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Mes envies de vivre font appel au souvenir, sans nostalgie. Elles ont pour nom Léontine, Raymond, Lily, Marianne, Jeanne, Henri, etc. Tous ces gens qui m'ont appris à aimer l'instant qui passe, quand j'étais enfant, quand j'ai grandi. Quand l'envie de vivre se faisait désirer. Chacun d'eux est pour moi le héros d'une belle histoire venue se fondre à la mienne. Raymond, le balayeur chef de Clermont, me faisait écouter, à moi, le balayeur apprenti, le chant d'un rossignol qu'il était seul à connaître. Petits bonheurs pour petites gens, disait-il. Ma grand-mère Louise enfermait dans son coffre à linge ce pâté de pommes de terre que nous aimions tant manger chez elle: "Mes enfants, je suis vieille et fatiguée." Le pâté apparaissait, elle nous avait bien eus! Jeanne, la psychanaliste rencontrée dans un centre de rééducation où j'enseignais la pantomime, cachait derrière son armoire un grand poème écrit sur le mur par Paul Eluard, un poème d'amour fou. Elle me nourrissait. "Les artistes? Ils crèvent de faim", disait-elle.
Ce sont toujours les autres qui m'ont donné envie de vivre, et j'essaie par ce livre de leur rendre la politesse.
Jean-Luc Petitrenaud.
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