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Kim Takhwan part de cette tragédie réelle et s'intéresse au rôle des plongeurs professionnels qu'on a appelé quatre jours après le drame, non pas pour retrouver des survivants mais pour remonter les corps des disparus. La gestion des secours fut un véritable fiasco : les autorités promettant des sauveteurs et n'en envoyant pas, ou trop tard et dans des conditions exécrables. En juillet 2014, le responsable des plongeurs qui n'a pu qu'appliquer des consignes inadaptées et accusé d'homicide involontaire à la suite du décès d'un plongeur.
Ce roman est une longue lettre d'un plongeur adressée au juge. Cet homme, Na Kyong-su est un personnage fictif, librement inspiré d'un vrai plongeur avec lequel l'écrivain a noué une relation amicale après le drame. En forme de lettre envoyée au juge pour décrire les conditions de travail, les conséquences terribles de ces plongeons répétés sur la santé des sauveteurs.
C'est un roman fort qui, malgré quelques longueurs et répétitions, cible le manque de réactivité des autorités sud-coréennes devant l'ampleur du drame et la volonté d'icelles d'allumer un nouveau feu en accusant un homme pour mieux tenter de se disculper. Contrairement à la littérature asiatique parfois très imagée, ce livre est direct, clair. On est presque dans un récit journalistique, un rapport des activités et des conséquences de celles-ci sur les hommes. Prenant de bout en bout.
Le 16 avril 2014, Le Sewol, ferry reliant Incheon à l’île de Jeju, sombre quelques heures après avoir quitté le port. A son bord, 476 passagers, dont 325 sont des lycéens de la ville de Ansan. Dès l’annonce du naufrage, des pêcheurs, des bateaux commerciaux, la marine nationale et les garde-côtes se rendent sur place et sauvent 172 passagers. Car sur le bateau, ordre a été donné aux lycéens de rester dans leur cabine. Les canots de sauvetage n’ont pas été mis à l’eau. L’équipage n’a pas su gérer la crise. Pour les parents, l’espoir demeure de retrouver leurs enfants vivants, protégés par le système de cloisonnement du bateau et les possibles poches d’air. Mais aucune décision n’est prise pour des recherches sous-marines. Le gouvernement annonce la présence de cinq cents plongeurs sur les lieux mais il n’en est rien. Quand, trois jours après le drame, une équipe réduite de plongeurs privés commencent les recherches dans des conditions périlleuses, ils savent tous qu’ils sont là pour remonter les corps sans vie des lycéens d’Ansan.
La catastrophe provoque une onde de choc en Corée du sud. Comment un tel drame a-t-il pu se produire ? Qui est responsable ? L’armateur qui n’a pas respecté les capacités de chargement du ferry ? Le capitaine qui a commis une erreur de navigation ?
Mais des questions se posent aussi sur le sauvetage. Pourquoi la Corée a-t-elle refusé l’aide internationale ? Pourquoi les secours officiels n’ont-ils pas été mobilisés immédiatement ? Pourquoi l’équipage a-t-il demandé aux passagers de ne pas quitter leurs cabines ?
Autant d’interrogations sans réponses ou plutôt une multitude de réponses qui ont mis à jour un système de corruption, d’impréparation, d’incompétence…
Comme tous ses concitoyens, l’écrivain Tak-Hwan Kim a été profondément touché par ce drame. Et il a lui aussi cherché des réponses, en interrogeant les parents des victimes, les avocats, les journalistes, mais aussi les citoyens lambda parfois exaspérés par les manifestations de colère des parents endeuillés. Et, surtout, il s’est intéressé au sort des plongeurs envoyés sur les lieux pour remonter les cadavres.
Son ‘’roman vrai’’ prend la forme d’une longue lettre adressée à un juge d’instruction par un plongeur pour disculper un collègue et ami accusé d’homicide involontaire, suite au décès accidentel d’un plongeur surmené et surexploité. Ce plongeur, renommé Na Kyong-su, livre dans un touchant plaidoyer sa version d’une opération qui n’avait plus rien d’un sauvetage. Contrairement aux déclarations de l’Etat qui estimaient leur nombre à plus de cinq-cents, ils étaient huit. Huit volontaires qui ont plongé jour et nuit, sans respect des temps de repos, dans des conditions périlleuses aggravées par la profondeur du site, les vifs courants marins, l’obscurité et les pièges d’un bateau sens dessus dessous. Accusés de vénalité, ils ont non seulement mis leur vie en danger, mais aussi leur équilibre psychologique en côtoyant ces cadavres d’enfants, cette jeunesse sacrifiée. Et s’ils ont eu le sentiment du devoir accompli et la reconnaissance de parents soulagés de pouvoir enterrer leurs enfants, ils ont été abandonnés par l’Etat. Plonger en eau profonde n’est pas sans conséquence pour la santé et aucun ne s’en est sorti sans d’importantes séquelles. Les soins, longs et coûteux, n’ont été pris en charge que durant cinq mois. Démunis, amoindris physiquement, détruits psychologiquement, ils ont été sacrifiés sur l’autel de l’économie, de la loi et de l’envie des gouvernants d’oublier le naufrage et ses conséquences.
Avec Les mensonges du Sewol, Tak-Hwan Kim signe un roman coup de poing, émouvant et révoltant. Au-delà du drame, il raconte les failles d’un pouvoir qui n’a pas su prendre soin de ses enfants. La catastrophe a mis en lumière des défaillances, des collusions entre politique et industrie et a contribué à déstabiliser une présidence déjà mise à mal par des accusations de corruption et d’autoritarisme. C’est dans les moments de crise qu’on juge un gouvernement et celui de Geun-hye Park n’a pas été à la hauteur, ni sur le moment, ni pour gérer l’après.
Un livre nécessaire, pour les Coréens, mais aussi pour le monde car nul n’est à l’abri d’un tel évènement, imprévu mais évitable.
Un grand merci aux éditions de l’Asiathèque et à Pascaline Siméon pour cette lecture éprouvante et essentielle.
Ce n'est pas sans une certaine fierté que Yi Myeong-bang, dosa de la Haute Cour de Justice, conduit le romancier Cheong Un-mong vers la Porte Neuve où il doit être écartelé. Âgé de vingt ans à peine, bien né, guerrier émérite et déjà haut fonctionnaire, Yi vient de mettre un terme à une série de meurtres qui terrorisait les habitants de Joseon depuis trop longtemps; des meurtres signés, puisque près de chaque victime se trouvait un des nombreux romans de Cheong Un-mong. Arrêté, le romancier a bien sûr nié farouchement, mais sous la torture, il a fini par avouer ses crimes. Mais si Yi pense que cette exécution met un point final à son enquête, il se leurre. C'est ce que va essayer de lui prouver son ami Yanoi en l'introduisant dans le cercle de l'École de Baektap, un groupe de lettrés et de savants, tous des amis proches du condamné, et tous persuadés de son innocence. Ces érudits avant-gardistes, bien que cultivant divers talents, n'ont pas accès aux plus hautes fonctions de l'État, car issus, le plus souvent, de liaisons adultérines. Pourtant, ils apporteraient beaucoup au pouvoir en y introduisant de nouvelles idées et de nouvelles techniques. Admiratif, mais méfiant puisqu'il a tout de même arrêté et exécuté leur ami, Yi se plaît à les fréquenter et se lie avec Kim Jin qui lui sera d'une aide précieuse dans sa nouvelle enquête. Car, loin de s'arrêter, les crimes reprennent de plus belle, et au chevet des victimes, des oeuvres posthumes de l'écrivain écartelé. N'écoutant que son sens de la justice et son envie de plaire à la belle Miryeong, la soeur de Un-mong, Yi se lance sur la piste du vrai coupable.
Pour qui l'histoire de la Corée du XVIIIè siècle est un obscur mystère, voici un polar historique qui fera office de guide dans les méandres de ce qui était à cette époque le Royaume de Joseon, prospère, florissant, et dirigé par Jeongjo, 22è roi de la dynastie Yi.
Le livre est au coeur de l'intrigue puisqu'il s'agit là d'une période charnière où l'on commence à faire des copies sur bois. La lecture se démocratise et le roman devient une mode. Pourtant, le roi s'en méfie, les récits inventés sont pour lui sans intérêt, voire nuisibles. Ils sont donc interdits et vendus clandestinement. C'est dans ce contexte qu'ont lieu les crimes liés aux romans de l'écrivain le plus populaire du moment. Le dosa Yi, après une erreur flagrante et l'exécution d'un innocent, reprend son enquête, influencé et aidé par un groupe d'intellectuels qui représentent l'avenir du pays. Mais leur ouverture, leur modernité, leurs voyages en Chine ou au Japon et leurs origines sans noblesse les font mal voir par les gens de pouvoir qui complotent contre eux, surtout quand le roi envisage de leur confier la gestion de la grande bibliothèque. Le jeune Yi ne sait plus où donner de la tête. Doit-il soutenir ses nouveaux amis et continuer de les fréquenter ? Doit-il s'en éloigner pour sauvegarder sa réputation, comme on le lui conseille fermement ?
Intrigues de palais, trahisons, meurtres et romans dans la lointaine époque de Joseon pour un polar historique très original et enrichissant qui gagne à être connu. Une bien belle découverte.
Vraiment passionnant. Découvert par hasard à la bibliothèque de ma ville, je l'ai littéralement dévoré, je ne voulais pas le reposer. Ce livre est longtemps resté dans mes pensées tant il m'a marquée.
L’arrière plan historique est parfaitement présenté par l’auteur, époque Joseon, sous le règne du souverain le plus apprécié, Jeongjo, et les conflits de société qui y faisaient rage.Je trouve qu'il y a une grande richesse dans ce roman, en descriptions et éléments d'enquête, mais on ne se perd pas pour autant. Au niveau de l'intrigue, le suspense ne nous quitte pas, l'auteur nous balade de suspect en suspect, et pas forcément ceux que l'on aurait soupçonnés. L'atmosphère tendue, elle, nous garde dans la lecture.Pour donner envie, je dirais que c'est en quelque sorte un polar qui se passe à une autre époque.
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