"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
L'éditeur Belfond a eu la bonne idée, à la fin de l'année 2013, de rééditer ce roman, devenu introuvable depuis quelques décennies et qui est le seul qu'écrivit son auteur : Francis Picabia, bien connu des amateurs d'art, en particulier du mouvement Dada où il fut l'un des artistes, avec Marcel Duchamp (bien que celui-ci préféra de tout-temps garder son indépendance loin de tout mouvement artistique), les plus marquants.
Rédigé en 1924 initialement prévu avec une préface d'Aragon qui ne fut pas retrouvée, qui donc n'a probablement jamais été écrite, ce roman est avant tout un document d'époque précieux qui nous renvoie directement à l'année où le mouvement Surréaliste fit ses premiers pas officiellement symbolisé par la publication de son premier manifeste. Nombreuses sont les personnalité connues que côtoya Picabia lors de ses différentes pérégrinations dans les soirées mondaines de son époque ou lors de ses virées impromptues en automobile. Picabia parcoure ces lieux avec une grande désinvolture, ce qui est un peu sa marque de fabrique ainsi qu'une grande irrévérence et une grande acuité sur les travers de ses contemporains, un anticonformiste aimant jouir de l'instant présent avant tout, un dilettante de premier ordre, c'était ce qu'il était.
Picabia n'est pas vraiment un grand écrivain, ce qui le sauve à mon avis, c'est son sens de la formule, des aphorismes qu'il détenait déjà dans « Jésus-Christ rastaquouère » et son ironie mordante, cachant mal un nihilisme véritable pour celui qui prétendait n'avoir lu qu'un seul livre : « Ainsi parlait Zarathoustra ».
Ce livre est une arnaque littéraire, une supercherie dadaïste. Seule la préface de Tristan Tzara vaut vraiment le coup qu'on s'y attarde. Même les amoureux de la poésie ne trouveront là rien de palpitant. C'est la destruction de toute littérature que l'on rencontre sur son chemin en feuilletant ce livre.
Ce livre est incroyable! A la surface il est teinté à tire-larigot de dérision et il est en profondeur imbibé de nihilisme. Sans oublier qu'il tire à boulets rouges sur toutes les conventions sociales tels que le mariage, la religion, la guerre etc.. J'ai connu cet ouvrage grâce à Gainsbourg qui possédait une édition originale. pour finir voici quelques joyeusetés issus de ce bouquin iconoclaste : "Je ne donne ma parole d'honneur que pour mentir" "Notre phallus devrait avoir des yeux, grâce à eux nous pourrions croire un instant que nous avons vu l'amour de près" Un de mes livres de chevet.
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