J’ai eu envie de lire ce livre car je connais les œuvres de David Hockney mais n’avait jamais entendu parler de Patrick Procktor ; c’est pourtant lui dont le nom est écrit en gros sur la couverture de cette biographie, rejetant à l’arrière-plan celui de David Hockney.
Fabrice Gaignault a...
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J’ai eu envie de lire ce livre car je connais les œuvres de David Hockney mais n’avait jamais entendu parler de Patrick Procktor ; c’est pourtant lui dont le nom est écrit en gros sur la couverture de cette biographie, rejetant à l’arrière-plan celui de David Hockney.
Fabrice Gaignault a peut-être ainsi voulu rendre hommage à ce peintre, dont le talent égalait, voire surpassait celui de son contemporain et qui est tombé dans l’oubli, déjà de son vivant.
Pourquoi deux amis, qui se sont rencontrés en 1962, à la fin de leurs études d’art, fusionnels pendant une dizaine d’années, se nourrissant artistiquement l’un de l’autre, ont-ils pris des chemins si éloignés, l’un vers la lumière et la gloire, l’autre vers la déchéance et l’oubli ? Telle est la question que pose l’auteur, à laquelle il va tenter d’apporter une réponse en interviewant tout ceux qui ont connu Patrick Procktor et en particulier, le plus célèbre d’entre eux, David Hockney, retiré en Normandie mais peignant toujours autant. Il ne donne pas de réponse définitive car il n’y en a probablement pas mais nous fait approcher au plus près l’amitié entre les deux hommes, la longue descente en enfer de Patrick Procktor sur fond des années 60, les Swinging Sixties, le hippie chic, le Pop Art qu’incarnent en particulier Andy Warhol et David Hockney avec leur exagération, leur folie créatrice, leur bouillonnement culturel.
Patrick Procktor est né à Dublin le 12 mars 1936 et s’éteint le 23 août 2003 à 67 ans dans un complet dénuement. Ayant perdu son père très jeune, il est confié à ses grands-parents excentriques et anticonformistes. Par manque d’argent, il est inscrit dans une école d’art mineure. Mais son talent le fait connaître très vite et lui offre le succès. En 1962, il rencontre David Hockney et naît entre eux une amitié profonde, fusionnelle, qui durera une dizaine d’années, à tel point qu’ils ont été surnommés « Prockney ». Les deux hommes s’éloigneront peu à peu pour ne pratiquement plus avoir de contact à partir de 1975 et Patrick Procktor rentrera dans une spirale d’autodestruction qui le conduira à la misère et à la maladie.
Les explications sur les chemins divergents des deux hommes varient selon les personnes interviewées mais on retrouve des constantes :
*Patrick Procktor ressentait le syndrome de l’imposteur et avait un complexe d’infériorité qui le rendait soit exagérément timide, soit exagérément agressif
*Patrick Proctor a vu progressivement son ami entrer dans la lumière du Pop Art et de l’hyperréalisme alors que lui était rejeté dans l’ombre, peignant des aquarelles magnifiques mais qui n’étaient plus à la mode
*Patrick Procktor reste en Grande-Bretagne alors que David Hockney s’installe à Los Angeles où sa renommée éclate.
*Patrick Procktor était un dandy dilettante, aimant la fête, qui se mit à boire beaucoup après l’échec d’une exposition aux États-Unis alors que David Hockney aime être au calme, travaille beaucoup et était ambitieux.
Cette biographie, sur fond d’une période un peu folle, est passionnante, truffée de références artistiques ; j’avoue que j’ai dû aller en chercher certaines sur Internet, apprenant ainsi de nombreuses choses fort intéressantes. Le destin de Patrick Procktor est magnifiquement rendu par Fabrice Gaignault qui, par sa belle écriture, redonne vie à un artiste oublié.
Je regrette que l’auteur se soit vu refuser, au dernier moment, l’autorisation d’insérer des photos des œuvres de David Hockney et de Patrick Procktor par la société artistique du premier et les détenteurs des droits pour le second alors qu’elles sont accessibles sans difficulté sur Internet.