"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Voilà bien un livre qui ne laisse pas indifférent. Certains détestent radicalement, d’autres adorent sans retenue. Mais, ce qui est peut être le plus marquant, c’est que, dans quelque cas que l’on se place, on ressent souvent beaucoup de difficulté à dire réellement pourquoi on aime, ou pourquoi on déteste.
Mais avant même de parler du livre lui-même, comment ne pas évoquer l’auteur en quelques mots ? Né en 1899, sa santé est restée fragile toute sa vie. Il devient orphelin à la mort de ses parents, trois ans plus tard, tous deux victimes de la tuberculose, et est séparé de son unique soeur, qui décède elle-même en 1909. Cette même année, alors qu’il est élevé par ses grands-parents, sa grand-mère meurt également. Et son grand-père disparait lui aussi alors qu’il n’a que 15 ans, marquant la destruction finale de sa cellule familiale proche : il est probablement inutile de chercher plus loin pourquoi la mort marque aussi profondément son oeuvre… Une oeuvre qui fait qu’il est aujourd’hui considéré comme un auteur majeur du XXe siècle, couronné par le Nobel de littérature en 1968. Malade et affaibli, il choisit de se suicider (au gaz) en 1972, deux ans après que son ami et disciple, Mishima, ait fait seppuku (suicide traditionnel au sabre japonais). Tristesse et beauté est le dernier de ses livres à avoir été publié de son vivant, en 1965.
Mais alors, ce livre ?
L’histoire peut sembler simpliste. En tout cas, de peu d’épaisseur. Une jeune fille, Otoko, séduite par un écrivain, Oki, attend un enfant de lui. Mais il l’abandonne, et elle se retrouve, désespérée, chez les fous. Vingt ans plus tard, sortie de l’asile, elle s’est consacrée à la peinture, et est désormais une artiste reconnue. Oki revient à Kyoto, pour la revoir : il semble avoir envie de renouer les fils de l’histoire interrompue 20 ans plus tôt. Mais Keiko, élève d’Otoko, ne l’entend pas ainsi, et met sur pied une terrible vengeance : elle séduit Oki, mais également son fils, pour détruire le couple – et la vie – d’Oki. On voit également évoluer le personnage de l’épouse d’Oki qui, depuis des années, tolère ses infidélités, pour ne pas renoncer au confort matériel.
Une histoire qui, somme toute, pourrait n’être qu’un vulgaire roman de gare, un peu trash, mais sans grande envergure. Mais… mais d’abord, de l’avis de beaucoup de lecteurs, ce livre laisse une marque. Vous l’aurez compris, ce n’est pas à cause de l’histoire ! Mais le style est inimitable, tout asiatique – et donc tellement dépaysant ! En fait, après avoir refermé l’ouvrage, j’ai soudain réalisé que la poésie avait masqué, pendant toute la lecture, le peu d’intérêt du scénario. Certaines descriptions d’oeuvres d’art japonais peuvent sembler un peu longuettes, et pourtant, j’ai définitivement accroché… La meilleure preuve ? Non seulement cela n’a pas interrompu ma phase nippone, mais cela m’a amené vers Akutagawa Ryunosuke. Vous ne connaissez pas ? Je vous raconterai, un jour, ce que j’ai pensé de Rashomôn et autres contes…
Encore une fois en lisant Kawabata, impossible de ne pas voir tout ce qu'il a pu apporter à un auteur comme Murakami et notamment pour "L'incolore Tsukuru Tazaki..."
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