"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Marseille 73 de Dominique Manotti, Points 2022 (1ére édition : Les Arènes, 2020)
J’avais lu le premier roman de Dominique Manotti, Sombre sentier (publié en 1995), un peu par hasard, il y a une quinzaine d’années.
Fin mai 2024, j’ai eu le plaisir de l’écouter débattre au sujet des autrices de romans policiers et de la rencontrer au Festival du livre de Cèze-Cévennes où elle m’a gentiment dédicacé son dernier opus consacré à l’enquêteur Théo Daquin.
Le contexte social de ce livre est inspiré de faits réels… En 1973, la croissance économique de la France ralentit. Les pouvoirs publics décident alors d’expulser les travailleurs immigrés qui n’ont pas de contrats de travail et de logements. À Marseille, la plupart des maghrébins travaillent au noir et vivent dans des taudis ; ils décident de résister et organisent, au début de l’été, une grève générale réprimés dans la violence. S’ensuit une vague d’assassinats perpétrés contre des Algériens. Des comités se mettent en place contre « l’immigration sauvage ».
Pour le jeune commissaire Daquin, récemment nommé à Marseille, il n’est pas facile d’enquêter sur des crimes que ni la police ni la justice n’acceptent de qualifier de racistes ou de « ratonnades » !
L’écriture de Dominique Manotti est très efficace, factuelle, précise, sans fioriture. Le récit est parsemé d’extraits de presse qui qualifient les meurtres de simples règlements de comptes et les traitent comme de banals faits divers. Cela donne une certaine réalité et un effet de miroir à l’écheveau narratif.
Cette historienne de formation et de métier connaît bien son sujet ; elle transpose dans l’élaboration de romans policiers et de romans noirs ses méthodes de travail : recherches, rencontres, accumulation de documents ou d’indices, formulation d’hypothèses à vérifier. Son expertise, ses expérimentations et extrapolations sur le passé sont autant d’outils et de clés pour comprendre et agir au présent. En ce début juillet 2024, sur fond de dissolution de l’Assemblée Nationale, de campagne pour les législatives et de montée en puissance du RN, ce roman interroge une forme de « racisme récurrent », une extrême droite ambitieuse.
Un roman dense, daté, chronologique, de mi-août à début octobre 1973.
Des personnages inspirés de personnes ayant existé, victimes et familles de victimes, nervis de l’O.A.S. amnistiés, entrés dans la police...
Toute une ambiance post guerre d’Algérie, qui nous rappelle que l’Histoire se répète.
Un héros qui revient sur plusieurs romans, flic intègre. Ici, il a du mal à trouver sa place, lui qui vient de Paris, qui doit cacher son homosexualité.
Une claque littéraire comme j’aime en recevoir.
#lesglosesdelapiratedespal
L’action de « l’or noir » se situe au début des années 70 juste avant le premier choc pétrolier. Intrigues politiques, guerre des gangs sur fond de drogue, trafic d’or noir, tout s’entremêle et nous entraine dans une situation complexe, inextricable.
Le policier fraichement arrivé à Marseille saura-t-il démêler l’écheveau ?
Dominique Manotti est experte des situations complexes sur fond d’évènements économiques. Elle sait parfaitement intégrer son intrigue dans l’histoire politique et sociale. Il vaut mieux avoir quelques notions de la période évoquée pour mieux comprendre le fil de l’histoire.
Dans un style un peu rude, direct, franc ses livres sont une petite leçon d’histoire.
S’inspirant de la réalité, le rachat Thomson, Dominique Manotti, nous entraine en Lorraine mais aussi en Corée, en Pologne, à Bruxelles. Elle dénonce à sa manière le détournement de fonds publics, la corruption des décideurs, l’implication de voyous de la finance dans la gestion d’entreprise.
La première partie du livre m’a semblé un peu lente et d’un intérêt moyen. Mais tout compte-fait cette « lenteur » nous permet de nous imprégner de l’atmosphère du moment, de mieux appréhender les ouvriers, leurs difficultés, leurs rêves brisés. Et on s’attache à eux. Alors quand entrent en scène les énarques, les financiers, ceux qui magouillent on espère qu’ils vont tirer leur épingle du jeu.
Un roman policier sur fond d’enjeu économique. Comme à son habitude l’auteur a inscrit son roman dans un contexte politique et social ayant existé.
Un livre complexe (il faut s’y retrouver dans les acteurs du montage financier) mais d’une écriture simple et directe.
On ne présente plus Dominique Manotti. Voir « Marseille 73 »,son dernier roman en date, dans la sélection du PMP est l’assurance d’avoir un candidat sérieux au prix.
Et c’est le cas assurément. Ceux qui connaissent Manotti seront ravis de retrouver le commissaire Daquin ici dans ces jeunes années marseillaises. Ceux qui découvrent vont se ravir du style sec, tranché, vif et hyper documenté, la marque de Manotti.
Le contexte de l’année 73 est très bien expliqué. La circulaire Marcellin-Fontanet parue à l’automne 1972 permet au gouvernement français d’imposer un contrôle strict des immigrés : il leur faut dorénavant un contrat de travail et un logement décent pour obtenir un permis de séjour. Ce n’est pas le cas pour 86% d’entre eux. Cette porte ouvert permet à l’extrême droite (déjà) de lancer une campagne contre l’immigration sauvage sur le thème bien connu du « On est chez nous ». Des mots aux actes… la ville de Marseille voit les algériens tomber un à un…
On suit donc l’enquête pour meurtre de l’un d’entre eux, un jeune garçon, Malek… 2 forces s’opposent, la Sûreté qui n’a pas forcément intérêt à voir l’enquête avancer et l’équipe de Daquin à la PJ qui travaille en sous-main. C’est riche, passionnant, une fiction si proche du réel qu’elle en fait froid dans le dos, une chronique précise d’une époque, d’une ambiance où le sentiment d’impunité était bien ancré. Mais tout cela a bien changé, non ?!
Des personnages hyper réalistes, des situations inspirées de la réalité, Manotti maitrise son sujet sur le bout des ongles… C’est carré, mais pas si froid car l’auteure parvient à humaniser Daquin en plaçant des ingrédients d’intimité où il faut, quand il faut.
Une réussite brillante que ce roman qui claque comme un documentaire avec images d’époque. Dominique Manotti n’a pas fini de radiographier la société française, tant mieux !
Il n'y a pas encore de discussion sur cet auteur
Soyez le premier à en lancer une !
"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
L'auteur se glisse en reporter discret au sein de sa propre famille pour en dresser un portrait d'une humanité forte et fragile
Au Rwanda, l'itinéraire d'une femme entre rêve d'idéal et souvenirs destructeurs
Participez et tentez votre chance pour gagner des livres !