"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Un critique de cinéma s'envole pour le Japon en vue d'un reportage sur le tournage d'Alone in Tokyo, film d'un grand réalisateur japonais dont le rôle principal est tenu par la star du cinéma français, Aurore Granger.
C'est parmi les buildings des quartiers de Shibuya et Shinjuku qu'il interviewe Yamato Shimmura, le cinéaste, puis son actrice, avant que la terre ne se mette à trembler. Une éruption du mont Fuji plonge Tokyo dans le chaos et éparpille l'équipe du film. Le journaliste sillonne alors la mégalopole, devenue fantomatique, pour tenter de retrouver la trace d'Aurore Granger...
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« Je me perds, le jour, à Tokyo. La nuit, je m’y retrouve mieux ».
L’incipit donne le ton. L’ambivalence, les manichéennes attentes, ce roman filmique est émouvant, sublime, vibrant, et d’une profonde mélancolie.
C’est un livre précieux, intime, qui a tout pour lui, même la grâce.
Tant il sait relier l’histoire de vie du narrateur et le film : « Lost In Translation » de Sofia Coppola. C’est une fenêtre grande ouverte sur Tokyo qui attire les fragilités d’un homme en recherche de sens. Ce roman est remarquable, vivant et tout en mouvement.
Le narrateur est critique de cinéma. Fragile, romantique, sensible, il vacille sur les tragédies de son quotidien. Sa mère est malade, vieillissante et touchée par la maladie d’Alzheimer. Il a des souffrances en lui et doit faire le deuil d’une mère vivante mais absente, happée par l’oubli. Les visites pavloviennes semblent des bourrasques, les tristesses infinies et incommensurables. Et, à chaque fois, la pensée de la fin des gestes tendres, « car plus il y a de bougies, plus dense et moutonnante est la fumée derrière laquelle, d’année en année, ma mère disparaît peu à peu ».
Son arrivée à Tokyo est empreinte de nostalgie et d’amertume. Il est seul au monde. C’est ici, le levier de ce grand livre, et sa beauté douloureuse, « perdu à l’autre bout du monde, à moins que ce ne soit au milieu de ma propre vie ».
Il erre dans Tokyo, dans cette ville tarentule, entre les néons, et les panneaux publicitaires, parmi les buildings de Shibuya et Shinjuku. Tokyo le happe, le projette dans sa quête existentielle. « Tout est noir quand je ferme les yeux. Tout est silence. J’ai marché une heure ou deux selon mon système de giration au rayon de plus en plus distendu à partir du point central de mon hôtel…Le monde n’est plus qu’une auréole vibratoire ».
Il doit interviewer Yamata Shimmura, le cinéaste et l’emblématique artiste Aurore Granger. En pleine répétition dans la rémanence d’un film prêt à éclore. Un reportage à ramener dans ses bagages dans un retour encore lointain vers la France.
« Dans une sorte de silence surnaturel, après une moue d’incompréhension à laquelle je n’ai pas le temps de répondre d’un signe de tête ou d’une parole, Aurore Granger referme sa porte ».
L’écriture est un palais d’honneur. Une scène perpétuelle au ralenti. On ne lit plus. On est en transmutation dans les descriptions d’une ville magnétique, solaire, éperdue. On ressent les moindres palpitations, les bruits des pas. Séquence après séquence, le récit de Thierry Clech est de plus en plus réaliste, tant il est un fin observateur et de l’ampleur et des détails. Ce récit est lui aussi à haut potentiel cinématographie. Comme si les rôles s’inversaient. On voit le visage du narrateur subjugué par l’aura d’Aurore Granger.
Mais, subrepticement, comme un rappel à l’ordre, la terre se met à trembler, à l’instar du scénario d’Alone in Tokyo. Le mont Fuji est en éruption. « Hormis les feux de signalisation qui tanguent toujours dans la nuit et menacent de tomber, la partie centrale du carrefour, à l’écart des bâtiments, paraît le seul havre de paix en ces instants d’apocalypse ».
Aurore Berger disparaît. Où est-elle ?
Les films sont siamois. Thierry Clech dans une capacité perfectionniste déplace les pions, reformule le scénario. La scène lui appartient. Son livre est le point d’appui d’un triptyque. « Lost In Translation - Alone in Tokyo » et son scénario, film à ciel ouvert, livre d’une beauté inouïe. Lucide, tiré au cordeau, dans un olympien qui rendrait jaloux le charme du mont Fuji. Cet homme figé dans ses torpeurs renaîtra-t-il à la vie tel le Phénix ? Il va vivre d’épreuves. Cherche Aurore Berger. Entre les gravas, les larmes et la faim. Les poussières de cendre sur son cœur, et la rédemption en ligne de mire. Et sa mère portée disparue des filiations et la matrice endormie. « Ma mère s’est retournée vers moi, elles paraît sonder mon visage, y chercher une réponse. Je ne vais pas tarder, dis-je en me levant. Mais je reviendrai demain. Silencieuse, elle me sourit. Je prends ma veste, fais un pas vers elle, l’embrasse et lui souris à mon tour. Je suis inquiète, avoue-t-elle soudain, mon fils est parti à Tokyo et je n’ai pas eu de ses nouvelles ».
Ce roman poignant, dont la maturité du style laisse sans voix, est lumineux et initiatique. Thierry Clech côté ville est un photographe renommé qui expose en France et à l’étranger. « Alone in Tokyo » est son troisième roman. Une déambulation dans Tokyo, magnifiée par cette capacité hors norme de figer l’instant en noir et blanc. Publié par les majeures Éditions Serge Safran éditeur.
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