A Téhéran, dans les années 1980, une petite fille de six ans, contrainte de porter le voile, se révolte en se dénudant. Se soumettre aux exigences des « barbus » et autres « corbeaux » lui paraît absurde. Son père l'approuve et, afin de fuir brimades et contraintes, la famille va s'exiler à Paris. Abnousse Shalmani découvre alors que la liberté n'est pas celle qu'elle aurait souhaitée. Sa révolte n'est donc pas finie. Mais cette fois, c'est la littérature française qui va lui fournir des armes. La petite fille, devenue femme, va faire de Sade, de Victor Hugo et de Colette (entre autres) des appuis précieux dans son combat contre l'oppression en général et celle du corps féminin en particulier.Joyeux pamphlet, ce récit alterne les anecdotes intimes et les événements socio-politiques avec humour et enthousiasme.
Une découverte accidentelle, surprenante et totalement dans l'air du temps.
Mi Janvier, au sortir du traumatisme des attentats qui ont frappés Paris ce mois de Janvier 2015 (pour ceux qui liraient cet avis à contretemps), je prends, un peu par hasard, cet ouvrage en visitant la bibliothèque de mon Comité d'Entreprise.
Bien qu'il ait été publié il y a quelques mois (Avril ou Mai si j'en crois ce que j'ai pu voir sur internet) il fait remarquablement écho à la période que nous avions traversé ces derniers jours.
L'exergue remettait en mémoire un extrait de "la Philosophie dans le Boudoir" du Marquis de Sade qui nous exhorte à rire de tout, y compris des Religions si nous ne voulons pas qu' "elles reprennent le sérieux qui les rends importantes". On verra plus tard l'importance que Sade, présent dans le titre, a eu pour le développement de la pensée de l'auteure.
Elle nous raconte son enfance Iranienne, dans une famille de la haute bourgeoisie intellectuelle, peu après la révolution de 1979. Elle décrit ses révoltes enfantines contre l'enfermement réel et symbolique qui lui est imposé en tant que fille. A postériori, on tremble pour sa famille, et on se demande comment ils ont réussi à passer au travers sans plus de dommages.
Quelques années plus tard, la famille fuit le pays pour la France, et là le récit prend de l'ampleur sur 3 axes distincts mais entremélés:
Les bouleversements de la vie familiale, confrontée à la difficile condition d'exilé. Les liens familiaux traditionnels qui se distendent voire se rompent, les difficultés à s'adapter au nouveau contexte, les Parents déstabilisés par la perte des repères.
L'ivresse d'une intelligence qui peut prendre son envol dans le commerce quotidien des livres et sous le patronage affectueux de son père.
A l'inverse la tension toujours présente de constater la présence, et la pression de plus en plus forte, en France même, des forces rétrogrades qu'elle pensait avoir laissé derrière elle par l'exil. Le(s) rôle(s) dans lequel certains veulent l'enfermer et la prédéterminer, et qui correspondent rarement à ses convictions et à ses complexités propres.
L'auteure développe de manière intéressante comment elle a trouvé des armes pour son combat dans la fréquentation des libertins du XVIII ème siècle, et en particulier du Divin Marquis, même si on peut ne pas partager tout son enthousiasme. Elle tend à faire de Sade un défenseur des droits des femmes, ce qui se retrouve dans certains de ses écrits, peut être moins dans certains éléments de sa biographie. Elle m'a en tout cas donné envie de rouvrir mon anthologie des romans libertins, et de relire "Thérèse Philosophe".
Livre polémique et militant, "Khomeiny, Sade et moi" ne prend pas de gants avec certains thèmes d'actualité, et prône un rejet de tout relativisme culturel. Elle démontre, si il en était besoin, l'indivisibilité de la liberté d'expression et la méfiance que doit causer toute tentative de la limiter même pour des raisons apparemment recevables.
En tout cas, un très bon moment de lecture.
Merci Madame.
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