"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
La narratrice, une algérienne trentenaire, vit et travaille à Paris depuis quelques années. Ici, tout et tous devraient la séduire, pourtant, elle se retrouve souvent au petit matin sur un banc de la rue des Martyrs, auprès de Clotilde, "femme sans maison" qui parfois accepte de parler d'elle. Qui raconte l'amour et la douleur de l'amour. Assise à son côté, la jeune femme compte les pierres dans sa poche, les pierres suivent ses pensées, lui permettent d'égrener les obligations de la journée à venir.
La plus désagréable est-elle de se retrouver au bureau à feindre le bonheur dans une ville étrangère ? Ou de répondre aux coups de fil incessants de sa mère qui se désespère de la savoir encore célibataire ? Ou bien la perspective de revenir en Algérie pour le mariage de sa soeur avec l'image détestable des gens qui quittent leur pays sans remords pour vivre là-bas ? A moins que le plus difficile, le plus obsédant, soit de devoir accepter le manque sidérant des amis d'enfance, de la révolte permanente contre un état autoritaire et absurde, de la lumière d'Alger aveuglante et enveloppante.
Après le coup de coeur de Nos richesses, j'ai eu envie de retrouver Kaouther Adimi dans ce petit roman Des pierres dans ma poche. Sujet, titre et photo de couverture qui étaient comme un appel.
Une jeune femme a quitté son Algérie natale pour s'installer, travailler, vivre et s'épanouir à Paris.La trentaine, toujours célibataire, elle doit retourner à Alger pour les fiançailles de sa petite soeur. Elle va y affronter sa mère qui ne cesse de lui reprocher son célibat. Alors avant de partir, elle poursuit sa vie parisienne à la recherche du bonheur et ne peut s'empêcher de se remémorer sa jeunesse algéroise.
J'ai beaucoup apprécié les sujets abordés : l'exil, la quête du bonheur, le poids de la tradition, de la famille, le contraste des cultures, la nostalgie de la jeunesse et de la terre natale. J'ai aussi beaucoup apprécié l'écriture profonde et sensible coupée par ses dialogues dures et brutaux par téléphone entre la narratrice et sa mère restée au pays et qui veut lui dicter sa vie.
Mais globalement, ce fût une petite déception. Je n'ai pas réussi à rentrer dans le roman et il m'a semblé seulement le survoler. Peut-être que la lourdeur de ce début de confinement en est la raison? Qui sait?
Mais je ne manquerai pas bientôt Les petits de décembre!
Après « nos richesses » et avant « les petits de décembre », je me suis laissé tenter par ce petit format, adapté au peu de temps restant de vacances.
Dès les premières pages, j’ai su qu’une seule journée suffirait à le lire. Il m’a en effet été difficile de l'’interrompre, même une seule fois.
La narratrice, algérienne de 30 ans, s’est établie à Paris pour travailler dans une maison d’édition. Dans son étroit appartement, avec un figuier pour seul compagnon, elle apprécie les petits moments échangés avec Clothilde, jeune fille sans toit ni loi, qui lui permet de relativiser ce sentiment de solitude qui parfois l’étreint. Prix à payer pour gagner en liberté ? Tiraillée entre deux cultures, harcelée par les appels téléphoniques d’une mère envahissante, elle se remémore ses souvenirs doux amers. « Ces petits souvenirs sont des pierres dans ma poche, qui m’alourdissent. Ils rappellent les chagrins et les coeurs qui se serrent ».
En même temps, malgré l’énergie qu’elle déploie, il lui est difficile de rencontrer l’homme qui prouverait son statut de femme mariée lorsqu’elle se rendra aux fiançailles de sa jeune sœur en Algérie.
« C’est l’histoire d’une barre médiane qui n’arrive pas à trouver une autre barre à laquelle s’accrocher en toute confiance ».
Contraste des cultures et poids des traditions, ancrages sentimentaux et souvenirs, nostalgie et solitude, autant de sujets qui composent une histoire d’expatriation au féminin. Les mots pour traduire autant de difficultés ne sont pas ceux du désespoir, car ils s’entremêlent dans un style empreint de légèreté, d’humour et de poésie.
L'émotion est bien là, prégnante, et rend ce roman « inlachâble » ; le seul bémol est qu’il soit si court !
Nos racines ont toujours leur importance, malgré le temps qui passe, l'envie de vivre pleinement, l'envie de liberté, de vivre ailleurs, autre chose. On retourne toujours sur ses pas comme le petit Poucet grâce à ses petits cailloux blancs laissés sur le chemin.
Kaouther Adimi nous livre ici un roman pur, envoûtant aux senteurs du pays, des racines jamais totalement oubliées, juste mises à distance un moment. Un roman également oppressant dans lequel la réflexion se fait sur la vie, sur l'avenir, sur les acquis et les peurs.
Le bonheur est fragile, parfois, juste en surface, on le recherche en soi, comme dans ce qui nous entoure et il semble ne jamais vouloir venir. Que faire alors lorsque partir n'a pas forcément été la solution ? Doit-on rester feindre un bonheur alors qu'on ne vit qu'en surface à peine comblé par une vie ennuyante ou du moins pas autant rêvé ?
Autour de soi, les fourmis rouges continuent leur lente avancée, un peu comme l'image des êtres humains sur la terre ou encore l'image plus profonde de la vraie vie. Cette profondeur se ressent également lorsque l'auteur évoque la pluie qui tombe et ce bonheur simple qu'elle aimerait partager avec un homme.
Le temps continue à filer et avec lui les certitudes, les petits bonheurs et la quête ne s'arrête pas de vouloir toucher au véritable bonheur. Seulement où se terre-t-il ? Doit-on suivre les traces que l'on nous impose. Kaouther Adimi n'oublie pas d'où elle vient, ses racines sont ancrées dans chacun de ses mots comme d'ailleurs sa liberté bien à elle. Au-delà de ses mots, elle évoque le statut de la femme et du migrant volontaire comme involontaire au sein de la société autant que le prix de la liberté.
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