Des livres incontournables pour un immense plaisir littéraire
À la fin des années trente, parce qu'elle est tombée sous le charme d'un romancier d'origine juive, Eugenia, une jeune et brillante étudiante roumaine, prend soudain conscience de la vague de haine antisémite qui se répand dans son pays. Peu à peu, la société entière semble frappée par cette gangrène morale, y compris certains membres de sa propre famille. Comment résister, lutter, témoigner, quand tout le monde autour de soi semble hypnotisé par la tentation de la barbarie ?
Avec pour toile de fond l'ascension du fascisme européen, ce roman foisonnant revient sur un épisode méconnu de la Seconde Guerre mondiale, l'effroyable pogrom de Jassy. Portrait d'une femme libre, animée par le besoin insatiable de comprendre l'origine du mal, ce livre est aussi une mise en garde contre le retour des heures les plus sombres de l'Histoire.
Des livres incontournables pour un immense plaisir littéraire
Eugenia Radulescu est une jeune et brillante étudiante roumaine. En mars 1935, à l’occasion d’un événement organisé par l’une de ses professeurs, elle fait la connaissance de l’écrivain et dramaturge Mihail Sebastian. Celui-ci, d’origine juive, est violemment pris à parti et blessé par une bande d’étudiants antisémites. Seule l’intervention de la professeure et d’Eugenia les empêche d’aller plus loin.
Quelques années plus tard Eugenia est étudiante à Bucarest et sa route croise à nouveau celle de Mihail Sebastian. Plutôt entreprenante, la jeune femme devient sa maîtresse et en parallèle journaliste pour une agence de presse roumaine. Mais en ces année troubles où la guerre menace Eugenia se voit vite rattrapée par l’histoire.
Elle sera ainsi le témoin horrifié du pogrom de Jassy, sa ville natale, en juin 1941 qui fera 13 265 morts dont 43 femmes et 180 enfants. Mais elle sera aussi confrontée à l’antisémitisme de son frère, membre de la Garde de fer et à l’aveuglement de ses parents. Elle devra faire face à la violence terrible de certains à l’encontre des juifs puis à l’indifférence de la population quant à leur sort voire à une volonté farouche de nier ce qui s’est passé ou d’en accuser les victimes.
Préoccupée par le sort de Mihail, Eugenia n’en cherchera pas moins à combattre tous les a priori, à lutter pour la liberté et à comprendre les sources du mal, quitte à se mettre en danger.
Ce livre est un magnifique portrait de femme sur un fond historique très documenté. Lionel Duroy mêle faits historiques, personnages réels et fictifs dans une fresque passionnante.
Pour ma part, ce roman m’a déjà permis de me remettre à niveau en ce qui concerne l’histoire de la Roumanie au cours de la seconde guerre mondiale, coincée entre Hitler et Staline. J’ignorais tout du pogrom de Jassy qui suit de quelques mois celui perpétré à Bucarest et qui fit d’innombrables victimes, mortes dans des conditions terrifiantes. Une partie de la population civile de la ville a d’ailleurs participé à ce pogrom qui décima un dixième de la population de la ville.
Ce roman m’a aussi permis de faire connaissance avec Mihail Sebastian, auteur roumain devenu un classique et qui trouva la mort en 1945, renversé par un camion.
Ce livre est particulièrement intéressant pour tous les sujets qui sont autant d’interrogations dans l’esprit d’Eugenia. Comment son frère et elle-même, élevés par les mêmes parents peuvent-ils être aussi différents dans leur mode de pensée ? Comment peut-on en arriver à haïr autant un peuple au point de souhaiter sa disparition voire de participer à son assassinat ? Comment un pays peut-il se laisser aveugler par les discours de ses dirigeants et les croire sans discernement ? La démarche d’Eugenia est assez originale car plus que la parole des victimes, elle cherche à recueillir celle des bourreaux pour comprendre les mécanismes de la haine et de la violence. Je ne suis pas sûre que le livre nous donne les réponses mais, à travers Eugenia, il nous amène à nous pencher sur nos propres sentiments et nos modes de pensée.
https://ffloladilettante.wordpress.com/2018/07/01/eugenia-de-lionel-duroy/
Pas d'autofiction dans ce roman de Lionel Duroy mais une plongée très bien documentée dans la Roumanie des années 1930/1945. A partir du personnage fictif d'Eugenia, jeune étudiante à Jassy puis journaliste à Bucarest, à laquelle il prête une relation amoureuse avec l'écrivain juif Mihail Sebastian, l'auteur décortique la montée explosive du racisme antisémite. Mihail Sebastian était dans les années 1930 un intellectuel reconnu qui fréquentait toute l'intelligentsia roumaine. En citant de nombreux passages, Lionel Duroy s'appuie sur son journal intime. Il écrit en quelque sorte le livre qu'aurait écrit Sebastian s'il n'avait pas été éliminé dès la fin de la guerre. Duroy s'est également inspiré du roman Kaputt de Malaparte. Il note le comportement ambigu de ce dernier qui était sur place, correspondant du Corriera della Sera, comme celui de bon nombre d'intellectuels roumains de l'entourage de Sebastian.
A travers la famille d'Eugenia on voit progressivement le racisme quotidien, banal des Roumains chrétiens envers les Juifs se transformer en une haine implacable qui conduit au pogrom de Jassy en juin 1941 faisant plus de 13.000 morts en 2 jours. Les assassins n'étaient pas seulement des militaires ou des membres de la légion fasciste roumaine de la Garde de Fer mais des citoyens ordinaires, souvent des voisins. On a du mal à comprendre comment la Roumanie, grande amie de la France, admiratrice de Clemenceau a pu en arriver à un tel niveau de haine, sa peur du bolchevisme ne pouvant totalement expliquer son allégeance au Nazisme.
Ce roman peut sans doute nous expliquer en partie la montée des nationalismes et l'attitude actuelle face à l'immigration des pays de l'Europe de l'Est.
Un superbe roman. A lire pour plusieurs raison, l'écriture romanesque est très belle, du moins la traduction est excellente.Les personnages sont fort subtils et attachants. Ils ont suffisamment de complexité sans complications inutiles. Et surtout ils se situent dans une Roumanie des années 30 qui va basculer dans un fascisme glaçant, et qui à le lire maintenant donne plus qu'envie de se réveiller et se méfier a minima des mouvements populistes et racistes. C'est de plus une mine de renseignements sur l'Histoire de la Roumanie et sur cette plaie de l'humanité qu'est l'anti sémitisme.
L'héroîne prinicipale Eugénia, et d'autant plus intéressante qu'elle a grandi dans une famille banale de commerçants roumains anti sémites comme on respire... Et qu'elle va évoluer , changer son point de vue mais aussi connaître l'amour et devenir une jeune femme très courageuse.
Un roman très bien mené et passionnant.
À La fin de la Première Guerre mondiale la Bessarabie, la Transylvanie (hongroise depuis 1867 au sein de la monarchie austro-hongroise), la Bucovine et une partie du Banat votent leur rattachement à la Grande Roumanie, officiellement neutre. En 1938, le roi Carol II instaure une dictature. Il fait tirer sur les fascistes de la Garde de fer, juger et exécuter leur chef Codreanu. Au début de la Seconde Guerre mondiale ce roi anglophile, qui combat également les communistes, fait garantir les frontières du royaume par le Royaume-Uni et la France.
Allié ensuite avec Staline par le pacte germano-soviétique de 1939, Hitler considère la Roumanie, à juste titre, comme une puissance hostile. À l'été 1940, après l'effondrement de la France, Hitler contraint Carol II à céder la Bessarabie et la Bucovine du Nord à l'URSS, la Transylvanie du Nord à la Hongrie. Par la suite, Hitler et la Garde de fer renversent le roi et le remplacent par le maréchal Antonescu ; la Garde de fer qui organise des attentats, et s'en prend aux Juifs et aux Tsiganes ; Antonescu qui engage, lors de l'opération Barbarossa (en juin 41), la Roumanie aux côtés de l'Allemagne dans l'offensive contre l'URSS.
Un contexte historique complexe, dans lequel Lionel Duroy imagine une histoire d'amour entre Eugenia, une journaliste roumaine, et l'écrivain juif roumain Mihail Sebastian. Eugenia a été élevée dans la haine des juifs — considérés par les Roumains comme des profiteurs à éradiquer — mais son amour pour Mihail la sensibilise à leur sort. Traumatisée par l'épouvantable pogrom de Jassy en 41, la jeune femme, après avoir cherché à comprendre l'origine du mal auprès des bourreaux, entre pendant la guerre dans la Résistance pour les combattre...
...Alors que son ami Mihail est sans espoir : « Nous mourons si mal, nous autres ! écrit-il dans Depuis deux mille ans. Les siècles de mort que nous avons traversés ne nous ont même pas appris si peu de chose. Nous vivons mal, mais nous mourons encore plus mal, dans le désespoir, dans la bataille. Nous manquons notre dernière chance de paix, notre unique chance de salut. Triste mort juive de gens qui, n'ayant pas vécu parmi les arbres et les bêtes, n'ont pas pu apprendre la beauté de l'indifférence dans la mort, sa dignité végétale. »
Mêlant habilement fiction romanesque et réalité historique, un récit fluide et puissant sur l'engagement, les racines du mal, les nationalismes et l'antisémitisme, mais aussi, évoquant Malaparte, Cioran, Micea Eliade, Mihail Sebastian, sur le rôle des journalistes et des écrivains dans l'interprétation des événements dont ils sont les témoins. Avec ce sujet plus que jamais d'actualité — au regard de la résurgence des partis populistes dans le monde occidental — Lionel Duroy signe ici sans doute un de ses meilleurs romans.
Un récit de la 2nde guerre mondiale, vue de la Roumanie, à travers l'expérience d'une jeune femme, aux idée très libres pour son époque.
Eugenia est une jeune étudiante à l'aube de la guerre. Aux travers de 2 rencontres, avec une professeur de littérature et un écrivain juif dont elle tombe amoureuse, elle ouvre soudain les yeux sur la banalité de l'antisémitisme qui règne dans son entourage, et dans toute la population roumaine.
Ce roman raconte, de manière très subtile, un engrenage terrifiant, qui va mener à une sorte de cauchemar où des atrocités sont commises sans que finalement personne ne s'en émeuve réellement.
On y retrouve la pâte de Lionel Duroy, sa douceur, la grande sensibilité de ses personnages, et a recherche du détail, avec une sorte d'impartialité où finalement personne n'est jugé.
Je ne connaissais pas cet auteur mais je n'ai pas boudé mon plaisir tout au long de ce roman. Cette fresque romanesque et historique est bouleversante. Servie par une écriture ciselée et fluide, cette saga mêle avec émotion et intelligence la fiction avec le personnage d'Eugénia et l'Histoire, la grande puisque cela se passe en Roumanie avant et pendant la guerre de 1939- 45.
L'histoire est captivante et j'ai beaucoup appris sur cette période troublée;
EUGENIA.
Etudiante, Jana vit à Jassy, petite ville au centre de la Moldavie roumaine, au sein d’une famille commerçante. Elle partage son quotidien avec ses deux frères, Stefan et Andreï et un père, très optimiste et une mère timorée et en permanence inquiète. Une famille « normale », aimante, mais qui semble avoir développé, comme la plupart des roumains en 1930, un sentiment de rejet des juifs installés dans leur pays et à qui la Roumanie avait donné la nationalité roumaine en 1919. On leur reprochait d’être soit trop riches, soit trop pauvres.
Une vision féminine, juste, intelligente et émouvante qui vous questionne sans cesse sur les comportements de haine développés contre les juifs. A lire et à reprendre afin de toujours rester en éveil...........Livre passionnant.
Mihail Sebastian, né Iosif Hechter, est mort le 29 mai 1945, à 38 ans. Andrei apprend la triste nouvelle à Jana (Eugenia), sa sœur, qui a tant aimé cet écrivain célèbre pour ses pièces de théâtre.
Lionel Duroy lance ainsi un roman qui m’a absorbé du début à la fin, tant il regorge de sensibilité, d’émotion et de vérité puisque, si son héroïne est fictive, tous les événements qu’elle affronte sont authentiques. C’est elle qui raconte avec passion, tendresse et précision.
Eugenia est une plongée dans les années noires, des années trente à la seconde guerre mondiale en Roumanie. Au travers de l’amour de cette jeune fille pour un grand écrivain, c’est toute la montée du fascisme en Europe qui ressort, avec pour objectif l’élimination, l’extermination des juifs pendant que l’armée roumaine participe au siège de Stalingrad.
Dans le pays, les juifs sont « soit immensément riches… soit misérables ». Ceux qui ont réussi le doivent curieusement à une mesure discriminatoire car il leur est interdit de posséder la terre… En 1919, sous la pression de la France, les juifs avaient pu enfin devenir officiellement roumains mais, pour beaucoup, « ils ne seraient jamais de véritables roumains. »
1935 : Madame Costinas, professeure de littérature, recommande à ses élèves dont fait partie Eugenia Rădulescu, de lire Mihail Sebastian, un écrivain juif ! Nous sommes dans la ville de Jassy, à l’est du pays, près de la Bessarabie, la Moldavie aujourd’hui. L’antisémitisme se concrétise par une scandaleuse agression des étudiants chrétiens contre les « youpins ». Ils vont jusqu’à pénétrer de force dans l’université où Mihail Sebastian intervient à la demande de Mme Costinas. L’écrivain est molesté, frappé à coups de bâtons mais reste digne et veut comprendre ceux qui le haïssent.
Eugenia a deux frères. Stefan, le plus âgé s’engage aux côtés des extrémistes alors qu’Andrei, le plus jeune, reste proche de sa sœur qui part à Bucarest rejoindre sa professeure. C’est l’occasion pour l’auteur de détailler la situation politique du pays avec un roi (Carol II) qui nomme à la tête du gouvernement, un homme déclarant : « La Roumanie aux Roumains » et traite les juifs de « sangsues. » Eugenia se souvient du massacre des juifs de Chisinău, en Bessarabie, en 1903, et elle craint que ça recommence.
Hélas, la situation se dégrade rapidement et ce livre m’a plongé dans la vie politique et culturelle d’un pays soi-disant neutre en 1939 mais qui vend son pétrole à l’Allemagne nazie ! En septembre 1941, les juifs doivent porter l’étoile jaune. Eugenia, devenue journaliste, partage son amour pour Mihail avec l’actrice Leny Caler. Lionel Duroy cite des passages du journal de l’écrivain, étayant bien un récit poignant, déchirant grâce à une Eugenia se battant pour plus de justice et d’équité dans une époque qui trouve, hélas, des échos aujourd’hui.
L’armée rouge occupe la Bessarabie et la Hongrie réclame la Transylvanie. Le général Antonescu est au pouvoir. Carol II abdique en faveur de son fils de 19 ans, Michel 1er. Antonescu s’entoure des plus extrémistes dont Stefan qui déverse sa haine : « Des juifs partout, des métèques en veux-tu, en voilà, tout ce petit monde occupé à nous manger la laine sur le dos. »
L’inévitable est en route. On a souvent parlé de Shoah par balles en Europe de l’est mais là ce sont les Roumains eux-mêmes qui massacrent les juifs avec la complicité des nazis. Aux côtés d’Eugenia, j’ai ressenti toute l’horreur du pogrom de Jassy qui vit périr 13 266 personnes dont 40 femmes et 180 enfants.
Après avoir ajouté qu’Eugenia nous emmène aussi avec la Résistance roumaine, il faut dire aussi que ce livre fait rencontrer Curzio Malaparte, journaliste et écrivain italien qui a détaillé dans Kaputt beaucoup d’horreurs commises durant la seconde guerre mondiale.
Eugenia : un livre à lire absolument !
Chronique illustrée à retrouver sur : http://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
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