"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
La nuit de Maritzburg En 1893, une entreprise indienne propose à Mohandas Karamchand Gandhi, tout jeune avocat, de se rendre en Afrique du Sud pour y défendre ses intérêts. Gandhi accepte. Il ne le sait pas encore, mais c'est le tournant de sa vie. Il découvre l'apartheid, l'humiliation, et se lance dans un combat acharné contre la discrimination dont sont victimes ses compatriotes indiens. C'est là qu'il expérimentera pour la première fois une arme redoutable : la résistance passive. Jour après jour, le petit avocat timide et si british, va se métamorphoser jusqu'à devenir le Mahatma, la Grande Âme. C'est aussi sur cette terre de violences qu'il rencontre Hermann Kallenbach, un architecte juif allemand, avec lequel s'instaure une relation hors du commun. Une intimité précieuse, intense, forte comme une passion, digne d'un amour... vrai.
Ce livre m’a tendu ses pages car je ne suis pas très au fait de ce qui s’est passé à Maritzburg et faire plus ample connaissance avec le Gandhi d’Afrique du Sud m’attire. Et très certainement que tout a commencé à Maritzburg.
La force de ce roman – est-ce une biographie ? – est de donner la parole à Hermann Kallenbach, architecte allemand d’origine juive. Il dirige un cabinet fleurissant et prospère. Epicurien, il rencontre le jeune Gandhi en 1904, dans un restaurant végétarien. Habitué au luxe, aimant la belle vie, les belles voitures, les beaux costumes, dont certaines des réalisations sont au patrimoine de Johannesburg, il succombe à ce bel esprit et à ses idées.
J’ai découvert un homme dur, très dur avec lui-même et les siens. On pourrait même dire qu’il est d’une dureté effroyable avec ses certitudes, avec ses enfants, son épouse. Il est convaincu de détenir la vérité en tout. Même en médecine, il est sûr de ses convictions et risque la vie de son fils en refusant les traitements. D’aucuns disent qu’il est responsable de la mort de son épouse Kastürbā qui mourut d’une bronchite parce qu’il rejeta l’injection de pénicilline qui aurait combattu l’infection. « Si j’avais permis la pénicilline, dira- t-il après la crémation, cela ne l’aurait pas sauvée. Et elle s’est éteinte sur mes genoux. Est-ce que cela pouvait être mieux ? »(1)
J’ai appris qu’il avait une grande admiration pour Léon Tolstoï – qu’à l’occasion je vais relire – qui lui a inspiré certains préceptes de non-violence et pour David Thoreau que j’ai relu l’été dernier.
Ce que je dis du Gandhi de Sinoué
Ce livre, je l’ai lu avec passion lorsque nous étions en Jordanie. J’ai aussi appris sa tentative de correspondance avec Adolf Hitler- adressées à « mon ami »- en vue de persuader le dictateur de l’Allemagne de la valeur de la non-violence. Ni la première lettre datée du 23 juillet 1939, ni la seconde du 24 décembre 1940, n’ont atteint son destinataire en raison d’une intervention par le gouvernement britannique (2). Sans aucun doute, il s’opposait au nazisme, farouchement. « Si je vous appelle ami, ce n’est pas du formalisme. Je n’ai pas d’ennemis. Depuis 33 ans l’œuvre de ma vie a été de m’assurer l’amitié de toute l’humanité, sans distinction de race, de couleur ou de croyance ». On peut se prendre à rêver de ce qu’il serait arrivé si le dictateur avait reçu ces missives. Un vaste sujet d’uchronie..(4)
Gandhi fut un homme providentiel, malgré ce caractère narcissique et tyrannique, il est admirable. J’ai eu grand plaisir à lire Sinoué et découvrir la part d’ombre de Gandhi. J’ai aussi beaucoup aimé faire la connaissance de l’attachant Hermann et suivre ses interrogations et ses errements. La jeune cousine Sonia qui sera secrétaire de Gandhi est très pertinente, j’ai eu aussi une grande envie de la connaitre.
Je ne sors pas indemne de cette lecture. Beaucoup de pistes de réflexions s’offrent à moi. https://www.plkdenoetique.com/la-nuit-de-maritzburg-de-gilbert-sinoue/
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