"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Que ce soit du côté lecteur comme du côté auteur, j’ai le sentiment que c’est autour de la fantasy que se pose le plus régulièrement la question de l’originalité. Il semblerait que tout ce qui faisait l’essence-même du genre à ses débuts – à savoir l’existence d’un Elu aux capacités exceptionnelles, destiné à mettre fin à la tyrannie et à la désolation – soit désormais considéré par nombre de lecteurs comme le schéma le plus rédhibitoire qui puisse exister … Et bien que je puisse comprendre la « lassitude » des habitués à croiser toujours le même type d’intrigue, je dois reconnaitre que je ne suis clairement pas d’accord avec eux. Pour ma part, c’est toujours un vrai régal que de me plonger dans un bon vieux récit de high fantasy ! Je pars en effet du principe que même l’idée la plus désespérément clichée au premier abord peut devenir exceptionnelle si elle est bien exploitée, et c’est pourquoi je ne fuie pas en courant lorsque le résumé évoque un « Elu du Bien » face au « Mal incarné » : je suis intimement convaincue que l’originalité peut se trouver même dans les histoires qui semblent atrocement « banales » ! Et clairement, cette trilogie en est la preuve « vivante » !
Jour après jour, bataille après bataille, l’armée des Terres Libres ne cesse de perdre du terrain face aux troupes innombrables du Tyran. Le seul espoir réside désormais dans le talisman qu’une vieille sorcière a confié à Nihal : une fois que celle-ci aura récupéré les huit pierres dispersées sur le continent et les aura scellés sur le médaillon, elle sera en mesure d’invoquer un unique enchantement à la puissance inégalée. Alors, toute magie disparaitra du Monde Emergé durant une journée entière, permettant à la jeune demi-elfe de lutter contre le Tyran à armes égales … Sachant que l’avenir de milliers d’innocents, qui ne demandent qu’à vivre dans la paix et la sérénité, repose sur ses seules épaules, Nihal quitte donc le champ de bataille et part en quête des sanctuaires où se trouvent les pierres. Accompagnée de son écuyer Laïo et de son ami magicien Sennar, la jeune Consacrée est bien loin de se douter des épreuves qu’elle aura à affronter au cours de ce long voyage …
Une chose est sûre et certaine : cet ultime opus de la trilogie est indiscutablement mon préféré. Vraiment, quelle fin magistrale ! On sent que l’autrice est bien plus mature dans son écriture : sa plume est bien plus fluide, bien plus captivante également. Et en ce qui concerne l’intrigue, c’est la même chose : on est ici dans quelque chose de nettement mieux maitrisé ! Licia Troisi reprend le schéma désormais traditionnel de la quête d’une Elue, ultime survivante de son peuple, sur qui repose le destin de tout un monde … pour mieux le sublimer. Des livres de fantasy, j’en ai lu des centaines, mais rares sont les quêtes à m’avoir autant captivée : cheminer aux côtés de Nihal et de ses deux compagnons dans leur recherche des pierres a été un véritable régal. J‘ai tout particulièrement apprécié cette alternance entre la langueur du voyage et la tension des épreuves : l’autrice a vraiment su trouver un équilibre entre ces deux facettes de la quête, et elles se complètent à merveille. Au fil de leur périple, nous explorons toutes les Terres du Monde Emergé, nous découvrons toute la richesse de ce continent, mais aussi toute la souffrance engendrée par le règne du Tyran : cela exacerbe notre envie viscérale d’assister enfin à la confrontation finale, qui approche à grands pas !
J’apprécie également que l’histoire ait pris ce tournant bien plus profond : il ne s’agit plus seulement de luttes sanguinolentes sur le champ de bataille (bien que nous ayons encore le droit à quelques scènes de combats épiques), mais bien plus d’une lutte psychologique, philosophique et idéologique. Nihal cherche un sens à son existence, un sens à sa quête, elle se débat avec ce qu’elle pense être sa destinée implacable. Elle porte le fardeau d’être l’ultime représentante de son peuple : sa tâche est-elle de venger les siens ? Elle a parfois le sentiment qu’être la dernière demi-elfe lui ôte le droit de vivre pour elle-même. Comme si sa vie ne lui appartenait pas tout à fait … Et surtout, plus le temps passe, plus Nihal doute : ce monde mérite-t-il vraiment qu’on meurt pour lui ? la paix ne serait-elle qu’une vaste illusion et supercherie ? l’homme est-il par nature cruel et assoiffé de combats ? Elle se demande si cela vaut vraiment la peine de tout risquer … Ses interrogations ont beau être parfois répétitives, elles n’en restent pas moins profondément intéressantes, car elles posent des questions sur la nature humaine, sur la justice, sur la paix, sur la responsabilité, sur le bonheur également … A méditer !
Mais que les réfractaires aux questionnements métaphysiques ne s’inquiètent pas : ce roman nous offre aussi de l’action à n’en plus finir ! Les batailles deviennent de plus en plus fréquentes, de plus en plus violentes, de plus en plus désespérées : dans un camp comme dans l’autre, on sent que l’affrontement final approche. La tension monte, progressivement, insidieusement, chapitre après chapitre. Ido fait face au mystérieux chevalier rouge, et leurs combats m’ont donné des sueurs froides. Nihal et ses compagnons font face à de nombreuses embûches, et mon cœur s’est plus d’une fois emballé tant j’avais peur pour eux. On tremble d’effroi, parfois d’espoir également. Et puis, on pleure, aussi. Certains passages sont atrocement déchirants, je n’étais clairement pas prête pour cela, et j’ai cru que je ne m’en remettrais jamais. Car certaines pertes sont plus douloureuses que d’autres, car elles nous mettent face à la terrible réalité de la vie : ce sont bien souvent les plus innocents qui souffrent le plus … Et puis, croyez-moi ou pas, mais j’ai aussi soupiré, de soulagement mais aussi d’attendrissement : nos tourtereaux prennent enfin conscience des sentiments qu’ils éprouvent l’un pour l’autre, et c’est juste tellement mignon !
En bref, vous l’aurez bien compris, c’est un dernier tome de toute beauté que nous offre l’autrice avec cette fin de trilogie ! Si j’avais beaucoup aimé les deux premiers, qui avaient vraiment cette « fraicheur » qui me rappelle mes premiers pas dans le monde de la fantasy, j’ai tout simplement adoré ce troisième, bien mieux construit, bien mieux écrit. On sent approcher la bataille finale avec une impatience grandissante … ainsi qu’une inquiétude croissante, car même si on se doute que le Bien finira par triompher du Mal – codes du genre obligent –, on sent confusément que nos héros ne s’en sortiront pas indemnes … en espérant qu’ils s’en sortent tout cours. Ce tome, c’est clairement celui qui m’a fait ressentir le plus d’émotions, celui qui m’a le plus bouleversée : j’ai littéralement pleuré à certains passages, et d’autres étaient si chargés en tension que j’en oubliais de respirer ! C’est donc un tome grandiose qui donne envie de découvrir les trilogies suivantes … et qui me fait répéter ce que j’ai déjà dit dans mes chroniques précédentes : n’hésitez vraiment pas à vous plonger dans cette saga si vous appréciez les bons vieux récits de fantasy des familles !
http://lesmotsetaientlivres.blogspot.com/2020/11/chroniques-du-monde-emerge-tome-3-le.html
Parmi mes bonnes résolutions littéraires de l’année 2020, il y a « avoir moins de sagas en cours ». Quand j’ai posé cet objectif, l’idée était surtout de ne pas commencer trop de nouvelles sagas (maximum 24) et de poursuivre celles que j’avais déjà commencées (minimum 12) … Et finalement, je me retrouve à fouiller dans les méandres les plus abyssales de ma pile à lire pour trouver des sagas courtes (duologies ou trilogies) que je peux m’enchainer d’une traite ! On va dire que l’objectif est tenu à moitié : mon nombre de sagas en cours n’augmente pas (vu que ces sagas ne font qu’un passage express dans cette catégorie avant de rejoindre rapidement celle des sagas terminées), mais il ne baisse pas non plus ! Mais clairement, quel bonheur de pouvoir lire d’un bout à l’autre toute une saga sans être interrompue par l’arrivée impromptue d’un service presse ou par une consigne éphémère sur un challenge : j’aime les longues sagas, mais il faut reconnaitre que les courtes ont ce grand avantage d’être bien plus pratique pour ceux qui, comme moi, préfère lire tous les tomes à la suite !
Les troupes du Tyran ne cessent de gagner du terrain, et bientôt, les Terres Libres seront contraintes de battre en retraite … Pour mettre fin à cette guerre, Sennar ne voit qu’une solution : demander de l’aide aux habitants du Monde Submergé, qui ont rompu tout contact avec le Monde Emergé depuis plusieurs décennies. L’entreprise est risquée : nul ne sait réellement où se situent ces Terres légendaires … Mais le jeune magicien, nouvellement promu Conseiller, est bien décidé à aller jusqu’au bout de sa mission, quoi qu’il lui en coute. De son côté, après bien des mois et des mois d’éprouvant apprentissage, Nihal est à deux doigts de devenir enfin officiellement un Chevalier du Dragon. Mais la joie de devenir enfin la guerrière accomplie qu’elle a toujours rêvé d’être ne suffit pas à lui faire oublier le vide au cœur qu’elle ressent depuis le départ de Sennar, qu’elle a blessé au visage dans un accès de colère. Et le poison de la vengeance et de la haine ne cesse de gagner du terrain dans son esprit : saura-t-elle trouver la paix avec elle-même avant de conquérir la paix pour le Monde Emergé ?
La plus grande et la plus belle surprise de ce second tome, c’est assurément la « promotion » de Sennar qui passe d’acolyte de l’héroïne à personnage principal ! Quel plaisir de suivre le jeune homme dans sa quête : il est bien plus discret et réservé que Nihal, bien plus humble et réfléchi également, et cela fait du bien, un héros aussi simple … Un héros qui se défend de l’être, d’ailleurs, même si je considère très personnellement qu’il mérite amplement ce titre ! Car croyez-moi, sa mission ne sera pas de tout repos, et j’ai plus d’une fois trembler d’effroi : les embûches qui se dressent sur son chemin sont absolument terrifiantes, et j’ai plus d’une fois eu peur pour lui – même si je me rassurais en me répétant que l’autrice n’allait pas faire soudainement de lui un personnage principal pour le faire mourir quelques dizaines de pages après. Et même arrivé à destination, Sennar doit encore faire face à la méfiance et à la haine d’un peuple qui s’est retiré du Monde Emergé justement pour ne plus avoir affaire à la guerre … Bien que cette escapade au sein du Monde Submergé ne soit pas bien long, je trouve qu’il est toutefois assez intéressant, car même dans un peuple né d’un idéal de paix et de justice, les inégalités, les discriminations et les abus de pouvoir prennent rapidement le dessus …
Parallèlement à cette quête de paix effectuée par Sennar, les chapitres consacrés à Nihal nous plonge droit dans la réalité crue de la guerre. La guerre dans tout ce qu’elle a de plus horrible : ici, point de descriptions grandiloquentes qui exaltent la beauté des batailles comme c’est trop souvent le cas en fantasy, mais juste la mort et la douleur. Une bataille est tout sauf belle. C’est d’ailleurs cela qu’Ido veut absolument mettre dans le crâne de son élève, qui a encore trop cette tendance à se régaler de chaque combat, à se perdre dans cette extermination mécanique de l’adversaire. J’aime beaucoup voir comment Nihal lutte contre ce démon intérieur qu’est la soif de vengeance et le gout du sang … et j’aime d’autant plus le fait qu’elle ne réussit clairement pas du premier coup à se débarrasser de cette ivresse morbide. J’aime également énormément l’autre facette de sa personnalité, plus sensible. J’aime sa façon de veiller farouchement à Laïo, son seul ami à l’Académie qui a besoin de son soutien pour oser affronter son père et tracer son propre chemin. Elle agit un peu en grande sœur, un peu trop dévouée car incapable de s’empêcher d’agir, mais franchement attentionnée, et je trouve leur relation vraiment émouvante …
C’est donc un délicat équilibre entre action et émotion que nous propose l’autrice avec ce second tome, que j’ai trouvé bien meilleur encore que le premier. Peut-être, tout simplement, parce que nos jeunes héros ont murit : Nihal a beau être toujours aussi impulsive et rongée par la haine, elle est clairement plus mature, elle se pose plus de questions sur le sens de son existence et sur les raisons qui la poussent sur la voie du combat. Elle souffre, et on souffre avec elle, car malgré tous ses défauts, elle reste tellement attachante ! Ce tome, c’est aussi celui de la vérité. La vérité qui blesse, qui détruit tout sur son passage. Celle qu’on aurait peut-être préféré ignorer, même si on avait besoin de la connaitre. Les révélations et découvertes sont nombreuses dans ce tome, et on pressent qu’elles auront une grande importance et incidence sur la suite de l’histoire … En effet, ce tome a beau être passionnant, captivant et palpitant, il n’en reste pas moins qu’il ne fait pas véritablement avancer la lutte contre le règne du Tyran : on a parfois l’impression de piétiner, tout comme l’armée fait du surplace pour maintenir laborieusement sa position sans céder du terrain, mais sans en gagner non plus. C’est un tome axé sur le découragement grandissant, cette impression que ça ne sert à plus rien de lutter contre l’inéluctable … Et on ne sait plus quoi espérer pour la suite et fin.
En bref, vous l’aurez bien compris, ce deuxième opus est indiscutablement plus palpitant que le premier, malgré quelques petites longueurs dans la dernière partie et quelques inévitables facilités scénaristiques qui feront tiquer les lecteurs les plus exigeants. Avec ce livre, j’ai tremblé d’effroi, j’ai écarquillé les yeux d’émerveillement, j’ai soupiré de découragement et enfin, j’ai soufflé de soulagement … Difficile de vous dire avec précision pourquoi cette histoire me captive tant, pourquoi elle me plait tellement, mais une chose est sûre et certaine : cette trilogie est vraiment une petite pépite de la fantasy pour adolescents. Elle est certes bien plus sombre, bien plus dure que d’autres, mais elle est surtout bien plus intéressante, car elle pose de grandes questions. Donner un sens à sa vie, cela ne concerne pas uniquement les guerriers d’heroic fantasy qui doivent savoir au nom de quoi ils se battent : c’est une question qui rejoint les interrogations de tous les jeunes à un moment donné. De même, les thématiques de l’amitié, du pardon, de la paix, de la justice … sont universelles et peuvent facilement trouver un écho dans le quotidien du lecteur. Bref, c’est un deuxième tome très haletant qui se dévore du début à la fin : un régal !
http://lesmotsetaientlivres.blogspot.com/2020/10/chroniques-du-monde-emerge-tome-2-la.html
Il y a quelques années, en me promenant dans les méandres du forum de Livraddict, j’ai découvert le monde fabuleux des challenges littéraires … Et c’est rapidement devenu une véritable addiction ! En effet, s’il m’arrive bien souvent de râler parce que j’en ai trop et que les impératifs des uns ne coïncident pas avec les urgences des autres, je ne peux clairement pas m’empêcher de continuer à m’inscrire régulièrement à de nouveaux challenges. Car même si c’est parfois un véritable casse-tête pour concilier la chèvre et le chou, il faut reconnaitre que ces challenges m’incitent bien souvent à explorer plus en profondeur ma gigantesque PAL et à en exhumer des livres qui attendent depuis des années d’être enfin lus. C’est ainsi que pour progresser dans un de mes challenges favoris, je me suis tournée vers cette trilogie qui, déjà au collège, me donnait terriblement envie … Et clairement, heureusement que le challenge des Pyramides étaient là, sinon j’aurai attendu encore quelques années avant de découvrir cette vraie merveille !
Fille du meilleur armurier de la ville, si ce n’est de tout le pays voire du continent, Nihal est une jeune fille intrépide qui passe toutes ses journées à jouer à la guerre avec les autres garnements de la cité-tour de Salazar. Le jour où Sennar, un jeune magicien, la bat en duel et gagne ainsi le poignard que son père avait enfin consenti à lui offrir, l’adolescente voit rouge et décide d’aller étudier la magie chez sa tante Soana afin de rendre la monnaie de sa pièce au jeune homme … qui s’avère être l’apprentie de Soana ! Au fil des années, leur rivalité est remplacée par une profonde amitié. Mais leurs destinées les sépare : Sennar est appelé à devenir l’un des plus grands magiciens du Monde Emergé tandis que Nihal n’ambitionne qu’à devenir guerrier parmi les guerriers. L’invasion de la Terre du Vent par les troupes du terrible Tyran précipite les choses … Contre vents et marées, envers et contre tout et tous, Nihal intègre la prestigieuse Académie des Chevaliers du Dragon, ordre exclusivement masculin. Mais la jeune fille ne reculera devant rien : chaque nuit, les esprits de son peuple décimé par les troupes du Tyran l’exhortent à la vengeance …
Je ne peux le nier : au premier abord, l’intrigue de ce premier tome peut sembler affreusement classique et banale. Une héroïne qui se découvre être l’ultime représentante d’une race décimée par la folie meurtrière d’un Tyran invincible, qui s’avère avoir de grands dons innés pour l’escrime et qui va être la seule femme jamais admise dans un ordre exclusivement masculin par la seule force de sa volonté … Beaucoup reproche à ce roman d’accumuler les clichés, et je pourrais presque leur donner raison. Presque, car contrairement à ce que ces lecteurs déçus veulent laisser croire, ce roman est loin de s’arrêter à cela, il est bien plus complexe et riche qu’il n’en a l’air à première vue, et Nihal elle-même est une héroïne bien moins stéréotypée qu’on ne peut le penser. Car Nihal n’est pas uniquement cette adolescente bornée et impulsive, qui aime jouer à la guerre comme d’autres jouent aux cartes, elle n’est pas seulement cette jeune fille rebelle et irréfléchie qui ne cesse de se mettre en danger en en faisant qu’à sa tête. C’est surtout une jeune fille torturée, brisée par l’idée d’être la seule survivante de son espèce, perdue dans ce monde dans lequel elle ne sait où est sa place. Nihal m’a beaucoup touchée, émue, et je me suis rapidement attachée à elle.
De la même manière, l’histoire est loin de se résumer à la lutte entre les Terres Libres et les forces du Tyran, ce magicien hors pair avide de pouvoir et de sang. Il ne s’agit finalement que du contexte, que du prétexte pour nous présenter le cheminement intérieur de Nihal, pour nous conter sa quête initiatique à la recherche d’elle-même. Elle est animée par la haine et ne se sent vivre que lorsqu’elle donne la mort … Et surtout, au plus profond d’elle-même, elle se demande pourquoi elle est en vie alors que tous les siens sont morts. A ses yeux, être l’ultime représentante d’une race exterminée fait peser sur elle la responsabilité de tous les venger. Ido, son vieux maitre un peu grincheux mais finalement fort sage, aimerait lui faire comprendre que la colère et la vengeance ne peuvent guider nos vies, que ce n’est pas pour la mort qu’il faut combattre mais pour la vie. J’ai beaucoup aimé la relation qui se noue entre eux … Tout comme j’ai adoré la belle histoire d’amitié entre Nihal et Sennar, ce jeune homme si gentil, si dévoué, si loyal, que j’ai eu grand peine à quitter lorsque leurs chemins se sont séparés.
Avec ce premier tome, l’autrice ne nous conduit donc pas au cœur de cette guerre qui fait rage, même si quelques scènes de bataille ponctuent le récit. Pour l’instant, Nihal n’a encore rien d’une héroïne dont dépend le sort de tout un monde. Pour le moment, elle n’est qu’une jeune fille qui ne sait pas vraiment qui elle est et qui elle veut devenir, qui cherche sa place dans ce monde et dans cette vie. Depuis son plus jeune âge, elle ne rêve que d’aventures et de combats, tout comme le jeune lecteur avide de fantasy rêve de devenir le héros d’une telle histoire. Ce premier tome, certains l’ont trouvé un peu longuet, car durant toute la première partie, nous ne faisons finalement que suivre Nihal dans sa vie quotidienne, tandis qu’elle rencontre son meilleur ami, entame son apprentissage de la magie … Pendant ce temps, nous apprenons à apprécier Nihal, qui derrière son sale caractère cache un cœur en or : elle est très sensible, à fleur de peau, mais préfère se cacher derrière un masque de rudesse. Elle est parfois insupportable, égoïste et égocentrique, mais elle est loin d’être méchante : juste perdue. Ce premier tome, finalement, nous invite à faire connaissance avec elle pour mieux cheminer à ses côtés par la suite.
En bref, vous l’aurez bien compris, j’ai vraiment beaucoup apprécié ce roman. Il n’est certes pas exempt de quelques « défauts », mais pour ma part, rien de rédhibitoire, bien au contraire. Avec ce premier tome, j’ai eu le sentiment de retomber en adolescence, tandis que je découvrais à tâtons les mondes fabuleux de la fantasy : j’ai ressenti le même émerveillement teinté de frustration à l’idée de n’être qu’une misérable humaine sur Terre et non une intrépide demi-elfe prête à vivre de fabuleuses aventures. Ce type de fantasy m’avait manqué, je ne m’en rends compte que maintenant que je l’ai retrouvé … Ce roman, c’est tout à la fois un roman d’apprentissage, un roman d’amitié et un roman d’aventure. C’est un roman incroyablement captivant : je n’ai pas vu les chapitres passer, j’étais juste tellement happée par cette histoire à la fois si prenante, haletante et si émouvante, poignante. Je le conseille donc à tous les amoureux de la fantasy qui n’ont pas peur de croiser quelques stéréotypes au détour d’une page, à tous ceux qui apprécient les personnages torturés et imparfaits, à tous ceux qui ont juste envie de s’évader dans un monde aussi beau que dur. Une réussite pour ma part !
http://lesmotsetaientlivres.blogspot.com/2020/09/chroniques-du-monde-emerge-tome-1-nihal.html
Chronique parue en 2016.
Autant j'ai eu un peu de mal à rentrer dans l'histoire (mea culpa, à mettre sur le dos de la fatigue), autant après les cent premières pages, je ne pouvais plus m'arrêter de lire, c'était frénétique ! Cela faisait très longtemps que je souhaitais lire la dernière saga de Licia Troisi, une auteure italienne très talentueuse qui a de l'imagination à revendre en matière de fantasy médiévale, ce qui semble être sa spécialité. Et elle y excelle, je vous le garantis ! Je ressors toujours de ses livres entièrement satisfaite, à peine remise de ma chevauchée à dos de dragon ou du combat épique et sanglant que je viens juste de livrer. Dans les mondes de Licia Troisi, c'est beaucoup de sueur, d'entraînement, de hardiesse, de ventres qui crient famine, de combats contre le mal et l'injustice qui s'expriment de façons diverses et variées (comportement des êtres humains, mentalités, catastrophes naturelles ou plutôt surnaturelles dans le cas de l'autrice, etc.)... et aussi de cœurs battants la chamade après avoir frôlé la mort un nombre incalculable de fois. J'ai aussi eu droit à beaucoup de papillons dans le ventre pour combler mon creux de faim insatiable. Autant vous dire que vous êtes servis en matière de bookboyfriends avec Licia Troisi. Et des bookboyfriends des plus admirables et irrésistibles. Bref, avec cette autrice italienne virtuose en matière de mondes extraordinaires, de rebondissements haletants et qui vous prennent de court et de personnages extrêmement complexes, humains et captivants, tout est toujours réuni pour nous faire passer un moment de lecture inoubliable et d'une intensité à couper le souffle. Et, maintenant que j'y pense, pour ceux (comme moi) qui s'inquiètent de savoir s'ils peuvent lire la saga des Nashira sans avoir lu les trois trilogies du Monde émergé (l'oeuvre la plus important de l'auteure), not inqueting, Nashira est totalement indépendante de cette saga-là ! Mais il faut lire les Monde émergé quand même, parce que c'est juste trop, trop bien ! Ayez confiaaaaance ! (je ne crois pas que d'imiter Kaa soit le plus engageant cependant...) Et justement, après avoir lu ce premier tome, Il sogno di Talitha (j'avais trop envie de l'écrire en italien à nouveau, voilà, c'est tellement beau), je veux lire tous ses romans ! Tout ceux de Licia Troisi, tous ! Et je vous encourage tous à faire de même !
Dans ce tome d'introduction, on nous présente les quatre Royaumes de Nashira (+ à la toute fin du livre, tout le lexique est présent mais on peut bien se repérer dans l'histoire par soi-même, c'est tout à fait compréhensible), chacun correspondant à une saison perpétuelle. L'histoire remplit tous les critères de la fantasy médiévale, elle ne brise aucun code, mais elle ne manque pas de nous emporter dans son monde et de faire preuve d'une grande originalité ! On pourrait croire qu'on a vu et revu ce genre d'histoires fantasy, mais pour moi, on ne se lasse pas de la bonne fantasy, qui plus est écrite d'une main de maître par la remarquable Licia Troisi (je ne cesserai jamais de lui lancer des fleurs, vous êtes prévenus). Ici, chaque univers est spécial, Nashira l'est tout autant. Mon cœur a vibré avec celui des esclaves Femtites, j'ai profondément ressenti leur haine envers les Talarites. Je me suis également évadée avec les deux personnages principaux, à savoir Talitha et son esclave avec lequel elle entretient une si belle relation d'amitié, de confiance et de complicité, Saiph. Ces deux-là ne peuvent pas vivre l'un sans autre, et je fangirle totalement sur eux deux (et je l'assume !). Ce sont deux personnages qui m'ont énormément plu : Talitha pour sa lutte contre l'injustice, sa force de volonté, son courage, sa foi en ses convictions, sa profonde sympathie pour les Femtites, malgré ses défauts, notamment son impulsivité parfois agaçante, Talitha est un personnage fort, déterminé, et que je trouve vraiment inspirant, elle va apprendre de ses erreurs et continuer à avancer malgré le désespoir qui s'abat sur son monde en même temps que la chaleur étouffante du soleil dévastateur; et Saiph (le voilà mon book boyfriend adoré, je l'aime à la folie ♥♥) pour sa dévotion, sa fidélité envers Talitha, son amour pour elle (il ne peut le nier !) qui fait qu'il est prêt à endurer toutes les souffrances, la torture la plus infâme, pour la protéger. Ils forment un tandem parfait. Ce qui m'a beaucoup intéressée dans l'histoire aussi, c'est qu'elle aborde le fanatisme des hommes, la relation de ces derniers à la religion, la cruauté et la cupidité des riches avides de pouvoir et sans la moindre pitié et once de conscience. Leur ignorance et le sort qu'ils réservent aux hérétiques n'est pas sans rappeler la véritable Inquisition au Moyen-Age. J'ai trouvé cela à la fois très bien pensé, extrêmement enrichissant mais aussi juste effarant. Mes poils de bras se sont dressés plus d'une fois pendant ma lecture.
Vous l'aurez compris, j'ai été tout bonnement fascinée par ce premier tome, qui nous emmène à travers tous les Royaumes, qui nous fait vivre de sacrées péripéties, des moments d'angoisse, d'enchantement, de magie avec la fameuse Pierre de l'Air, des moments extrêmement émouvants et une enquête laissée par Lebitha à sa chère sœur Talitha (une autre relation que j'ai trouvé magnifique), pour vaincre le maléfique dieu Cerus, le soleil malveillant... Les Femtites bouillonnent de rage, la révolution va commencer, Talitha et Saiph sont toujours en cavale (et je commence à en avoir mal aux jambes et le souffle court), et le titre du tome prend tout son sens à l'épilogue, ça m'a totalement prise de court... Le rêve déroutant de Talitha est-il prophétique ? Va-t-elle trouver ce qu'elle cherche ? (on le veut de tout notre être) Nashira survivra-t-elle ? (ça aussi) Tant de questions dont je veux absolument les réponses !! Et maintenant que je les aies... Je ne dirai rien. Vous n'obtiendrez PAS. UN. MOT. de ma part. Juste : LISEZ. C'est un ordre. Pour preuve : j'ai couru de suite chercher le tome deux à la bibliothèque, je suis impatiente de le commencer ! (Et je peux vous assurer qu'il est tout aussi excellent, et le tome trois l'est également... Licia Troisi est un pur génie)
Merci PKJ d'avoir traduit et publié cette petite (euphémisme le retour, mais en vrai, ça se lit à une vitesse, cette petite pavasse ! Un pur régal ! N'ayez pas peur pour rien-!) pépite en France ! Je ne vous remercierai jamais assez pour ce choix éditorial si judicieux ! Et cela vaut pour tous les titres de Licia Troisi parus chez vous ! Cœur sur vous ♥ (Cependant, on me dit dans l'oreillette qu'en 2015, un quatrième et dernier tome est paru en italien, Il destino di Cetus... Pourquoi n'en-a-t'on jamais vu la couleur en France ? C'est cruel !!)
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