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L'histoire de Karl-Axel, anti-héros et narrateur de ce roman, qui d'employé terne et maussade devient un parasite, un maquereau et un clochard et finit par tuer l'enfant de la femme qui l'a recueilli, est celle d'une longue déchéance, ou, peut-être, celle de la fuite vers un état embryonnaire, prénatal. Car s'il refuse de donner à sa femme, Clem, l'enfant qu'elle lui demande et s'il se révolte avec fureur contre toute procréation, c'est qu'il porte en lui un enfant avorté. Son enfance morte, avec ses frayeurs, ses jeux pas toujours innocents, ses blagues stupides, ses rondes et rengaines, colle à lui comme de la glu, s'insinue dans sa pensée, déforme son langage. Mais sur ses pensées, moins embryonnaires qu'on ne pourrait le penser, flottent le relent d'une religiosité également avortée, les fades odeurs de textes sacrés et de cantiques rabâchés, en un lancinant sentiment d'insuffisance et de péché ; et, c'est le plus grave, le manque d'amour. Quel obscur mysticisme pourrait se cacher à l'autre bout de cette nuit ? Mêlant le langage enfantin, les plaisanteries de potaches aux raisonnements théologiques, les rondes aux cantiques, les image de la Bible aux jeux de mots érotiques et poisseux, Gyllensten «mime» la pensée, le vide et le désespoir de son personnage avec une virtuosité étourdissante, avec un art subtil et insidieux.
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