Inspirée d’une histoire vraie, cette BD apporte des conseils et des solutions pour sortir de l'isolement
Depuis la palestine, où Naïma est née, jusqu'aux alentours de Genève où Lila grandit, quatre générations de femmes, chacune au caractère bien trempé, prennent la parole pour se raconter, entre mariages arrangés et velléité d'émancipation. Pourtant l'Histoire se répète. Confrontées aux guerres et à la violence des hommes, elles trouvent en elles la même vitalité immense qui les aide à passer entre les drames, conservant intacts leur humour obstiné, leur désir de liberté et leur aspiration à la vie.
Naïma. Ema. Dara. Lila, quatre générations de femmes d’une même famille libano-palestiniennes, quatre destins, quatre voix féminines qui racontent leurs vies, quatre exils.
Naïma par qui l’histoire existe vit à Haïfa, « capitale de la Palestine . Haïfa le fjord méditerranéen ». Sa meilleure amie, son double Haava est juive, « Nous mangions, chantions,dansions ensemble. Comme eux, nous habitions un tout petit appartement « . L’attentat de 1938 change la donne et l’exil commence « Ma mère, mon grand-frère, mes deux sœurs et moi avons quitté Haïfa après l’attentat de 1938 ». Le père est resté sur place. elle épouse, à douze ans, Jahid qui devient l’abu (le père) de ses enfants. Ainsi commence une vie d’exils, de retours, de fuites qui perdure au fil des générations
De mère en fille, une chaîne familiale se construit des fois en pointillés, à cause des guerres. Elles racontent l’exil, leurs forces, les mariages arrangés ou d’amour, la lâcheté, l’infidélité de leurs époux.
Dans un style sobre, lumineux, direct Jadd Hilal semble écouter ces femmes qui verbalisent l’exil toujours si difficile à vivre et les générations suivantes qui n’ont pas connu les mêmes lieux, les souffrances. L’exil se transmet de génération en génération dans ce coin du monde où la guerre règne en maître depuis si longtemps. Elles semblent raconter la même histoire, trop souvent recommencée tout en gardant leurs différences. Chaque mot, chaque phrase est importante, pas de déchets. Certaines reçoivent l’amour en héritage, d’autres l’exil.
La souffrance, le mal du pays sont toujours présents, cette famille Palestinienne porte l’exil en bandoulière, Leurs vies est une carte de géographie de l’exil, les enfants, petit-enfants sont les ponts qui leur permettent de se rejoindre. Ces femmes se sont transmis le combat, le courage pour survivre. J’ai aimé ces femmes-courages, elles plient mais ne rompent pas et relèvent l’échine pour mieux repartir, elles ont charge d’âme, charge de transmettre.
Ce premier livre est prometteur. Promesse tenue avec son second livre « Une baignoire dans le désert » et aimé, autre approche de la guerre.
https://zazymut.over-blog.com/2022/05/jadd-hilal-des-ailes-au-loin.html
http://leslivresdejoelle.blogspot.com/2018/12/les-ailes-au-loin-de-jadd-hilal.html
J'ai lu ce livre dans le cadre du prix Hors Concours dans lequel j'étais engagée cette année, il fait partie des cinq finalistes.
Dans ce roman nous suivons quatre femmes libano-palestiniennes de 1930 aux années 2000. De mère en fille, Naïma, Ema, Dara et Lila nous racontent leur exil, parfois leurs voix s'entrecroisent pour relater leur version des mêmes événements.
Naïma, née à Haïfa en 1930, mariée à douze ans, va être la première à être contrainte par la guerre à l'exil. Ema, l’aînée de ses sept enfants, donnera la vie à Dara qui elle aussi aura une fille Lila. Ce sont toutes les quatre des femmes déterminées et très courageuses qui ont eu à vivre des conflits mais aussi à subir le violence et la toute puissance des hommes.
Les événements tragiques qui vont se répéter au Moyen-Orient vont les mener du Liban en Irak, à Genève et en France dans un exil sans fin..
De génération en génération, on voit les femmes évoluer, rêver de liberté, s'engager politiquement mais leur émancipation restera malgré tout très difficile. Il ne leur sera jamais simple d'échapper au sort réservé aux femmes dans leur culture dont elles évoquent certains aspects avec un certain détachement et une belle dose d'humour. La responsabilité qui incombe aux filles aînées est particulièrement frappante, la violence des hommes constante. Leur tiraillement entre leur pays d'origine et leur pays d'accueil est constant ainsi que leur nostalgie du Liban malgré le chaos dans lequel est plongé leur pays. Ce récit fluide et vivant met en lumière des femmes très attachantes, toujours pleines de vitalité pour se reconstruire ailleurs. Un roman réussi.
« Les personnages et leurs fictions sont réactifs. » affirme l’auteur Jaad Hilal. Le lecteur aussi ! « Des ailes au loin » est ce récit où la simultanéité joue à la marelle sur l’astre du temps. C’est un cri qui fait courber les branches du déraisonnable. C’est un enfant au corps chaud de glaise de sa terre mère, qui croit aux miracles soudains. Elle est là, cette cartographie, l’écorchée vive, par ses déracinements qui griffent le sol du sceau de l’inaltérable et transforment les chemins universels, en pièges inavouables. « Des ailes au loin » est ce regard posé sur le point du ciel où fusionne le grand écart entre les deux rives célestes. L’écriture est ciselée, habile, aérienne, frémissante. Elle joue avec les dés de l’oralité. De l’entité même vêtue, nourricière, le lecteur plonge en crayons de couleur annoncés, dans le pictural mature Libano-Palestinien. La généalogie qui trace subrepticement les frontières avilissantes est cette volonté altière qui combat des démons d’une intériorité écartelée. On aime ces femmes, ces combattantes, ces engagées de lumière et ces mères dont le courage est un roseau qui ne plie pas face aux conflits, aux diktats de ce Liban dont les oranges tombent comme des enfants devenus apatrides. La Palestine respire de cette odeur de linge frais qui claque au vent des chimères. Elle métamorphose les langueurs et nostalgies en portes de secours. Abat une à une les cartes de l’impondérable et se fraie un passage dans la ruelle où l’on entend la fuite qui pleure et le bruit d’une poupée qui se casse en mille morceaux. Où l’on ressent la beauté de ces femmes belligérantes aux cils sombres, aux regards manichéens, ravageurs ou altruistes, aux sourires toujours arc-en-ciel. Ce récit mappemonde est beau car exutoire. Il approuve le départ qui sauve mais laisse un fond de lait dans la tasse en partant au cas où. Retient d’un fil cette mère tarentelle d’une histoire de pays en souffrances. Les hommes, points noirs, un peu raturés, noyés sous l’emprise idéologique sont confrontations et contre-sens. Le choc n’a pas lieu. Ces mères intuitives savent. L’ubiquité est un envol. Ce récit est vérité. Profondément respectueux il est l’essence même de ce qui ne sépare pas, et relie d’une terre à une autre, coûte que coûte, avec persévérance. Publié par Les Editions Elyzad, en lice pour le Prix Hors Concours 2018 (Gaëlle Bohé) ce roman engagé est une chance.
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