante » qui n’est autre que sa nièce, Maram Seck, enlevée sur le chemin de l’île Saint-Louis. Serait-elle encore vivante ? Serait-elle sur l’île de Gorée, La porte du voyage sans retour, comme on la nomme hélas très justement ?
Décidé à connaître la vérité, Michel Adanson, sans négliger ses recherches sur les plantes locales, décide de partir à la recherche de cette jeune femme. Ndiak (15 ans) l’accompagne. Estoupan de la Brüe, le Directeur générale de la Concession, donne son accord et lui attribue six hommes armés pour escorte, plus deux porteurs.
Dans cette partie de l’Afrique occidentale où la Compagnie du Roi gagne trois à quatre millions de livres grâce au commerce des esclaves, Michel Adanson découvre que les petits rois locaux favorisent cela et organisent même les razzias.
Grâce aux notes prises par le botaniste, David Diop produit un roman passionnant, une plongée dans le Sénégal de la fin du XVIIIe siècle, sa nature luxuriante, sa faune, ses villages, ses coutumes. Je me retrouve même au cœur d’une fête de mariage au cours de ce voyage au sud de Saint-Louis.
Un peu plus tard, Michel Adanson, très malade, est sauvé par une sorcière, une guérisseuse qui… je vous laisse découvrir. J’apprends toutes les vicissitudes de ces hommes issus de la noblesse française mais aussi comment sont traitées les femmes qui refusent de se soumettre au bon vouloir des chefs locaux n’hésitant pas à pactiser avec ceux qui organisent le trafic d’esclaves.
La rencontre avec Maram, l’amour fou de Michel Adanson pour cette jeune femme qui se confie à lui sont des moments très forts de ce livre. Comme elle est passionnée par les plantes, ils communiquent d’autant plus facilement.
David Diop, toujours grâce aux cahiers de Michel Adanson, me fait bien comprendre l’importance de ce rab, ce génie gardien si important pour Maram qui le matérialise avec une immense peau de serpent boa.
La fin de l’histoire est tendue, terriblement angoissante mais tellement révélatrice de l’esprit de ces Européens trafiquants d’esclaves sur cette île de Gorée de sinistre mémoire.
Comme dans Frère d’âme, une lecture qui m’avait déjà passionné, j’ai plongé complètement dans ce récit après avoir été un peu désorienté au début. Pourtant déjà, l’auteur donnait de nombreux indices précieux sur cet homme qui, jusqu’à la fin de sa vie, ne pourra jamais oublier Maram, son amour fou qu’il croira même reconnaître des années plus tard sur un tableau représentant une Négresse d’origine wolof dont le modèle venait des Antilles. Mais, pour qui vient de lire La porte du voyage sans retour, livre faisant partie de la sélection pour le Prix des Lecteurs de 2 Rives 2022, cela ne paraît pas si étonnant…
Chronique illustrée à retrouver sur : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
Une révélation frappe Michel Adanson le 26 janvier 1806, très exactement, six mois, sept jours et neuf heures avant le début de sa mort : « L’essentiel est de figurer dans la mémoire d’Aglaé (sa fille) tel qu’en lui-même, et non pas aussi immatériel qu’un fantôme de savant ». S’il a passé sa vie à décrire minutieusement près de cent mille « existences » de plantes, de coquillages, d’animaux de toutes espèces au détriment de la sienne, il parvient donc, à la fin de sa vie, non sans difficulté à achever la rédaction de ses souvenirs d’Afrique, espérant ainsi montrer à sa fille l’homme qu’il est.
Car s’il a fait ce voyage au Sénégal pour découvrir des plantes, il y a rencontré des hommes…
Après le décès de son père, ce père qu’elle a aimé mais terriblement absent, occupé par la rédaction de son « Orbe universel », son chef d’œuvre encyclopédique, Aglaé va découvrir dans ces carnets le vrai visage de son père et combien ces années de jeunesse passées au Sénégal ont été un tournant dans sa vie.
Inspiré par les vrais carnets de voyage de Michel Adanson, David Diop relate comment ce jeune botaniste, vers 1750, envoyé par l’académie royale des sciences, est parti explorer le Sénégal pour explorer la flore locale, et a découvert un peuple, une langue le Wolof qu’il a apprise, et l’horreur de l’esclavage.
À travers ce récit, l’auteur nous permet de découvrir cette période pré-coloniale où le Sénégal est partagé en plusieurs royaumes qui se font la guerre et où, pour commercer et se déplacer il faut négocier avec les rois qui sont en place. Michel Adanson bénéficiera de la présence au cours de son périple d’un jeune homme, Ndiak, véritable sésame lui permettant de déambuler à l’intérieur du Sénégal, celui-ci lui ayant été fourni par le roi du Waalo. De même, les routes ou les voies de chemin de fer sont encore inexistantes et les déplacements difficiles et risqués. Adanson s’en apercevra, au cours de la recherche de cette Africaine, Maram, poursuite, qui le mènera du Nord au Sud du pays jusqu’à l’île de Gorée. Cette île était le lieu d’embarquement des Africains captifs sur les navires négriers et connue comme « la porte du voyage sans retour ».
C’est avec beaucoup d’émotion et de plaisir que j’ai voyagé aux côtés de ce botaniste, sujet au mal de mer, accompagné de Ndiak, deux porteurs de ses malles et de six guerriers du royaume de Waloo armés, qui a préféré rallonger sa progression en passant par les terres plutôt que par la mer.
J’ai été particulièrement sensible au raisonnement de Michel Adanson et à sa démonstration de l’égalité de tous les hommes, quelle que soit leur couleur.
Quant à l’évocation du mythe d’Orphée et d’Eurydice mis en parallèle avec l’extrême violence et la terrible souffrance de Michel et Maram, ces deux êtres qui vont se rejoindre, s’aimer puis se perdre, elle est on ne peut plus adéquate à la situation.
La porte du voyage sans retour, est un roman envoûtant qui se lit comme un livre d’aventures tout en étant extrêmement riche historiquement et humainement.
Si le roman débute par l’histoire d’une transmission entre un père et sa fille, c’est également un superbe plaidoyer que David Diop livre en faveur de ceux qu’on désignait sous le terme de Nègres, selon la terminologie de l’époque, ce mot entaché d’infamie aujourd’hui, mais qu’il emploie pour rester fidèle au personnage et au contexte historique. Avec le naturaliste Adanson, nous découvrons et ne pouvons que nous indigner de découvrir ces Nègres, hommes, femmes ou enfants considérés comme des marchandises, capturés et transportés de l’autre côté de l’océan, dans d’horribles souffrances.
J’avais beaucoup apprécié le précédent roman de David Diop, Frères d’âme, prix Goncourt des Lycéens 2018 et de l’international Booker Price 2021, qui était le récit de tirailleurs sénégalais dans les tranchées durant la guerre de 14-18 et je me suis à nouveau délectée avec La porte du voyage sans retour, surnom donné à l'île de Gorée, d'où sont partis des millions d'Africains au temps de la traite des Noirs.
Chronique illustrée à retrouver sur : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
Ma chronique : C'est un enchantement de lire David Diop, dont je découvre l'élégance de l'écriture. Texte éblouissant qui entraîne le lecteur au Sénégal au XVIIIème siècle, où se pratique le commerce d'esclaves et où les rois de différentes contrées négocient avec les européens.
Diop, dans ce récit épique aux allures de fables comme les chantent les griots, nous conte la vie de Michel Adanson. Ce botaniste ayant existé n'est jamais passé à la postérité. Il veut écrire une encyclopédie comme D’Alembert et Diderot. Un voyage au Sénégal lui permet alors d'en étudier faune et flore, de collecter plantes et coquillages. Il apprend le wolof pour mieux comprendre les coutumes du pays.
Intrigué par les mystérieuses rumeurs selon lesquelles, Maram, une jeune femme vendue comme esclave par son oncle, serait revenue des Amériques, il décide de la retrouver près de l'île de Gorée, la maison aux esclaves. Durant ses péripéties il est escorté par Ndiak un fidèle compagnon.
Des années plus tard, c'est parmi un héritage de fleurs exotiques, de multiples boutures et objets originaux qu' Aglaé, la fille d' Adanson, découvre des carnets rédigés par son père, tels de vieux grimoires, bien dissimulés dans un tiroir à double fond. Il lui confesse le grand tourment qu'il a jusqu'alors caché : son amour pour Maram, l'esclave évadée. Une folie de jeunesse qui semblait sans conséquence et qui a marqué sa vie à tout jamais. Ses larmes, ses remords, ses erreurs recouvrent les pages des cahiers. Et nous, lecteurs, sommes happés par cette histoire.
Très vite il a éprouvé pour Maram une passion fulgurante, pas seulement pour sa beauté mais pour son courage face à la monstruosité des hommes.
Apparaissent dans le récit une guérisseuse effrayante couverte de peau de boa, un lion et une hyène, des chefs guerriers vendant leurs frères contre alcool et armes et des négriers trafiquants d'or et d'ivoire sans scrupules.
Et tel Orphée recherchant Eurydice, Adanson descend jusqu'en enfer afin d 'espérer retrouver sa bien-aimée.
Pourquoi ses remords? a-t-il agi ensuite contre ses convictions ?
Lecture magnifique où une fois encore on comprend que la folie des hommes n'a pas de limites.
Dans ce roman fascinant, David Diop a su mêler avec talent le romanesque à l’histoire du botaniste et naturaliste français : Michel Adanson.
Nous sommes au XVIIIe siècle, le siècle des Lumières mais aussi l’apogée de l’esclavagisme en Afrique. Le botaniste Adanson, qui place la science au-dessus des superstitions, va s’intéresser à l’histoire d’une « revenante » Maram, jeune fille enlevée à son peuple, dont on aurait retrouvé la trace dans un village reculé.
Cette quête et l’aventure romanesque qui en découle, arrivera jusqu’à Aglaé, fille du naturaliste, lorsqu’elle héritera des meubles de son père mort et découvrira ses carnets. Ce père, décrit comme un solitaire et misanthrope, obsédé par l’aboutissement de son encyclopédie universelle, se révèlera enfin aux yeux de sa fille qu’il a négligée toute sa vie.
Différent des hommes de son époque qui partent chercher en Afrique pouvoir et richesse à travers la traite des noirs, Michel Adanson veut connaitre les mœurs de ces hommes qu’il ne voit pas comme une race inférieure à celle des blancs. Lors de ses années passées au Sénégal, il apprend leur langue, le wolof et se lie d’amitié avec Ndiak, jeune prince sans avenir, qu’il initie à la botanique.
Lorsqu’il rencontre enfin la jeune femme promise à l’esclavage, le naturaliste va éprouver pour elle un amour sincère et chaste, ce qui va à l’encontre des mœurs de l’époque où les belles esclaves servent à assouvir les désirs de leurs maîtres. Michel Adanson est un humaniste qui s’émeut de la traite des noirs et de la maltraitance qui leur est infligée. Pourquoi, s’étonne-t-il, séparer les familles et les expédier aux Amériques, alors qu’il y a tant de terres à cultiver chez eux au Sénégal et que la canne à sucre y pousse tout aussi bien ? Mais le jeune français est un utopiste qui, en croyant pouvoir inverser le destin tragique de ces noirs qu’il côtoie, va compliquer leur existence.
Sa rencontre avec Maram, devenue guérisseuse, est la porte d’entrée d’un monde fantastique ou les génies, appelés rabs, ont un pouvoir sur chaque existence. Il confie à ses carnets l’histoire de Maram telle qu’elle l’a lui a racontée et l’on pénètre dans le cœur même de l’Afrique avec ses croyances, ses coutumes et sa magie. On entre aussi dans l’univers du conte avec sa symbolique fantastique lorsque Maram narre les épreuves qu’elle a dû affronter.
La force du roman, c’est de nous raconter une histoire à travers le récit de ses personnages. Tout d’abord celui de Michel Adanson par le truchement de ses carnets, puis celui transmis par Maram et, en épilogue, le témoignage d’une esclave noire, Madeleine, laquelle refuse les cadeaux de cet Adanson qui voit en elle la réincarnation de son amour perdu.
Ce roman, à l’écriture fluide et subtile, joue l’équilibre entre roman historique et conte fantastique et j’ai aimé me perdre entre ces deux univers.
Connaissez-vous Michel Adanson ? Non ? Alors cela tombe bien puisque David Diop met en lumière ce naturaliste français du XVIIIème siècle. Cet homme a voyagé et exploré des contrées peu connues des européens à l'époque comme le Sénégal.
C'est justement sur cette partie de sa vie au Sénégal que David Diop s'attarde dans ce roman. La fille de Michel Adanson, Aglaé, découvre au sein d'un meuble légué par son père après son décès un carnet racontant son voyage au Sénégal. J'en profite au passage pour signaler qu'il ne s'agit aucunement d'une biographie mais bien d'un morceau romancé de la vie de cet homme. Il y a donc un fond de vrai dans la mesure où l'homme ainsi que le voyage au Sénégal ont bien existé mais cela s'arrête là, le reste sort de l'imagination fertile de l'auteur.
J'ai particulièrement apprécié ce roman à l'écriture très soignée. Les thèmes évoqués dans ce roman sont forts, l'auteur explore ainsi les relations entre une fille et son père, la colonisation, l'esclavage et le commerce d'êtres humains ou encore les traditions africaines. Autant de thèmes abordés de manière fine et intelligente par l'écrivain. La construction à tiroirs de ce récit est bien exploitée.
Je me suis rapidement attaché aux personnages. Michel, sa fille Aglaé, Ndiak, Maram, leur histoire est vraiment touchante et marquante. Ce roman ne laisse clairement pas insensible et la magnifique plume de David Diop vient donner une grande force aux protagonistes, mais également aux différentes descriptions qui jalonnent le roman.
J'ai trouvé le rythme agréable et quasiment sans longueur (chose rare et appréciable). Je suis rentré très rapidement dans l'histoire et je suis resté accroché jusqu'au dernier mot. L'auteur a un vrai talent de conteur et c'est à souligner ! J'ai voyagé et j'ai appris beaucoup de choses, je regrette un peu que le côté lié au travail de naturaliste de Michel Adanson ne soit pas plus développé.
David Diop signe ici un roman d'aventure très agréable à découvrir. la plume est belle, les thèmes abordés sont forts et le lecteur n'aura pas de mal à s'attacher aux différents protagonistes de ce récit. Une belle découverte qui donne envie de découvrir les autres romans de l'auteur !
Ma note : 4,5/5
Un des romans de la rentrée des plus captivant entre aventures, amours, histoires, Histoire… Un mélange savoureux que j’apprécie beaucoup.
Michel Adanson, célèbre naturaliste du XVIIIème siècle (que j’affectionne particulièrement) se meurt avec la douce présence de sa fille Aglaé et revoit sa période sénégalaise, la plus belle chose qui lui soit arrivée, grâce à Maram, prénom chéri qu’il n’a pas oublié « Il l’avait répété sans trêve, jusqu’à la fin. Maram ». Aglaé retrouve les carnets de son père « Pour Aglaé, ma fille bien-aimée », écrits pour qu’elle connaisse mieux son père toujours absent... et me voici partie pour une belle découverte littéraire
Adanson part explorer, à sa demande, le Sénégal. Il aimerait tant écrire SON encyclopédie, entrer à l’Académie… Oui, mais voilà, il ne sait pas faire de ronds de jambe, c’est très fâcheux.
Ce départ, il l’attend avec impatience ; découvrir de nouvelles plantes, enrichir son encyclopédie, son savoir, rapporter des plantes inconnues… Il y reste cinq années. « J’ai quitté Paris pour l’île Saint-Louis du Sénégal à l’âge de vingt-trois ans...Je voulais me faire un nom dans la science botanique. »
En partant là-bas, il découvre une civilisation, une langue, qui le transportent. « J'ai fait ce voyage pour découvrir des plantes et j'y ai rencontré des hommes ». Il s’intègre, apprend le Wolof, une langue si douce pour lui, vit comme eux, au point de continuer certaines postures alors qu’il est revenu en France depuis longtemps. « J’ai pris conscience de nos différentes visions du monde, sans pour autant y trouver matière à les mépriser. S’il avait voulu se donner la peine de connaître véritablement les Africains, plus d’un voyageur européen en Afrique aurait dû faire comme moi. J’ai tout simplement appris une de leurs langues. Et dès que j’ai su assez le wolof pour le comprendre sans hésitation, j’ai eu le sentiment de découvrir peu à peu un paysage magnifique »
Il raconte l’histoire de son séjour africain et, surtout, Maram qu’il aimât d’un amour pur et immense ; Comment cette jeune fille fut vendue à des blancs, pour une simple question d’orgueil bafoué. Son oncle l’a vendue contre un fusil !
Adanson est allé jusqu’à la Porte du voyage sans retour (île de Gorée), d’où partent les bateaux emplis d’esclaves pour retrouver la trace de Maram. Ce faisant, il parle des coutumes, des plantes, de sa vie africaine.
Un livre foisonnant d’une écriture qui m’enchante, fine, ciselée. Oui, l’auteur a maintenu le mot « nègre » et je trouve que c’est un très bon choix, car c’est le mot qui en usage à cette époque
Aglaé, sa fille, habite Balaine, un château près de Moulins, à Villeneuve sur Allier pour être précise (c’est vers chez moi!) et se prend de passion pour le jardin qu’elle crée de toute pièce avec les plants ramenés, entre autre par son père. Un jardin encore magnifique actuellement, surtout au printemps. Il se visite toute l’année.
Ce livre m’a transportée, un beau coup de cœur.
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