Depuis son royaume de dunes où il est venu se réfugier après avoir quitté la compagnie des humains, un chien-philosophe se remémore sa vie parmi eux. Dans un récit alerte se mêlent des trajectoires de vie aussi diverses que singulières. Roman protéiforme, « Au-dessus de la dune » entraîne le lecteur à la découverte de Ndar, ou Saint-Louis comme le précise le narrateur, faisant allusion au passé de la vieille cité, capitale de l'ancien empire colonial français en Afrique de l'ouest, et toile de fond d'une narration éclatée où ne cessent de s'entrecroiser des destins étroitement liés.
Sa condition de chien fait du narrateur un marginal, très impliqué dans le monde humain grâce d'une part, au fait qu'il soit la réincarnation d'un humain auteur d'un livre satirique, et d'autre part à la complicité de la relation qui le lie à son maître, personnage-clé dont le riche humanisme le rapproche. Cette position privilégiée d'observateur-acteur permet au chien Nestor de décrire les hommes avec sévérité, mais aussi une grande objectivité. Ces derniers sont peints sous les traits les plus vilains, même si le narrateur reconnaît que certains, comme son maître, sont des modèles de bonté et générosité.
Mené tambour battant par Nestor le chien-philosophe, « Au-dessus de la dune » se déroule dans l'humour, le suspense, mais aussi le drame, alternant sans cesse le réel le plus prosaïque et l'imaginaire le plus délirant. Tout en ayant pris le parti de l'imaginaire en prenant un chien comme narrateur, choisi pour servir les visées idéologiques du roman, l'auteur fait constamment référence à l'Histoire politique, fil conducteur permettant d'établir une chronologie précise à chacune des biographies des personnages présents dans son oeuvre. Un savant dosage d'Histoire locale et d'histoires personnelles, de réel et de merveilleux, d'humour et de tragédie, autorise une lecture plurielle à plusieurs niveaux d'interprétation suivant l'angle de vue des lecteurs.
La dimension morale est constamment présente dans la narration de Nestor, qui critique ouvertement, parfois de manière acerbe, les croyances et habitudes culturelles. Une galerie de personnages hauts en couleur confère à l'oeuvre un intérêt psychologique certain, en même temps qu'elle permet une lecture en filigrane d'une société en mutation, à mi-chemin entre une tradition conservatrice et une modernité transformatrice. Le schéma narratif correspond à une trajectoire circulaire, qui est celle du récit initiatique, et qui nous rappelle qu'en dépit d'une forme résolument littéraire, « Au-dessus de la dune » reste proche de la tradition orale.
Roman de l'enracinement dans le terroir Saint-Louisien, dont se réclame son auteur, il est aussi celui de l'ouverture par son évocation des thématiques existentielles que sont l'amour, la sexualité, le choc des cultures, la mort. Il n'est donc pas étonnant qu'ayant commencé devant l'océan, le récit de Nestor qui est une sorte de manifeste de la mémoire collective et individuelle, se termine aussi en face de l'immensité bleue qu'il semble prendre à témoin.
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