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Une famille de pêcheurs dont le père disparaît en mer, un couple de gens modestes que la mort vient séparer, un homme seul qui abandonne maison, papiers d'identité et biens matériels pour vivre en vagabond sous les étoiles... Trois poèmes narratifs.
Trois destins aux prises avec la vie. Trois histoires simples pour dire la fierté du peuple grec. Ce ne sont pas les héros des batailles homériques que chante Katerina Apostolopoulou dans ce premier recueil écrit en deux langues, le grec et le français, mais le courage des êtres qui placent l'hospitalité et la liberté au-dessus de tout, qui se battent avec les armes de l'amour et de la dignité, qui ont peu mais donnent tout. À l'heure de la crise économique et du concept de décroissance, une voix venue de Grèce nous invite à voir Sisyphe heureux.
Ce recueil de poèmes est une double offrande. Katerina Apostolopoulou écrit en grec sur les pages de gauche et en français sur les pages de droite. Ce n’est pas une traduction : c’est une création décuplée, généreuse, libre.
On croise dans ces petites lignes des petites vies : une famille de pêcheurs, un vieux couple, un homme simple et solitaire. Dans ses trois poèmes narratifs, Katerina nous incite à voir le bonheur, malgré la mort ou la pauvreté. À le voir, à y croire.
Comme cette femme qui retourne en mer avec ses enfants quarante jours après la mort par noyade de son mari :
“Toute seule avec les rames
Plus forte que jamais
Plus pâle que jamais
Amour et rage dans les yeux
Les lèvres bien serrées”
Comme Manolis et Maria, en couple depuis cinquante ans :
“Cinquante années qui ressemblaient
À une grande journée d’été
Douce et longue
Bien remplie à ras bord”
Comme cet homme qui vit loin du monde et près des étoiles depuis la disparition de sa bien-aimée :
“Petit à petit
Il s’est transformé en vague
Qui traversait la ville le jour
Mouillait tous les quartiers de ses bonjours
Et de son regard frais
Et puis le soir
Se retirait”
Comme Sisyphe, qu’il faut imaginer heureux selon Albert Camus, malgré son gros rocher à pousser pour l’éternité.
Avec ces quelques récits d’une sensibilité inouïe, avec si peu de mots, mais avec toute la fierté d’un peuple, Katerina Apostolopoulou nous le montre, Sisyphe. Courageux, digne et heureux.
Le titre de ce recueil de trois histoires résonne comme une réponse à Albert Camus qui voulait croire que Sisyphe pouvait trouver le bonheur dans l’accomplissement absurde de sa tâche. Chez Katerina Apostolopoulou, ça se passe chez Maria et Manolis, Leur vie est rude, pauvre mais, tous les matins, ils empruntent le même chemin, comme Sisyphe qui escalade sans répit sa montagne. « Savoir que toute la vie sera ainsi/ Et en sourire » Une vie de pauvreté n’empêche pas d’être heureux et c’est avec des mots dont la simplicité fait la beauté que l’auteure nous conte cette histoire de petits riens qui font un monde.
Chacune des trois histoires abordent la mort et le deuil, mais sans misérabilisme. Comme cette famille d’un pêcheur disparu en mer alors qu’il croulait sous les dettes. A force d’acharnement, ils vont se relever en poursuivant le métier du père.
Dans la dernière, une jeune fille raconte l’histoire de Fotis qui avait tout abandonné pour devenir « l’ermite de la colline » après la mort prématurée de sa femme. Il était « l’homme qui écoutait l’âme de la vie » On le respectait, on le nourrissait et on l’écoutait.
Au-delà de la mort, ces trois récits parlent de vies simples et dignes, emplies d’amour et de générosité.
La langue pour conter ces destins use de la même simplicité qui la rend si poétique et universelle. Les phrases délicates sont des broderies à petits points pour des vies minuscules où l’on n’a pas besoin de grands exploits pour vivre libre, heureux, solidaires et dignes.
Le recueil donne à voir le texte dans les deux langues : grecque et française, et cette alternance d’écriture est le reflet de Katerina Apostolopoulou qui écrit dans les deux langues.
Un beau texte qui s’adresse aux adolescents mais qu’on peut déguster à tout âge.
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