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Au delà du siècle qui les sépare, on a coutume de renvoyer Marx et Foucault à deux programmes de recherche fondamentalement différents, qui informent encore aujourd'hui des stratégies politiques distinctes, voir incompatibles. À Marx, « découvreur » de l'exploitation capitaliste, théoricien des structures et philosophe de la totalité, aurait répondu Foucault, penseur des singularités, de la société disciplinaire et des micro-pouvoirs. Le premier reste intimement lié au mouvement ouvrier, tandis que le second a profondément influencé, à partir des années 1970, ce qu'on a appelé les « nouveaux mouvement sociaux », les luttes contre les oppressions spécifiques et la pensée postcoloniale.
Tout juste trente ans après la mort de Foucault et alors qu'on observe un regain d'intérêt éditorial et universitaire pour Marx, ce livre cherche à dépasser la simple confrontation pour faire communiquer ces deux figures de la pensée critique que réunissent leurs efforts constants, et féconds, pour comprendre la société moderne dans une perspective émancipatrice.
Plus exactement s'agit-il, sans abandonner les catégories marxistes, de prendre au sérieux le défi posé par Foucault, lequel a révélé - et mis en chantier - certains « impensés » du marxisme.
Spécialiste de la pensée de Marx et lecteur avisé de Foucault, Jacques Bidet interroge les concepts de « gouvernemantalité » et de « discipline » en relation avec la société de classe décrite par Marx. Il soumet la compréhension structurelle du capitalisme chez Marx aux travaux de Foucault sur le néolibéralisme comme pratique de gouvernement et souligne, plutôt qu'un « tournant » libéral, la continuité dans la pensée de celui-ci. En décryptant attentivement plusieurs textes majeurs de l'auteur de Surveiller et punir sans perdre de vue la référence constante - quoique souvent tacite - chez ce dernier à l'auteur du Capital, Bidet porte un regard neuf sur l'héritage foucaldien. Si Marx a brillamment mis à jour les mécanismes de l'exploitation capitaliste et les formes du pouvoir-propriétaire, Foucault apparaît quant à lui comme le penseur de « l'autre pôle » de la domination capitaliste : celui du savoir-pouvoir des « dirigeants-compétents » qui produisent des discours de vérité. Alors que le premier a mis en lumière les mécanismes du « marché », c'est cette autre médiation du rapport moderne de classe que le second donne à voir : « l'organisation ».
S'il note les contradictions et les désaccords entre les deux auteurs, Jacques Bidet n'en relève pas moins leurs affinités. Dans sa perspective, Foucault n'est pas le pourfendeur d'un marxisme vieilli et réductionniste, mais au contraire celui par lequel il devient possible de « remettre en mouvement l'héritage de Marx ». Car sur le terrain des luttes pour l'émancipation et des résistances au pouvoir, Foucault croise Marx. Reste à penser une configuration théorique à même de les convoquer ensemble « pour une analyse du temps présent ». Tel est le programme ouvert par Bidet dans cet ouvrage.
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