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Parce qu'il nous parle d'une époque qui nous est plus familière (1981-2022) et que son auteur, né en 1949, a accumulé une expérience considérable de journaliste politique, le dernier volet de la trilogie consacrée à la Ve République, « Tragédie française » est certainement le plus réussi et le plus touchant.
Comme dans ces opus précédents, Franz-Olivier Giesbert mêle faits politiques, anecdotes intimes sur les puissants et digressions personnelles souvent poignantes, notamment sur sa mère.
Dans une écriture enlevée truffée de formules savoureuses et de mots qui obligent à avoir un dictionnaire près de soi (quelques exemples : patafar, mirliflore, fourrier, barnabite, vérbigération, componction, subclaquant, coquebin, harpailler, ramentevoir, nonchaloir, coquecigrue), ce récit d'une France qui s'enfonce dans le déclin fait le portrait des cinq présidents de la République qui se sont succédé durant les quarante dernières années.
Si ces croquis sont souvent vachards pour les politiques qui, selon lui, ont participé à « l'affaissement économique », au « délitement sociétal », à la « crise de la volonté politique », ils sont aussi empreints d'une certaine tendresse pour les hommes qui ont incarné le pouvoir. Seul le chef de l'État actuel échappe à sa complaisance
François Mitterrand fut victime d'un péché d'orgueil pensant qu'il pouvait table rase du passé. Le résultat est qu'il se heurta aux réalités économiques. FOG ne cache pas sa responsabilité dans la montée du FN. Pestiféré durant le premier septennat, il finit « par tout lui pardonner » parce qu'il incarnait l'esprit français.
Jacques Chirac, celui qui ne s'aime pas, presque attendrissant avec ses blessures .
Nicolas Sarkozy pour lequel FOG a ressenti une véritable haine avant de partager avec lui une forme de complicité liée à leurs amours malheureuses.
François Hollande auquel il reconnaît un certain savoir-faire en matière de politique étrangère.
Emmanuel Macron sur lequel les qualificatifs bien tranchés pleuvent : « prince de l'évitement », « président Narcisse », « tempérament égocrate », « court-termiste », « destructuré », « discontinu ».
Dans l'entourage de ceux qui ont décroché le Graal, d'autres personnalités sont soit dézinguées, soit encensées.
Du côté des premiers, on trouve :
Pierre Bérégovoy : « à force d'être suffisant, il avait fini par se croire nécessaire » écrit l'auteur à son propos. « Affairiste de poche » poursuit-il.
Laurent Fabius : « il exsude un mélange d'ennui et de suffisance intestinale » ; « il pense pauvre et parle plat ».
Édouard Balladur, le traître.
Lionel Jospin avec sa « moraline plein la bouche » et qui a agi en couard au moment de l'affaire du port du voile à Creil en 1989.
Martine Aubry, une femme « rongée par la haine » et une « girouette qui se prend pour le vent ».
Bernard Kouchner : « professionnel du Bon Cœur » qui dénigrait ses collègues « avec une méchanceté de satrape » dont le surnom « Bernard-Koutecher-au-Gabon » laisse entendre un appât du gain certain.
Du côté des seconds : Hubert Védrine, Erik Orsenna, Régis Debray...
Au-delà des politiques, FOG dresse le panthéon personnel de ses admirations – Claude Perdriel, patron du « Nouvel Obs », Robert Hersant, celui du Figaro, François Pinault, propriétaire du « Point » - et de ses amitiés dont l'une des plus étonnantes fut celle qu'il entretint avec Pierre Mauroy qui fut un authentique défenseur de l'intérêt général.
Quoi qu'on pense du regard de l'auteur, force est de constater qu'il constitue un témoignage important sur les quatre décennies qui viennent de s'écouler.
Et même si la situation est grave selon le journaliste, l'espoir demeure.
https://papivore.net/litterature-francophone/critique-histoire-intime-de-la-ve-republique-tome-3-tragedie-francaise-franz-olivier-giesbert-gallimard/
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