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Après un premier recueil, publié en Algérie en 2003, Habiba Djahnine revient à la poésie en femme apaisée, combative et lucide. Dans ce livre écrit directement en français, ce n'est pas la guerre civile qui est évoquée mais le temps d'après la guerre, le corps sorti des décombres de l'histoire, l'amour retrouvé, dans un monde voué à la reconstruction des autres et de soi. « J'éloignerai la guerre et l'identité / Je construirai les fragments de la maison », écrit-elle. Et d'ajouter, quand l'exil devient voyage : « Tu m'attends sur l'autre versant de mon crépuscule ». D'Alger la belle aux sables du désert, Habiba Djahnine écrit de la poésie comme on construit une maison : avec ses nerfs, avec ses rêves, pour refuser « l'alphabet de la peur », le regard constamment rivé à la ligne d'horizon.
J’ai rencontré Habiba Djahnine à Sète, lors du festival de poésie « Voix vives » dont elle était l’une des nombreux invités. D’emblée, j’ai été conquise par sa vitalité et je me suis laissée emportée par le vent chaud de sa poésie.
« A chaque corps sa mémoire »
Habiba Djahnine va chercher les mots au plus profond de sa mémoire. Ces mots assemblés, liés, font corps sur les ruines de la guerre. Vient le temps de la reconstruction.
C’est aussi l’histoire d’une confiance à reconstruire lorsque tout a été bafoué.
Mais comment aborder le passé ? Dans quelle langue s’adresser à la rue ? Elle interroge, décrypte et elle écrit le poème « car la poésie est le seul langage possible » celui qui saura apaiser la douleur d’une guerre insidieuse.
La poétesse doit retrouver les bribes du passé, que l’amnésie collective recouvre.
« Proche des murs de la maison
Tout près des silences nocturnes
J’entrevois en fragments
Les histoires des miens. »
Elle doit faire face à la peur.
« La peur.
Cette chose insondable, irrationnelle, fugace, poignante ! »
L’amour est très présent. Comment aimer à nouveau lorsqu’on n’a « appris qu’à mourir », car l’amour a cette faculté de panser les plaies et tenir la souffrance à distance.
Face à la mer, elle se dit « étrangère dans sa ville, étrangère dans sa vie ». Il faut pourtant éloigner l’oubli, mais comment ?
Ces éclats de vie sont traversés par les fantômes, ceux des ancêtres qui luttent contre l’oubli.
Dans "Autres conversations avec les fantômes », sourde une certaine violence entre doutes et affirmations.
L’écriture est limpide, et on se laisse aller à ce déploiement existentiel où la mémoire cueille des souvenirs sensibles.
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