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Plus que tout autre philosophe - ce qui fait, en somme, ce qu'on peut appeler sa marque de fabrique - Giuseppe Capograssi accorde au monde concret où nous vivons la plus grande attention. Or, l'instance la plus visible à laquelle ce monde concret est confronté, qui l'oblige et le libère à la fois, notamment par la contrainte de la loi et du droit, mais aussi par l'invitation que la loi et le droit lui font à développer sa pleine humanité, c'est l'État.
La question de l'État constitue l'intérêt initial et constant de Giuseppe Capograssi ; son oeuvre débute et s'achève par deux études consacrées à l'État.
Sa thèse de laurea, soutenue en novembre 1911, portait sur « l'État et l'histoire » ; sa première étude systématique - le livre que nous présentons ici - dédiée à Vittorio Emanuele Orlando, est l'Essai sur l'État (1918), que suivent, attentifs à tout ce qui touche les aspects philosophico-politiques et juridico-constitutionnels de l'État, les Réflexions sur l'autorité et sa crise* (1921) et La nouvelle démocratie directe (1922). Giuseppe Capograssi consacre encore à la question de l'État, outre trois essais monographiques dont le dernier est inachevé, La signification de l'État contemporain (1942), Considérations sur l'État (posthume, 1958), Fragment sur l'État (idem), des réflexions approfondies dans d'autres textes de philosophie juridique et morale - les livres Analyse de l'expérience commune* (1930), Études sur l'expérience juridique (1932), Introduction à la vie éthique* (1953), et les essais Le droit après la catastrophe (1950), L'ambiguïté du droit contemporain (1953), Sur quelques besoins de l'individu contemporain* (1955 ; les textes marqués d'un astérisques ont été publiés par les Éditions de la revue Conférence en 2012 et 2013).
Autant dire que la question de l'État traverse l'ensemble de l'oeuvre de Giuseppe Capograssi. - Mais on voit poindre, dans cet Essai sur l'État, non seulement le noyau essentiel de ce qui sera développé plus tard dans d'autres textes décisifs, mais toutes les raisons de l'attention aux réalités les plus manifestes, les plus concrètes, et cependant les moins prises en considération par la réflexion philosophique en matière politique. L'État est d'abord un fait, et c'est ce fait que Capograssi éclaire ; et ce fait se révèle différent selon qu'il est envisagé par « la conscience empirique » ou par la « science », notamment idéaliste. C'est ainsi que Capograssi est amené à en faire la généalogie à la fois conceptuelle et historique, au prix d'une analyse des grands textes de Vico, à commencer par le De uno - Vico qui ne deviendra pas chez lui un inspirateur parmi d'autres, mais la matière même qui lui permettra, devant l'évidence historique des existences, de trouver sa propre philosophie. Il y a ici des pages admirables sur Vico - et des aperçus fulgurants sur l'État grec, sur Rome, et la révolution opérée par le christianisme sur l'idée d'État et celle d'autorité - concept et réalité majeurs chez Capograssi.
Une riche préface écrite spécialement pour ce livre par Stefano Biancu (cf.
Indications biobibliographiques ci-dessous) et traduite par le même traducteur, éclaire cette notion d'autorité chez l'auteur, et permet de mettre en perspective les grands textes de Capograssi consacrés à cette question à partir de l'Essai sur l'État, jusqu'aux textes plus tardifs repris dans ce volume, La signification de l'État contemporain (1942), Considérations sur l'État (posthume, 1958), Fragment sur l'État (idem) ; le lecteur sera donc invité à jeter un regard renouvelé sur les 4 volumes que les Éditions ont publiés à ce jour dans la collection des OEuvres de Giuseppe Capograssi.
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