"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Les dessins sont somptueux. Mais le récit est un peu trop punchy.
Trop de violence, désolé...
De la noirceur et de la monstruosité : un conte déstabilisant qui amène à réfléchir
Quand arrive le déluge, la fin de la civilisation approche... L’heure de la vengeance aussi. Le découpage en chapitres de l’album nous en apporte plusieurs points d’entrée. Mais dans cette histoire, qui est le véritable monstre ?
Vehlmann nous livre un récit choral qui amène à une certaine réflexion sur notre rapport à la violence, quelle soit sauvage, légitime ou vecue comme necessaire à toute survie. Le lecteur accompagne les différents protagonistes ce qui permet de mieux appréhender leurs trajectoires et donc leurs motivations. Le propos général n’en demeure pas moins assez universel.
L’histoire est ici sublimée par les dessins de Roger. Encrage, colorisation, choix des plans, le tout participe à ressentir differents types d’émotions. La mise en scène des combats est quant à elle puissante.
Une réelle atmosphère singulière prend vie tout au long des planches. Un album qui ne laisse pas indifférent.
Que reste-t-il après la fin ? Les arbres sont morts. il ne reste ni gibier, ni fruits. Le clan doit partir pour de nouvelles terres, c'est Nouvelle-mère qui l'a décidé. Le jeune Sans-voix est prêt à la suivre partout et à la défendre s'il le faut. Il est déjà fort, il le sait, il le sent et il veut montrer son pouvoir au reste du clan.
Après "La cuisine des ogres" (en mars chez Rue de Sèvres) le scénariste Fabien Vehlmann nous livre encore un scénario d'une inventivité rare. En partant de l'histoire de Sans-voix, un jeune singe blanc, il déroule dans une construction chorale (chaque chapître un point de vue) un récit heroic-fantasy de fin de civilisation, noir et violent.
C'est à l'artiste espagnol Roger que revient la mission de mettre en images cet univers créé de toutes pièces. Des animaux, quelques humains survivants après le déluge, parmi eux des esclaves en quête de liberté... Le dessinateur de "Jazz Maynard" fait merveille et parvient à incarner toutes les violences qui constituent la problématique centrale de l'album.
"Le dieu-fauve" est un album difficile à raconter... Il faut se plonger dedans sans trop savoir à quoi s'attendre. Tout en respectant quelques codes du récit de fin du monde. Fabien Vehlmann parvient à surprendre le lecteur à chaque chapître. Une étonnante réussite !
"Catherine a 72 ans. Elle est veuve. Son fils de 43 ans, Michel, vit encore avec elle. Il faut vous dire que Michel est handicapé suite à un accident de voiture." (4ème de couverture)
C'est donc l'histoire de ce duo que Zidrou et Roger racontent. Pas une histoire linéaire avec un début, un développement et une fin, non, des petits moments, des anecdotes, des tranches de vie plus ou moins comiques, plus ou moins tragiques. Et à travers ces petites touches, on sent à la fois ce qui lie Michel et Catherine, lui étant totalement dépendant d'elle et elle lui consacrant sa vie au détriment de la sienne. Avec beaucoup de pudeur et de tendresse, les auteur et dessinateur parlent du découragement parfois de Catherine, de son envie de voyager, de rencontrer d'autres personnes, de vivre pour elle enfin quelques moments. Ils parlent aussi des grands moments de joie qu'elle vit avec Michel.
Il est aussi question de l'après : que faire d'un adulte handicapé lorsqu'on ne peut plus s'en occuper seule ? La solution d'un placement dans une institution est la plus facile -lorsqu'il y a suffisamment de places-, mais il est parfois difficile de s'y résoudre.
Aujourd'hui, je vous parle d'un très bel album, tendre, drôle, tragique, avec des héros attachants, gentils et parfois très encombrants. De ceux qui restent un moment en tête. Scenario impeccable et dessins et couleurs magnifiques. Rien à ajouter, parfois un peu de sobriété ne nuit pas, au contraire.
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