Des idées de lecture pas comme les autres !
Maria Luisa est une femme, belle, intelligente, au caractère fort qui doit néanmoins se débattre depuis toujours contre sa condition. Elle est retornada, née dans une ex-colonie portugaise, et en surpoids. Si son histoire peut être cachée, son poids, lui, n'en finit pas de l'encombrer et de marquer la distance entre elle et les autres. Elle est comme prisonnière d'elle-même, son corps formate ses relations professionnelles, amicales et amoureuses. Depuis son adolescence, elle subit la tête haute.
Son grand amour, passionnel et charnel, se mourra de honte et de conformisme. Sans larmoiement, ni victimisation, la narratrice dénonce le mépris et le manque de tolérance de la société tout en dévoilant les mécanismes de défense, l'humour étant l'un d'eux. Un roman bouleversant, d'une grande sensualité, à l'écriture incisive, crue et puissante.
Des idées de lecture pas comme les autres !
La grosse, c'est Maria Louisa. Personnage principal de ce roman, elle nous expose à travers ces lignes sa vie, ses ressentis, ses expériences. Victime du regard des autres et de leurs remarques, elle se livre ici et nous raconte le peu de considération et le conformisme des personnes qui l'entourent : sa mère, toute en retenue, son père, bon vivant, Tony, sa meilleure amie séductrice, David, son amour de toujours...
Pleine de complexes, elle impose tant bien que mal ses idées et décrit ses états d'âme avec beaucoup d'humour. Elle nous offre ainsi une vision de la vie, du couple, de l'amitié, de l'amour en général, tout en pudeur et sensualité. Elle nous expose ce corps qui la fait souffrir mais lui donne également beaucoup de plaisir.
C'est un roman résolument optimiste, sur l'acceptation de soi et la liberté d'être soi.
Contrairement à ce que peut laisser supposer le titre, le surpoids n'est pas omniprésent, il est en arrière-plan de chaque situation, tapis dans l'ombre, en filigrane.
C'est une très belle lecture, douce et pleine de sensibilité, sur une femme complexe et touchante.
« La Grosse », livre intensément personnel, sans pathos, ni grincements de dent, est une bouffée d’oxygène. L’exemplarité du libre-arbitre. La force des combats et un roman puissamment optimiste, salvateur et bienfaisant.
Maria Luisa conte sa vie entre les éclaircies et les orages. Une jeune femme dont le poids diminue de 250 g chaque jour, grâce à une gastrectomie.
L’histoire n’est pas ici. Pas sur une balance dont les aiguilles chutent. Mais dans le plein d’une vigueur, d’une ténacité. Car oui, Maria Louisa va se battre. Contre la noria d’oiseaux noirs. Son corps se transforme. Elle fond. Mais ne cède rien à l’avant.
L’adolescente soumise à l’amie qui belle et voluptueuse, enserre Maria Louisa dans ses griffes. Une relation sensuelle, ambiguë. Elle lui lave son petit linge dans la rivière glacée. Lui met de la crème sur le corps. Elle exécute ses ordres au fronton d’un désir de reconnaissance de la part de Tony, qui sera tout au long de cette longue amitié intéressée, toxique et malsaine.
Maria Louisa est vive, intelligente, furieusement libre et affirmée. Mais elles ploie sous des complexes et se bat contre eux. Son corps est une armure, une ingratitude. Une jeune femme éblouie par les pleins phares d’une existence. Entre la grâce parentale, la mère qui décline vers l’autre rive et le choc des cultures. Sa famille migrante, le Mozambique inoubliable. La colonisation a laissé des stigmates. On aime la fusion volcanique. Ses expériences d’amour avec les garçons. Sans aucun tabou et la marée-basse qui autorise les gestuelles. Elle est exclusive dans cette beauté de quête de tendresse. Elle qui aimera David. Le corps assoiffé de souffle charnel, dans ce magnétisme des caresses complices.
« On dirait un cactus tendre et sans épines, cet autel devant lequel j’ai cessé de prier quand j’ai perdu mon cœur. L’honneur des bons garçons exige le respect des engagements. Je pouvais vivre sans prendre de bain, sans baisers, mais pas sans écriture. La compréhension est un châtiment ».
Maria Louisa est brillante, divinement spirituelle et vive.On ressent à sa place, tant la trame est liante, ce qu’un corps élimine d’erreurs et d’expériences floutées. Elle est dans l’engagement des tracés mêmes de sa vie.
« J’ai vendu ma maison de l’Alentejo et j’ai demandé mon transfert vers Almada. Il fallait revenir m’occuper de maman, restée seule, qui avait besoin de soins et compagnie. Mon retour à la maison, à Almada, plaisait bien à maman, qui pouvait de cette façon contrôler plus facilement mes heures d’entrée de de sortie, mes coups de téléphone et l’état général de ma peau et de mes cheveux ».
« Je suis sûre que je serai heureuse si j’étais libre ». Maria Louisa va pousser les murs. Contraindre sa déception amoureuse à son émancipation intérieure. Elle veut faire un enfant, seule. Mais ne peut garder en son ventre l’enfant, qui à chaque fois, chute dans l’abîme. Qu’importe les larmes, les douleurs, les néants et les finitudes. Elle redresse son buste, elle l’intellectuelle et la vaillante. Altière et maîtresse-femme, elle écrit. Elle dévore à pleine dent la littérature. Souveraine et la tristesse douce. Le Portugal pour macrocosme, les diktats d’un pays très misogyne encore, elle fait de la mélancolie, un levier. De ses doutes, une force et d’une rupture amoureuse, un contre-poids.
Elle dévore la vie. Somme l’ubiquité au départ. Sa métamorphose est éminente et magnétique.
« Je viens de balayer la cuisine et je vois par terre, près du balai, une aigrette de pissenlit, je la prends sans l’abîmer et je souffle ».
Elle fait tomber à ses pieds sa robe nocturne. Elle fera de l’aimé, l’horizon en advenir. Ce roman amplement autobiographique, est un hymne de confiance et de concorde pour celui ou celle qui lira ce livre. Témoin d’ une génération de femmes absolument remarquables dans une société engluée de conformisme. La maturité d’un livre audacieux, élégant, poignant et sincère. Deuxième roman d’une autrice dont le premier roman : Carnet de mémoires coloniales a obtenu le Prix des lecteurs – Littératures européennes de Cognac en 2022. Lire Isabela Figueiredo, c’est tomber amoureux (se) d’un style, d’une histoire de vie qui nous fait une sacrée accolade. C’est un livre qui ouvre et donne la réponse. Pénétrer une à une les pièces de la maison de ce livre, les décors comme les chapitres, et la résurgence d’une vie.
Traduit du portugais par João Viegas. Publié par les majeures Éditions Chandeigne.
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