Il n'est pas trop tard pour les découvrir... ou les offrir !
La même année qu'Eva sont nés deux garçons dans le petit village flamand de Bovenmeer. Les "trois mousquetaires" sont inséparables, mais à l'adolescence leurs rapports se fissurent. Un été de canicule, les deux garçons conçoivent un plan : faire se déshabiller devant eux les plus jolies filles du village, et plus si possible. Pour cela, ils imaginent un stratagème : la candidate devra résoudre une énigme en posant des questions ; à chaque erreur, elle devra enlever un de ses vêtements. Eva doit fournir l'énigme et servir d'arbitre si elle veut rester dans le groupe. Elle accepte, sans savoir encore que cet "été meurtrier" la marquera à jamais. Treize ans plus tard, Eva retourne pour la première fois dans son village natal avec un bloc de glace dans son coffre. Cette fois, c'est elle qui a un plan... Immense succès de librairie et premier roman qui a valu à son auteur les plus grands éloges, «Débâcle» est un roman choc, servi par une écriture hyperréaliste et intransigeante. Une expérience de lecture inoubliable.
De plein gré s’enfoncer dans le lisier.
Ce livre m’attend depuis sa sortie il y a quatre ans. Il a tellement fait parler que j’ai choisi un autre moment pour le lire.
Evidemment la couverture joue sur attraction-répulsion, une vision troublante.
Dans un petit village de Flandres, en 1988 trois enfants sont nés : Laurens, Pim et Eva. Ils vont vite être inséparables.
La narratrice Eva, qui est partie de ce village depuis neuf ans, reçoit une invitation pour le 30 décembre, lui rappelant que Jan aurait eu trente ans. Jan est le frère de Pim et il est mort en 2001.
Quelques mois plus tard en juillet 2002, le lecteur sent que c’est l’été de tous les dangers, ces trois adolescents se traînent dans ce village surchauffé par la canicule, livrés à eux-mêmes, et qu’ils vont inventer n’importe quoi pour faire passer le temps et pimenter leurs jeux.
Le roman alternera entre chapitres qui nous décrivent ce 30 décembre où Eva prend la route, heure par heure, et juillet 2002.
C’est un fil narratif en haute tension.
Un fait intriguant : Eva a mis dans son coffre un bloc de glace, pourquoi ?
Eva n’a pas fait un trait sur le passé et elle montre combien son estime d’elle-même n’est pas restaurée, et ce dès les premières pages, elle a une attitude qui en révèle beaucoup.
Le trio va devenir le trio infernal gouverné par une curiosité sexuelle qui vire à la cruauté de s’asservissement, une surenchère qui ne peut que mal finir.
J’ai eu l’impression que ce village était posé sur un marécage.
L’enfant Eva ne peut que fuir sa famille, son frère ainé part dans la campagne dès l’aube, sa sœur Lizzie est en proie à des troubles alimentaires profonds, elle s’efface de ce décor, elle a des troubles obsessionnels-compulsifs que seule Eva semble prendre en considération. Visiblement les parents sont noyés dans l’alcool et des obsessions totalement absurdes… Eva se sent exister seulement quand elle est avec Pim et Laurens. Mais jusqu’où cela peut-il aller ?
« A la maison, on avait cinq poules. De toute évidence, maman aussi était au courant du fait que les poules ne pondent qu’un œuf par jour, tôt le matin. Pourtant, plusieurs fois dans la journée, elle retournait voir s’il y avait de nouvelles pontes et revenait systématiquement avec un œuf de plus, un seul. Les douzaines qu’elle avait achetées en secret devaient être camouflées quelque part dans le poulailler, près de la caisse à vin. »
Cette impression de marécage dans lequel on s’enfonce me suit de chapitre en chapitre, c’est plus que noir, glauque jusqu’au malaise.
L’auteur dépeint une fresque sociale, de ces coins oubliés du monde, là c’est un village flamand mais cela rappelle aussi la France décrite par Edouard Louis dans En finir avec Eddy Bellegueule.
Un monde fantôme car ce sont des exclus du système, ceux qui seront toujours en lisière, une noirceur qui colle à la semelle quoi que l’on fasse où que l’on aille…
Il y a une désespérance que rien ne semble pouvoir effacer.
Désespérance qui a une musique instillée par la narration, Lize Spit distille les informations au compte-goutte, et notre lecture fait penser au bruit obsédant d’un robinet qui goutte. Enervant au plus haut point, une avancée implacable.
J’ai été envahie par le silence, la non-communication dans ces familles, le seul bruit serait celui des jeux des enfants, mais vu le choix de leurs activités, eux aussi ils ont intérêts à faire silence.
Quelques éclairs de tendresse ceux d’Eva pour sa petite sœur Lizzie malgré son impuissance et l’impression grandissante qu’Eva doit sauver sa peau.
Mais c’est un autre problème.
Eva nous raconte par le menu, jusqu’à la nausée, ce qu’est une vie sans base solide, sans affection, une vie qui doit pousser sur le néant.
Le lecteur assiste impuissant à cet enlisement qui sent le purin de l’humanité à n’en pas douter.
L’auteur est habile à nous faire ressentir cet enfer et notre impuissance nous qui en lisant regardons la lie sans intervenir.
C’est ce double effet qui renforce le malaise profond qui nous habite jusqu’au dernier mot.
©Chantal Lafon
https://jai2motsavousdire.wordpress.com/2022/01/24/debacle-lize-spit/
Bon, alors là, je dois avouer que j’ai été particulièrement “éprouvée” par cette lecture qui m’a semblé terriblement glauque et fastidieuse …
Un jumeau dont le cordon ombilical a étranglé sa jumelle dans le ventre de leur mère (ça c’est Jolan, le frère ainé de Eva, la narratrice.)
Une fillette à qui on a donné le prénom du bébé mort-né (ça c’est Tessie, la petite soeur) et qui va développer des tocs.
Un père éhonté qui montre à sa cadette (on parle toujours de la malheureuse Eva) comment se pendre convenablement.
Une mère qui boit et est en conflit permanent avec son mari.
Deux copains du même âge (Pim et Laurens) aux jeux plutôt malsains, qui manipulent allègrement leur copine Eva … Et toujours, ce souvenir du frère de l’un d’eux, Jan, mort sans qu’on sache vraiment comment ni pourquoi …
Enfin, le lent déroulement de ce fameux été 2002 particulièrement étouffant. Un drame qu’on sent venir sans qu’il n’arrive jamais … Tout ça se passe à Bovenmeer, un village qui semble regrouper un sacré paquet de névrosés !
Eva, qui s’est volontairement éloignée depuis plus d’une décennie (elle est prof à Bruxelles) va retourner sur les lieux de son enfance perturbée, à la réception d’une invitation (une réunion visant à rendre hommage à Jan qui aurait fêté ses trente ans.) Avec une idée derrière la tête toutefois …
Un récit qui traine en longueur et a mis ma patience à rude épreuve … Est-il besoin de préciser que je n’ai pas été convaincue ?… J’ai dû passer à côté, il faut croire que ce roman n’était pas pour moi … Mauvaise pioche cette fois …
Avis issu de : https://hanaebookreviews.wordpress.com/2018/12/21/debacle-lize-spit/
Ecrit en flamand, succès en Belgique et aux Pays-Bas, le premier roman de Lize Spit est percutant et dérangeant ; l’atmosphère y est pesante, la lecture parfois malsaine et l’on ne peut que saluer la maitrise de la structure narrative pour cette enseignante de l’écriture de scénarii.
Le récit commence de nos jours, à Bruxelles. Eva vit dans un isolement volontaire, dépourvu de passions, de loisirs et de liens avec sa famille. Elle reçoit une invitation de son ami d’enfance, Pimp. Resté à Bovenmeer dans leur village natal où il a hérité de l’exploitation de la ferme laitière, il invoque un recueillement en la mémoire de son frère Jan, qui aurait eu 30 ans, mais Eva y voit un prétexte pour présenter les rénovations de la ferme.
Treize ans après son départ, elle décide de s’y rendre et embarque un énorme bloc de glace dans le coffre de sa voiture.
Le mystère autour du décès de Jan, l’existence de ce bloc qui fondra inévitablement et le ressentiment qui transparait à la lecture de l’invitation suggèrent l’existence de cadavres enfouis du passé.
S’ensuit un récit où passé et présent s’entremêlent.
D’un côté, le lecteur vit la journée du départ d’Eva en détail. De l’autre, il s’immerge en 2002, à Bovenmeer en plein été caniculaire où il retrouve Eva, Pimp et Laurens, adolescents, uniques enfants du village nés la même année et, jusqu’à ce jour, inséparables.
Ames sensibles s’abstenir ! Attirante et dérangeante, la couverture annonce le ton ; cette fillette à l’apparence sage et soignée adopte une moue boudeuse et tient une cigarette qui l’enfume, la saoule ou l’apaise ?
L’enfance n’est ni douce, ni synonyme de nostalgie. L’innocence n’est ni ingénue, ni même existante. L’air de la campagne n’est pas pur mais lourd et la chaleur suffocante exacerbe les odeurs de purin environnantes.
Outre le quotidien désœuvré d’une campagne à l’ambiance sordide, d’un microcosme où tout se sait, tout s’ébruite sauf la vérité, le lecteur assiste au naufrage d’Eva. Confrontée à des parents alcooliques et dépressifs, son frère se passionne pour les insectes et sa petite sœur sombre dans l’anorexie et les TOC. Pour Eva, l’amitié avec Pimp et Laurens est son échappatoire. Mais à l’adolescence, leurs liens se liquéfient et hormones et ennui mènent à des jeux interdits. Au sens propre comme figuré, Eva se jette à corps perdu dans un abime à l’issue fatale.
Par définition, « Débâcle » signifie « rupture subite de la couche de glace, d’un cours d’eau, dont les morceaux sont emportés par le courant » et la fonte est le fil conducteur du roman (cf. titre original Het smelt = la fonte).
Fonte métaphorique du cadre familial, de l’innocence et de la relation fusionnelle qui existaient entre nos trois mousquetaires et fonte tangible du bloc de glace. La structure même du récit suit ce fil rouge. Car l’intrigue se tricote petit à petit et les anecdotes et les souvenirs sont distillés de manière à entretenir une tension permanente.
Le suspense est tel que, malgré mon malaise récurrent à ma lecture, je n’ai pu m’empêcher de me faire violence.
Les souvenirs se densifient, les récits voguent au fil des pages et finissent par s’éclairer. Mais si le dénouement s’éclaire, la noirceur du roman s’accentue.
La scène clé m’a particulièrement secouée. Crue, détaillée de manière froide et précise je me suis sentie honteuse, révoltée et nauséeuse.
Mais Lize Spit réussit l’exploit de marier le sordide, l’horreur et le macabre avec une authenticité crue, juste et sans pathos.
Outre l’intrigue principale, j’ai été particulièrement touchée par la relation entre Eva et sa sœur dont elle essaie de comprendre les TOC sans jugement.
Un véritable roman coup de poing à ne pas mettre en toutes les mains.
« 9H00
L’invitation est arrivée il y a trois semaines, affranchie à l’excès. En pensant à ces timbres, dont le poids avait justement dû alourdir les frais de port, j’ai d’abord ressenti une bouffée d’espoir : il reste donc des choses qui rendent possibles d’autres choses, et vice versa.
L’enveloppe était posée sur le courrier, une dizaine de lettres et de publicités réunies devant ma porte en deux petits tas égaux. La signature de mon voisin : un tas par service à rendre en contrepartie. Sous l’invitation surtimbrée se trouvaient l’offre promotionnelle d’un extralucide francophone et la brochure d’un magasin de jouets adressée à mes voisins du dessus – il arrive régulièrement que ma boîte aux lettres engloutisse le courrier indésirable qui fait geindre les enfants. Le tas d’à côté regroupait des factures et quatre exemplaires d’un dépliant de supermarché bas de gamme, avec à chaque fois la même dinde chichement farcie, la même bûche au moka, le même vin à petit prix. Je n’avais effectivement pas encore de projet pour le réveillon du Nouvel An.
[…]
Pim avait donc trouvé mon adresse. Il l’avait recopiée soigneusement, lettre par lettre. L’invitation elle-même était imprimée. À l’intérieur de la carte, il y avait un petit bloc de texte explicatif.
“Cher/Chère…” Les pointillés faisaient place à mon nom, écrit à la main.
Comme vous le savez tous, c’est ce mois-ci que Jan aurait fêté son 30e anniversaire, mais aussi que nous inaugurons notre site de production laitière, presque entièrement automatisé. L’occasion de se retrouver autour du verre de l’amitié.
J’ai retiré mes chaussures pour sentir le bois tendre du parquet sous mes pieds. La fête posthume de Jan était devenue un coup publicitaire, histoire de faire venir le plus de monde possible au lancement d’une nouvelle boîte.
Je ne suis pas allée plus loin. L’invitation s’est retrouvée dans la poubelle avec les épluchures de pomme de terre et le reste du courrier. J’ai ouvert le robinet en grand, j’ai tendu mes poignets sous le jet d’eau froide et je me suis aspergé le visage.
Le faitout s’est mis à craquer, la fonte assoiffée réclamait elle aussi un peu d’eau. La bouilloire en avait terminé, mais j’ai quand même éteint le gaz. La faim m’avait passé.
Bien sûr, et avant même de m’être séché les joues au torchon, je savais que je n’allais pas en rester là.
J’ai récupéré l’invitation dans la poubelle. »
Cet un livre qui ne laisse pas indifférent,un peu dérangeant par moment(la scène ou Eva est violentée sexuellement),il nous montre comment l'agressée peut être blessée à jamais.
L'histoire d'Eva commence tout en douceur. J'ai cru m'installer confortablement dans la vie paisible d'un village du fin fond des Flandres mais cette impression a été très vite bousculée par une intrigue qui devient de plus en plus étrange et dérangeante.
Pourquoi Eva trimballe-t-elle un bloc de glace pour assister à une réception ? Qu'est-il arrivé à Jan ? Comment vont se terminer les jeux pervers de Laurens et Pim ? Autant de questions qui provoquent une tension oppressante qui ne fait qu'augmenter tout au long des pages.
Le roman de Lize Spit est aussi captivant que l'illustration de couverture, il exerce une attraction impitoyable qui accroche aussi sûrement qu'un bon thriller. Mais il m'a aussi parfois mise autant mal à l'aise que Où sont les enfants ? de Simona Vinci. C'est à peu près le même scénario sordide qui se met en place. Certaines scènes de l'ordre du très intime sont dévoilées et décrites de manière extrêmement crue, mettant le lecteur en position de voyeur . Il faut bien reconnaître que ça n'est pas du tout agréable et même difficilement soutenable par moments.
Entre des parents poivrots et des amis malfaisants, la vie n'est pas un long fleuve tranquille pour Eva qui souffre d'une immense solitude. J'espère pour l'auteure que ses souvenirs n'ont rien d'autobiographique car son histoire est affreuse, terriblement triste... C'est celle de la mort de l'innocence et de la naissance du désespoir.
Un roman étrange et dérangeant dans lequel l'écriture faussement légère va révéler une cruauté adolescente à la limite du supportable. Ames sensibles et nouveaux ruraux qui trouvez que la campagne est un lieu paisible où l'on voudrait bien s'installer parce que "c'est chouette pour les enfants qu'on aura", passez votre chemin!
Débâcle, premier roman de Liz Spit, une vraie pépite.
Laurens, Pim, Eva, 3 enfants, du même âge, inséparables depuis toujours.. Mais un été de leur adolescence les rapports changent... Un roman que je ne suis pas prête d'oublier.
La première à donner un avis sur ce livre
La couverture déjà est intrigante
L'écriture est "simple" dans le bon sens du terme. Je me sens proche de la narratrice ayant, été élevée à l'extérieur de la ville avec 4 frères et les enfants des fermes alentours.
Les jeux dans le foin et la paille, les vaches, les activités agricoles et les étés à la piscine.
Grâce à des flash backs, on suit les frasques des trois enfants du même âge -2 garçons et une fille- de la maternelle à l'adolescence.
Puis survient un événement dramatique -la mort du frère de l'un d'eux.
Le ton est alors plus lourd.
C'est suite à une invitation que la jeune fille revient, treize ans plus tard, dans son petit village flamand de Bovenmeer.
Elle ramène dans son coffre un grand casier en plastique rempli d'eau qu'elle a fait congeler.
Je vous laisse découvrir la suite.....
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Merci pour ce commentaire de Débâcle ,Hanae , vous avez su m'intriguer et votre avis pertinent donne envie de porter secours à Eva , de ruer dans les brancards et de connaître son histoire . Belles lectures