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Dans un texte rédigé en 1939 et publié à titre posthume, le journaliste allemand Sebastian Haffner fait une chronique saisissante de ses expériences personnelles pendant l'époque de l'instauration du nazisme. D'une clarté et d'une autorité exemplaires, son récit rend palpables, donc compréhensibles, les circonstances de l'avènement du régime hitlérien. A cet égard, c'est un ouvrage dont la lecture, en plus de l'intérêt littéraire qui la justifie, est indispensable à la connaissance de notre temps.
Enfin un livre qui raconte la montée du nazisme, vécue de l'intérieur. Comment, par petite touche, par grande avancées et petits reculs, les libertés ont disparus, la chape de plomb est tombé sur un pays avec les conséquences que l'on sait. Très intéressant.
La question obsède: pourquoi une terre qui a donné naissance à Beethoven et Goethe a-t-elle pu laisser perpétrer le plus grand massacre de tous les temps? le témoignage de Sebastian Haffner, un allemand presque moyen, nous éclaire et le plus simple est de citer les passages qui selon moi, résument le mieux son explication du phénomène nazi.
Page 79: "Rathenau et Hitler sont les deux phénomènes qui ont le plus excité l'imagination des masses allemandes, le premier par son immense culture, le second par son immense vulgarité. (…) Le premier venait de cette sphère de quintessence spirituelle où fusionnent les civilisations de trois millénaires et de deux continents, l'autre d'une jungle située bien en dessous du niveau de la littérature la plus obscène, d'une enfer d'où montent les démons engendrés par les remugles mêlés des arrières boutiques, des asiles de nuit, des latrines et des cours de prison. Tous deux étaient, grâce à l'au-delà dont ils émanaient, et indépendamment de leur politique, de véritables thaumaturges.
Page 110: "J'ai déjà mentionné en passant que l'aptitude de mon peuple à la vie privée et au bonheur individuel est plus faible que celle des autres peuples".
Page 136: "la plupart des gens qui acclamèrent Hitler en 1930 au Sportpalast auraient proclament évité de lui demander du feu dans la rue. Mais déjà se montrait un phénomène étrange: la fascination qu'exerce précisément, dans son excès même, la lie la plus écoeurante".
Page 190: "La cruauté elle-même peut avoir une ombre de grandeur quand elle s'affiche avec la grandiloquence d'une détermination suprême, quand ceux qui l'exercent revendiquent fougueusement leurs actes comme ce fut le cas lors de la révolution française et des guerres civiles russes et espagnoles. Les nazis, en revanche, n'ont jamais affiché autre chose que le rictus blême, lâche et craintif du meurtrier niant ses rimes".
Page 202: "On avait cru en Saint-Marx, il n'avait pas secouru ses fidèles. Saint-Hitler était manifestement plus puissant. (…) Apprenons à prier "c'est la faute aux juifs" au lieu de "c'est la faute au capitalisme".
Page 419: "pour commencer par le plus vital de ces centres, la camaraderie annihile le sentiment de responsabilité personnelle, qu'elle soit civique, ou, plus grave encore, religieuse".
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