"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Plusieurs truies ont été condamnées à mort pour meurtre au Moyen-âge (et même plus tard), en partant de cette insolite réalité, cette BD nous offre le jugement d'une bête arrachée à ses porcelets après avoir conduit un cavalier vers une chute fatale. Cette lecture surprenante nous entraîne dans un procès grotesque, où la logique des hommes est mise à rude épreuve. Une fable absurde dont la fin jouissante nous ferait presque apprécier les châtiments corporels dans certains cas.
Des soldats parcourent la ville à la recherche d'une truie, coupable d'avoir provoqué la mort d'un cavalier, fils d'un puissant notable. Le porcher se retrouve démuni face à ce qui attend le pauvre animal : la peine capitale. Heureusement, un avocat accompagné d'un fidèle corbeau prend en charge la défense de la truie. S'en suit une confrontation entre l'avocat éloquent et talentueux et le juge aveuglé par son mépris pour les autres. La rhétorique de l'un s'oppose à la bétise de l'autre, sous le regard étonné des animaux, observateurs attentifs de la vie de ces drôles d'animaux.
Par ce résumé, on pourrait penser à une fable de la Fontaine ou à la ferme des animaux de George Orwell. Il y a de cela mais pas que. Cette histoire se joue des codes sans en subir les contraintes. La clarté des traits et des situations appuient précisément sur la férocité des caractères des personnages. L’histoire se passe au moyen âge. Le langage et les dessins nous le confirment sans appuyer la reconstitution. Les deux auteurs laissent émerger une part de magie, d’humour et de critique sociale. A la manière d'un fabuliste, ils pointent les excès des humains et leur assurance hautaine. Le père de la victime, seigneur tout puissant, use de sa force pour que les êtres plient sous ses désirs. Le juge fait de même vis à vis de sa femme. L’avocat, malgré son esprit et son intelligence, fait preuve de présomption quand à son talent et à sa réussite. En miroir de ces trois hommes, l'humilité se retrouve chez les personnages soumis. Il y a quelques innocents, le porcher ou la femme du juge qui n’ont pas la place de parler ni d’être entendus. Leur présence témoigne d'une souffrance sociale et leur résistance d'une envie de soulèvement. Il y a également les animaux. Certains observent, toujours curieux de l'usage abusif de la force. D'autres conseillent, avec une pointe de sagesse. Le corbeau, ici, retrouve un peu de dignité et de recul, nous sommes ici loin de cette histoire fromagère qui aura provoqué tant de moqueries. On pourrait même dire qu'il a appris une leçon, celle de se méfier des éloges et de savoir partir à point. Malheureusement, l'avocat n'entend pas le corbeau. La relation entre les deux témoigne d'un respect réciproque, jusqu'au bout de l'histoire. L'avocat et l'animal parlent. De cette magie, naît le dialogue, principe très malmené dans cette histoire. Les puissants n'écoutent pas les faibles, même quand ils ont mission de justice. Les hommes écrasent les femmes. Les humains maltraitent les animaux. Cette injustice traverse la bande dessinée. L'avocat est le défenseur de tout cela et tente de rappeler la noblesse de sa fonction. L'esprit et les pirouettes rhétoriques sont réjouissants.
Cette bande dessinée est tenue graphiquement par Damien Vidal. Les couleurs aux teintes pastel permettent d’identifier les rapports de force et les aplats marquent le statut social de chaque être. Des visages très définis aux traits marqués s'opposent ainsi au monde animal, montrant la violence qui animent les êtres humains. Les animaux gardent leur réalité ce qui renforce le poids de leurs paroles et le dessin ne tombe jamais dans l'anthropomorphisme. Les oies, les truies, les chevaux ou encore le chat livrent leur pensée. Cela permet à l’histoire d’avoir un pied dans la fiction et un pied dans notre présent. Voici donc une fable sur le combat contre la justice, le dialogue, l'écoute et la considération de l'autre.
Besançon, avril 1973. L'inquiétude grandit à l'usine Lip, fabricant de montres. Le PDG démissionne, le dépôt de bilan guette. Les employés, en majorité des femmes, s'interrogent: que faut-il faire: grève ? réduire les cadences ?
329 jours de lutte commencent. Solange, ouvrière spécialisée, s'implique pour la première fois dans la vie de son entreprise. au grand dam de son mari. Sa conscience politique naissante va changer sa vie.
Cette réédition en poche (9€50 !) nous permet de redécouvrir le récit passionnant de ces évènements historiques pour la vie syndicale française. Laurent Galandon nous fait vivre ces instants par le biais de Solange, personnage emblématique de cette lutte mais aussi de la place de la femme à cette époque.
Auto-gestion, ventes sauvages de leurs produits, retentissement national, tout est raconté ici par le prisme du dessin en noir et blanc fin et humain de Damien Vidal. Impossible de ne pas s'attacher à Solange, symbole de l'évolution de la vie des femmes.
Cet album militant rend un hommage puissant à celles et ceux qui se sont battus pour défendre leurs droits. Il est aussi une trace essentielle pour transmettre une page d'histoire de la lutte ouvrière.
Un livre qui a l air captivant l histoire d une truies mais qui va faire parler d elle je pense un très bon livre à lire cet été, une histoire hors du commun pourquoi pas
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