"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Lorsque qu’Avraham Avraham, policier au commissariat d’Holon, banlieue de Tel Aviv, reçoit la mère d’Ofer Sharabi venue signaler la disparition de ce dernier, un lycéen de 16 ans, il se contente de la rassurer pensant à une fugue d’ado. Mais le jeune homme semble s’être littéralement volatilisé. Aucune trace de lui ce mercredi matin jour de sa disparition…
Commence alors une histoire labyrinthique et l’auteur, Dror Mishani, a beau affirmer que la littérature policière n’existe quasiment pas en Israël, il nous en offre là un exemple particulièrement réussi. Un policier presque quadra, célibataire, peu enclin à cuisiner, fasciné par les séries policières à la télé dont il débusque les incohérences ; mais aussi prompt à croire ce que racontent tous les suspects – et Dieu sait s’il y en a à commencer par cet étrange prof d’anglais, voisin du disparu et qui lui avait donné des cours particuliers.
Avraham Avraham est plus proche d’un Kurt Wallander que d’un Hercule Poirot. Il fait même preuve d’empathie à l’égard de ceux qu’il interroge. Une attitude bien éloignée de celle du jeune loup « brillantissime » qu’on lui a collé dans son équipe et dont les dents rayent le parquet. Pourtant c’est bien lui, le flic un peu mou, qui dénouera le nœud compliqué de l’enquête, non sans nous avoir baladés dans les méandres de l’âme humaine. Et dans celles d’une société israélienne peuplée ni d’intégristes ni de brillants génies de la finance.
Si la littérature policière n’existe pas en Israël, Dror Mishani vient de l’inventer pour notre plus grand plaisir.
Qui est Dror Mishani ?
Il est un écrivain et traducteur israélien, spécialiste de l’histoire du roman policier. Sa série de romans sur l’inspecteur de police Avraham Avraham. Le premier titre de la série remporte le prix Martin Beck du meilleur roman policier étranger publié en Suède. Cette série comporte 3 tomes. Prix du meilleur polar des lecteurs de Points en 2015 pour Une disparition inquiétante et prix mystère de la critique en 2021 pour Une Deux Trois
Une deux trois ne fait pas partie de la série de l’inspecteur Avraham Avraham. De quoi sa parle ?
C’est le portrait de trois femmes aux vies très différentes.
Orna est enseignante au lycée, seule avec son fils depuis son récent divorce lorsqu’elle rencontre Guil sur un site de rencontres pour divorcés. Elle fait une fixation quasi obsessionnelle sur son fils de neuf ans, un enfant délicat, mal intégré. Elle fréquente sans vrai désir Guil, un avocat rencontré sur un site Web qui ment avec aplomb sur sa situation conjugale. Elle connaît brutalement une fin tragique.
Emilia est auxiliaire de vie après de personnes âgées, elle a été employée via une agence spécialisée et est lettone. Une pauvre fille solitaire, paumée, mystique. Le fils de son précédent employeur - qui vient de mourir - veut l’aider à trouver du travail. Il s’appelle Guil.
Ella, une femme mariée qui essaie d’écrire sa thèse dans un café où elle se lie avec un homme qui n’est pas inconnu du lecteur.
Extrait :
"Ronen la regarda. Dit qu’il en était parfaitement conscient. Que personne ne savait mieux que lui à quel point Orna était une mère extraordinaire. Elle fut soudain saisie d’une violente envie de le frapper, de poser les mains sur son cou, de planter les ongles dans sa chair et de serrer, exactement ce qu’elle avait ressenti pendant des semaines, juste après l’annonce de sa rencontre avec Ruth et la demande de divorce."
comme trois femmes qui vont croiser le chemin du même homme, Guil à Tel Aviv. Est ce leur cassure, leur fragilité que Guil perçoit ?
Plus qu’une histoire policière, Un, deux, trois est le portrait de trois femmes aux vies très différentes. Les romans qui ce déroule dans ce pays d’Israël son rare, l’auteur instille peu à peu le malaise et le doute chez le lecteur à travers ceux ressentis par ses personnages féminins en accentuant le coeur de la vie de ses femmes. Cela à pour conséquence de nous touché plus lorsque ces dernières sont en danger. Le retournement étonnant que réserve la dernière partie.
4e enquête d’Avi Avraham que je lis toujours avec plaisir.
J’ai aimé qu’il se pose des questions sur son statut de simple enquêteur : ne devrait-il pas, à son âge, occuper un poste plus haut placé ? Ne devrait-il pas résoudre des enquêtes à la portée plus nationale ?
Il est maintenant marié à Marianka, et leur couple est beau à voir lire.
J’ai aimé que deux enquêtes se déroulent en même temps : celle de l’homme disparu de son hôtel, et celle du bébé déposé devant l’hôpital.
J’ai à la fois détesté Liora et eu de la peine pour cette mère qui, sous couvert de défendre sa fille, ne cherche qu’à faire la lumière sur la mort accidentelle de son mari. J’ai détesté qu’elle se serve de la détresse de sa fille pour arriver à ses fins.
J’ai détesté que Liora surnomme l’enquêtrice la bigleuse, parce que celle-ci a des problèmes de vue et ne peut pas focaliser son regard. J’ai été étonnée qu’elle prenne une attitude supérieure avec la policière.
Vous l’aurez compris, Liora est un personnage détestable qui, parce qu’elle a trop souffert adolescente, ne se rend même pas compte qu’elle fait souffrir à son tour.
J’ai aimé qu’Avi continue d’enquêter sur la disparition de Chouchani : qui est-il vraiment ? Pourquoi des indices sont placés après dans sa chambre d’hôtel ? Et j’ai aimé que son enquête officieuse reste en suspend. Pour un prochain roman ?
L’image que je retiendrai :
Celle du costume marron que porte Chouchani à son arrivée à Tel-Aviv et qu’Avi croise régulièrement dans les rues.
https://alexmotamots.fr/un-simple-enqueteur-dror-mishani/
Pour celles et ceux qui cherchent un Maigret plus contemporain, il y a le commissaire Avrahma Avraham ; comme son prestigieux ainé, il prend son temps, se pose des questions, flaire les embrouilles et doute avec raison ; il enquête à Holon en Israël, plus ensoleillé mais aussi exotique que la Belgique enfumée.
Dans « Un simple enquêteur », alors qu’il se demande s’il est bien à sa place dans la police « classique » et qu’il rêve de services spéciaux et du Mossad, il croise deux enquêtes calibrées pour ses interrogations : vrai meurtre ou fausse disparition ? Mossad ou pas Mossad ? abandon d’enfant ou mise en scène paravent ?..
Quel bonheur que cette littérature policière qui se déroule au rythme des problèmes, l’un après l’autre, qui ne s’écrit pas à coup de bagarres et de coups de feu, qui en dit autant sur le héros (anti-héros plutôt !) que sur le pays et la société dans laquelle il évolue.
Vivement le prochain ouvrage de Dror Mishrani !
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